Publié le 1 Oct 2024 - 17:42
INVESTITURES LÉGISLATIVES 2024

Casse-tête insoluble pour les entités politiques

 

À mesure que les Législatives du 17 novembre 2024 approchent, les tensions au sein des principaux partis politiques sénégalais montent d’un cran. Les investitures, moment crucial où chaque parti désigne ses représentants sur les listes électorales, suscitent des remous qui risquent de bouleverser l’équilibre interne de plusieurs formations politiques. L'Alliance pour la République (APR) et Pastef ne sont pas épargnés par cette vague de mécontentements, à l’instar d’autres coalitions et partis, notamment l'Alliance des forces de progrès (AFP), le Parti démocratique sénégalais (PDS) et plusieurs autres mouvements politiques.

 

Le parti de l'ancien président Macky Sall, l'Alliance pour la République (APR), traverse une période de turbulences sans précédent, notamment en ce qui concerne les investitures pour les Législatives anticipées. Abdoulaye Diouf Sarr, ancien ministre de la Santé et figure de proue du parti à Dakar, menace de quitter le navire.

Selon le quotidien ‘’L’Observateur’’, Diouf Sarr, qui entend se prévaloir d'une légitimité politique solide dans la capitale, n’a pas accepté la place qui lui a été réservée sur la liste départementale pour le scrutin de novembre.

En effet, il aurait été investi sur la liste départementale de l’intercoalition Takku Wallu Sénégal, Samm Sa Kaddu et Jamm Ak Njariñ, une coalition largement dominée par Khalifa Sall. Cette position subalterne est perçue par Abdoulaye Diouf Sarr comme une atteinte à sa dignité, d’autant plus que, selon ses partisans, il estime avoir plus œuvré pour le parti que d’autres responsables qui l'ont devancé sur la liste.

Les dissensions au sein de l'APR ne s’arrêtent pas là. Plusieurs cadres du parti ont manifesté leur mécontentement face aux choix d'investitures. Bien que des démarches aient été entamées pour calmer la situation et tenter de retenir Diouf Sarr au sein du parti, le spectre d’une fracture semble inévitable.

La coalition Samm Sa Kaddu et la difficulté du consensus

Les rivalités ne se limitent pas aux partis traditionnels ; les coalitions électorales sont également touchées. La coalition Samm Sa Kaddu a désigné le maire de Dakar, Barthélemy Dias, comme tête de liste pour les Législatives. Toutefois, selon des membres de la coalition, ce choix n’a pas été simple à faire. Jusqu’au dernier moment, des doutes subsistaient quant à la possibilité de voir Barthélemy Dias occuper cette position et les discussions en coulisse ont été longues et ardues.

La coalition regroupe plusieurs poids lourds de la scène politique sénégalaise. Parmi eux, Taxawu Sénégal de Khalifa Sall, le Parti de l’unité et du rassemblement (Pur) de Serigne Moustapha Sy, Gëm Sa Bopp de Bougane Guèye Dany et bien d'autres partis et mouvements influents.

L'unité de façade présentée au moment du dépôt des candidatures masque des dissensions profondes au sein de ces formations politiques, où chacun lutte pour une meilleure position sur les listes, dans l’espoir de sécuriser des sièges à l’Assemblée nationale.

Pastef et ses investitures sous haute tension

Du côté de Pastef, la situation n’est guère plus reluisante. Plusieurs coordinations locales du parti de l’actuel régime d’Ousmane Sonko sont en pleine tourmente à cause des désaccords autour des candidats. À Pikine, par exemple, une coordinatrice influente a vu son nom retiré d’une circulaire interne douteuse, une manœuvre qu’elle perçoit comme une tentative délibérée de l'écarter de la liste départementale.

Selon des sources internes, Ousmane Sonko avait recommandé aux coordinations de proposer des candidats en fonction des quotas de députés alloués à chaque localité. Cependant, la réalité a été bien différente, avec de nombreux responsables incapables de trouver un terrain d'entente sur les noms à retenir. Hormis les patriotes de France, d’Espagne et de Mbour, les autres coordinations ne sont pas parvenues à un consensus. Face à ces divisions internes, la direction du parti devra inévitablement trancher, exacerbant ainsi les tensions.

And Gor Yi Jotna et le scandale des candidatures confisquées

Un autre exemple criant des conflits internes est le cas du mouvement And Gor Yi Jotna de Me Moussa Diop. Ce dernier a déposé une plainte contre son propre mandataire Boubacar Camara, accusé de confiscation des documents de candidatures nécessaires pour la participation aux Législatives. Camara, en complicité avec des mandataires dans plusieurs départements, a bloqué la candidature de Me Moussa Diop en s’alignant avec les listes de Pastef, ce qui a provoqué une véritable tempête au sein du parti.

Ce scandale met en lumière les manœuvres et les luttes intestines qui secouent de nombreux partis à l’approche des Législatives. L’ambition personnelle et la quête du pouvoir semblent dominer les discussions, souvent au détriment de l’unité et de la stratégie électorale.

L’Alliance des forces de progrès : des démissions en cascade

Au sein de l’Alliance des forces de progrès (AFP), les investitures ont provoqué une vague de démissions. Plusieurs figures emblématiques du parti, dont le Dr Malick Diop et Zator Mbaye, ont décidé de quitter l’AFP, dénonçant une mauvaise répartition des positions sur les listes. Ce mécontentement est révélateur d’un sentiment général de frustration au sein du parti dirigé par Moustapha Niasse où de nombreux militants estiment que leurs contributions n’ont pas été suffisamment reconnues lors des investitures.

PDS : déchirements autour de Karim Wade

Au Parti démocratique sénégalais (PDS), les querelles internes ne sont pas en reste. Doudou Wade, Tafsir Thioye et Hawa Abdoul Ba ont été exclus du parti dans des conditions controversées. Selon eux, Karim Wade, fils de l’ancien président Abdoulaye Wade, est à l’origine de leur éviction, utilisant, disent-ils, l’influence de son père pour asseoir son autorité sur le parti. Ce conflit, qui dure depuis plusieurs années, met en lumière les divisions profondes au sein du PDS où plusieurs factions s'opposent, chacune cherchant à prendre le contrôle de l’appareil politique.

À l’approche des élections législatives du 17 novembre 2024, les partis politiques sénégalais sont secoués par des luttes internes souvent acrimonieuses. Les conflits autour des investitures révèlent les rivalités et les ambitions personnelles qui minent la cohésion des formations politiques. Alors que chaque parti tente de maximiser ses chances de succès, ces divisions internes pourraient affaiblir leurs stratégies et avoir des répercussions sur les résultats électoraux.

L'APR, Pastef, le PDS, l'AFP et de nombreux autres partis et coalitions doivent maintenant relever le défi de maintenir leur unité face à des élections qui s’annoncent disputées et incertaines. Le sort de nombreux leaders politiques se jouera non seulement dans les urnes, mais aussi dans leur capacité à gérer les crises internes qui menacent de fragmenter davantage la scène politique sénégalaise.

Amadou Camara Gueye

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