Publié le 20 Aug 2024 - 16:24

Le nouveau régime a bien trouvé un État en ruines !

 

Les Sénégalais de bonne foi le savent : il n’est pas besoin d’attendre encore quelques rapports d’enquêtes ou d’audits que ce soit pour savoir qu’il y’a encore d’autres crimes et scandales commis par le régime de Macky Sall. Les Sénégalais s’impatientent pour la reddition des comptes, mais, lors de sa dernière sortie à la Patte-d’oie à Dakar, le premier Ministre, Ousmane Sonko a rassuré : « Nous avons trouvé un Etat en ruines et les Sénégalais en sauront quelque chose dans les jours à venir, et toutes les conséquences qui vont avec seront tirées ».  Il est étonnant que le mot « ruine » soit considéré comme un abus de langage qui ne serait pas fidèle à la situation du pays telle que laissée par le régime sortant. Or, vu l’ampleur du Mal, le terme « ruine » relève même d’un Euphémisme dans le discours pour atténuer la situation catastrophique du pays.

Ainsi, prendre le mot au 1er degré pour comprendre « ruine » dans le sens de décombres, de débris d’édifices écroulés après une guerre ou par usure du temps comme les ruines de la cité de l’empire gréco-romain, relève de deux choses : de carence en langue française ou de mauvaise foi dans le seul et unique but de jeter l’anathème… en vain. Or, dans ces multiples connotations, et au regard du contexte d’énonciation, ruine recoupe avec déchéance, décadence, dégradation, perte (Le Robert, 2020) ; il peut s’agir, dans ce contexte, de ruine économique, de décadence institutionnelle, de dégradation sociale, de ruine morale, des situations de ruines plus dangereuses même que la destruction d’un bâtiment dont parle un chroniqueur de télé, qui pour étayer son argumentaire, cite les stades et autres édifices. Mesuré à l’aune des crimes et forfaitures commis sous le régime Macky Sall, qui ose dire que le régime sortant n’a pas laissé ce pays en Ruines ? Ruines morales, institutionnelles, politiques, économiques, judiciaires qui se sont métastasées dans l’ensemble des sphères de la société.

  1. Ruines politiques et économiques

En effet, le régime sortant a bien laissé un pays politiquement en ruine car jamais de mémoire d’éléphant le Sénégal n’a connu la crise des valeurs politiques au plus haut sommet, avec de la vilaine transhumance, des mensonges d’Etat colportés, des complots malsains, du népotisme flagrant. De mémoire d’éléphant, le pays n’a jamais connu un recul démocratique aussi alarmant que celui qui était en cours durant le règne de Macky Sall inauguré par une volonté éhontément déclarée de « réduire l’opposition à sa plus simple expression » et couronné par une période de terreur (qui peut en dire et en faire plus en matière de ruines démocratiques ! ». Notre démocratie n’a jamais autant souffert le martyr de parti d’opposition dissout, de ses membres radiés, traqués, malmenés, embastillés, exilés, abattus en pleine rue, drapeau à la main. Ruines politiques et constitutionnelles quand notre calendrier électoral, socle de la démocratie, a été allègrement déstabilisé par la tentative anticonstitutionnelle de briguer un 3ème mandat et le report dangereux de la date de l’élection présidentielle.

Ils nous ont laissé un pays économiquement en ruines avec une paupérisation grandissante de la masse ; ruines des caisses de l’Etat avec des scandales financiers, fiscaux, fonciers, ruines de nos ressources bradées aux puissances étrangères. Ruines économiques par la corruption d’Etat cancérigène qui s’est propagée dans toutes les sphères de la société. Ruines ou carnages économiques, sous fond de ruines du système sanitaire, quand des centaines de malades périssent de COVID-19 alors que des centaines de milliards du contribuable qui leur étaient    destinés sont impitoyablement détournés et engloutis par la mafia d’Etat.   

