Le pape François appelle à « écouter le cri » des victimes de pédocriminalité dans l’Église
L’Argentin a atterri dans la capitale portugaise mercredi matin. Il s’est entretenu avec des victimes d’agressions sexuelles, six mois après la publication d’un rapport-choc au Portugal.
La lutte contre la pédocriminalité dans l’Eglise ainsi que la guerre en Ukraine ont marqué les interventions du pape François, mercredi 2 août, aux Journées mondiales de la jeunesse (JMJ) organisées à Lisbonne. Le souverain pontife a exhorté le clergé portugais à « accueillir et écouter » le « cri de douleur des victimes » de violences sexuelles dans l’Eglise. Devant les prêtres, diacres et évêques réunis au monastère des Hiéronymites, Jorge Bergoglio a évoqué « la déception et la colère que certains ressentent à l’égard de l’Eglise, parfois à cause de notre mauvais témoignage et des scandales qui en ont défiguré le visage ».
En février, un rapport d’une commission d’experts indépendants, commandé par la Conférence épiscopale portugaise, a établi qu’au moins 4 815 mineurs avaient été victimes de violences sexuelles dans un contexte religieux depuis 1950. Ces violences ont été dissimulées par la hiérarchie de l’Eglise de façon « systémique », ont-ils conclu après avoir recueilli plus de 500 témoignages dans un pays où 80 % de la population de 10 millions d’habitants se définit comme catholique. La hiérarchie a demandé pardon aux victimes et reconnu qu’il fallait « changer la culture de l’Eglise ».
Le pape a également rencontré mercredi treize victimes de violences sexuelles commises au sein de l’Eglise catholique portugaise, a annoncé le Vatican dans un bref communiqué.
« Des temps tumultueux »
Plus tôt dans la journée, le pape a appelé l’Europe à « bâtir des ponts » pour la paix en Ukraine. « En regardant avec affection l’Europe et l’esprit de dialogue qui la caractérise, on pourrait lui demander : vers où navigues-tu si tu ne proposes pas d’itinéraires de paix, de voies créatives pour mettre fin à la guerre en Ukraine (…) ? », a lancé Jorge Bergoglio lors de son premier discours, applaudi par les autorités et le corps diplomatique au centre culturel de Belém. « Nous naviguons sur l’océan de l’histoire en des temps tumultueux et nous ressentons le manque de courageux itinéraires de paix », a dit le pape, qui ne cesse d’appeler à faire taire les armes en Ukraine depuis le début de l’invasion russe, en février 2022.
Avec onze discours et une vingtaine de rendez-vous, le programme de ce quarante-deuxième voyage à l’étranger s’annonce chargé pour le pape, deux mois après qu’il a subi une lourde opération de l’abdomen. Les organisateurs attendent un million de pèlerins de plus de deux cents pays pour cette semaine de rendez-vous festifs, culturels et spirituels, qui s’est ouverte mardi par une messe donnée au sommet d’une colline surplombant le centre-ville et l’estuaire du Tage.
Quelque 16 000 membres des forces de l’ordre et des services médicaux sont déployés pour l’occasion, et plusieurs routes et stations de métro seront fermées, un défi pour cette ville de 550 000 habitants, qui accueille déjà de nombreux touristes en cette période estivale.
A moins de deux mois de l’ouverture d’un rassemblement mondial à Rome, destiné à se pencher sur l’avenir de l’Eglise, cet événement fait office de baromètre quant à la position des jeunes catholiques vis-à-vis de l’accueil des LGBT +, du mariage des prêtres ou de la place des femmes, autant de sujets sur lesquels le pape François a progressivement esquissé des réformes en dix ans de pontificat.
Le pape effectuera samedi une visite éclair au sanctuaire marial de Fatima (à une centaine de kilomètres au nord de la capitale), avant de revenir à Lisbonne pour participer à une grande veillée, dans un parc de la proche banlieue, et y présider la messe finale le lendemain.
Initialement prévues pour août 2022, reportées en raison de la pandémie, les Journées mondiales de la jeunesse, événement créé en 1986 par Jean Paul II, constituent le plus grand rassemblement catholique au monde. Après Rio de Janeiro (2013), Cracovie (2016) et Panama (2019), il s’agit des quatrièmes JMJ pour François, dont la santé apparaît de plus en plus fragile.
Le Monde