  1. Ruines du système judiciaire

Le régime sortant a bien laissé un pays dont un pan entier du système judiciaire est ruiné car jamais de mémoire d’éléphant notre constitution n’a été tripatouillée, le code pénal et le code de procédure pénal torpillés. Jamais, l’impunité n’a été érigée en mode de récompense des délinquants affidés du pouvoir, etc…C’est sous le magistère de Macky Sall, que des juges d’instruction ont été sommés de décerner à tort et à travers des mandats de dépôt sans motif légal, des procureurs sommés de fabriquer de fausses preuves pour charger de dignes patriotes, des juges sommés de condamner avant de juger, de calomnier, de diffamer, de violer allègrement les droits les plus élémentaires des citoyens au mépris de leur intime conscience et de leur « serment d’intégrité, de dignité et de loyauté »… envers le peuple. Des juges qui, s’il leur restait une once de dignité, aujourd’hui, choisiront la roulette russe ou tout au moins, leur auto-radiation en attendant leur procès au lieu de mourir d’humiliation, voués aux gémonies qu’ils sont par le peuple sénégalais.

   Ruines quand des forces de l’ordre, avec des nervis opérant à leurs côtés, tirent à bout portant sur leur population civile désarmée, arborant le drapeau de la République, sans poursuite judiciaire. Ruines de la justice quand des décisions de justice, sur commande politique, causent un nombre incalculable de morts, de milliers de détenus politiques, des blessés et infirmes à vie, des familles brisées, des rêves ensevelis…

  1. Ruines de l’Etat de droit

Il y a bien ruine de l’Etat de droit là où nos institutions politiques ont été minées, notre système judiciaire vidé de sa substance, nos structures économiques pillées, nos hôpitaux transformés en mouroirs, nos écoles et universités fermées.  Ruine de l’Etat de droit avec la confiscation des libertés individuelles pour l’instauration de la dictature.

Ruine de l’Etat tout court quand tous ses appareils, toutes ses institutions, tous ses arsenaux militaires, sécuritaires, judiciaires, parlementaires, médiatiques, etc. sont mobilisés, non pas pour les urgences du pays mais pour liquider un seul homme, un espoir, un don de Dieu pour le peuple sénégalais, pour l’Afrique.

« Science sans conscience n’est que ruine de l’âme ». Rabelais ne parlait, certainement pas, de décombre de l’âme … mais bien de déchéance morale, de perte de la substance de l’humain, de sa conscience, de sa dignité, de ses valeurs. L’âme de l’Etat sénégalais a été ruinée par l’assassinat programmé de la démocratie et des institutions, l’âme de la nation sénégalaise, ruinée par la gestion ethnocidaire et destructrice de notre commune volonté de vivre ensemble.

Macky Sall et ses partisans ont tout ruiné, on n’oublie pas le mot gouteu, précipice, chaos (mot le plus utilisé dans les derniers mois du régime moribond), dans lequel ils ont failli plonger le pays en essayant de confisquer la volonté populaire.

  1. Ce qu’ils n’ont pas pu ruiner…

Ils ont tout ruiné sauf la détermination d’un leader politique éthique, responsable et inflexible, avec ses partisans, à la foi inébranlable et jamais éteinte dans le combat contre le système. Pour la démocratie. Pour la Liberté. Des patriotes dans l’armée, à l’honneur chevillé au cœur, des médecins résistants jusqu’au bout pour honorer leur serment, des juges  et avocats intraitables dans leur principe , des résistants qui ont laissé leur vie ou leur carrière dans les rangs des FDS, des résistants opiniâtres dans les médias qui ont fait face aux manipulateurs d’opinions, des universitaires aux prises de position courageuse, des résistants, citoyens, activistes, connus ou anonymes, engagés corps et âmes dans les tranchées des rues et des réseaux sociaux, pour la défense de l’Etat de droit…jusque dans « la bataille épique de Kaffrine ». Voilà ceux qui ont sauvé le pays du chaos dictatorial dans lequel Macky, ses partisans et ses souteneurs allaient définitivement plonger le pays. Mais, par leur esprit de maturité et de grandeur ces résistants ont réussi, de la plus belle des manières (des élections présidentielles libres et transparentes imposées à un dictateur qui a abdiqué) à mettre hors d’état de nuire ces ennemis de la République pour sauver notre chère patrie, le Sénégal (Il est temps de leur rendre hommage). C’est donc bien dans les décombres d’un pays où des pans entiers de la politique, de la justice, de l’économie, de la sécurité, etc. sont en ruines que le nouveau régime a pris les rênes du pouvoir pour redresser la barque, reconstruire, redynamiser et faire progresser dans le sens d’un « Sénégal souverain, juste et prospère » (Le Projet).

Perspectives

L’heure de la politique politicienne est terminée, les partis politiques classiques, repaires de politiciens professionnels, dépassés par le peuple, sont obligés de formater leur système et de se mettre à jour au risque de disparaître.  Le temps des manipulateurs de conscience (tok muy dox) est révolu. Les « experts en magouille » (doyen feu Kéba Mbaye, 1995) ou autres maitres chanteurs perdront leur temps ou disparaîtront. C’est le temps du travail. Les patriotes seront toujours vigilants pour protéger leur projet, leur rêve, autour de leurs leaders charismatiques. Les chantiers sont vastes vu l’ampleur des ruines, les attentes sont immenses, mais l’espoir est permis à la lumière des premiers actes posés, « le logiciel du système est en train d’être réinitialiser, les fondations remises, et les briques posées » comme l’a souligné le chef du gouvernement ; « pour hisser le bâtiment » le plus haut possible, il faut la mobilisation de tous. La tâche ne sera pas facile, parce que « c’est au plus bas de la fosse qu’il nous faut remonter, une remontée jamais vu », c'est Christophe qui parle. Il ajoute : « et pour cela, il faut que le pied s’arcboute, le muscle se tende, les dents se serrent » (A. Césaire, 1964), Le changement de paradigme de gouvernance et de gestion doit catégoriquement déboucher sur la ruine totale du système de prédation et de népotisme installé dans ce pays depuis les indépendances et qui a atteint son apogée avec le règne de Macky Sall. Voyez-vous, Monsieur, « ruine » peut même avoir une connotation méliorative.

Dr El H. Abdoulaye SALL

Enseignant-chercheur

FLSH/UCAD

Section: 
Le droit à l'indifférence, utopie humaniste, fraternité ouverte ou menace morale?
QUELQUES CHANTIERS DES 3 J POUR LA REALISATION DU PROJET (2).  
DÉCLARATION DE POLITIQUE GÉNÉRALE, MONSIEUR LE PRÉSIDENT ENTRE LE MARTEAU DE LA FORFAITURE ET L’ENCLUME DE LA DÉCENCE RÉPUBLICAINE.
Dissolution de l'Assemblée nationale, réformes institutionnelles et questions de réglages
Au bal masqué de l’ignorance et de la vanité
Délinquance des jeunes et insécurité péri-urbaine : priorité à l'éducatif
El Hadji Abdoul Aziz Sy et la consolidation des relations inter-confrérique au Sénégal
LA VIE UTILE DE NDUKUR KACC ESSILUWA NDAO
CONSEIL PRIVÉ DU 5 SEPTEMBRE 1895 : Le rétablissement de la vérité s’impose
La méthode Ousmane Sonko sera-t-elle profitable pour le camp du pouvoir? Par Babacar Papis Samba
J’ÉTAIS PAS À LA PRIMATURE, MAIS…
Il faut de la tempérance, du "saggo" pour gouverner
Bby et le décret de révocation des Présidents du HCCT et du CESE : Ne pas confondre PUBLICATION et NOTIFICATION
À Monsieur le ministre de l’intérieur, le Général Jean Baptiste Tine : PLAIDOYER POUR LA SOUVERAINETÉ ADMINISTRATIVE DE PIKINE
Sur les décisions du Président concernant le foncier
QUESTION NATIONALE PANAFRICAINE : LE CAS DE LA MAURITANIE
Quelles réformes pour sauver l’IPRES et la CSS ?
PEINE DE MORT : LA LONGUE LISTE MACABRE ET NON EXHAUSTIVE DES VICTIMES INNOCENTES QUI PLAIDE EN FAVEUR DU RÉTABLISSEMENT
NOUVEAU DIRECTEUR GENERAL DES ELECTIONS : Pourvu que la lumière jaillisse !
Lettre aux députés du Sénégal