Sénégal Airlines peut-il assurer le transport du Pèlerinage à la Mecque?
Les performances et contre-performances de la compagnie aérienne sélectionnée pour assurer le transport des pèlerins sénégalais vers la Mecque constituent un facteur déterminant dans la réussite ou l’échec de l’organisation du Pèlerinage aux Lieux Saints de l’Islam.
Le pèlerin est aux anges quand il arrive à Médine sans connaitre de retard ou de perturbation de son vol. Mais il l’est davantage quand, au bout d’un mois, après un pèlerinage rythmé d’endurances de toutes sortes, il retrouve son pays et ses parents sans subir les fâcheux ratés du transport aérien qui prolongent au sol les ennuis d’un pèlerin épuisé.
Une des conséquences les plus regrettables des contre-performances de ces compagnies se manifeste quand la cherté du billet d’avion ne met pas à l’abri les pèlerins, obligés de dormir à la belle étoile, à même le sol ou sur des lits de fortune que constituent les bancs de l’aéroport de Djeddah. Les plus chanceux en cas de défaillance sur le planning des vols retour, vont ruminer leur mal dans les hôtels en attendant que l’oiseau de fer reprenne son envol.
S’il est vrai que les aléas techniques resteront toujours en compagnie de l’homme, il est tout aussi vrai qu’une bonne gestion de l’information permet d’éviter bien des déboires. Autrement dit, il suffit quelques fois d’informer à temps les parties concernées pour minimiser les impairs. Il faut reconnaître que ces dernières années, de tels manquements, bien qu’ils demeurent, se font de plus en plus rares. Cependant, le prix du billet reste anormalement élevé.
Le Sénégal a l’habitude de procéder annuellement à un appel d’offre international pour sélectionner la compagnie aérienne en charge du pèlerinage. L’expérience a montré que le transport aérien a fluctué en dents de scie depuis toujours avec ses lots de déboires malgré la participation de compagnies variées ; africaines (Air Afrique), sénégalaises (Air Sénégal international, Sénégal Air Lines) ou étrangères (Saudia ou la compagnie privée saoudienne Zam-Zam).
Aujourd’hui, Le prix encore élevé du billet pour la Mecque s’explique en grande partie par un choix tardif lié à la procédure d’appel d’offre. Si le choix est connu très tôt, la compagnie aura toute la latitude de bénéficier des meilleures offres disponibles juste après le pèlerinage pour anticiper sur la prochaine saison. C’est tout le contraire de ce qui s’est passé jusqu’en 2013 où le choix n’est opéré qu’à trois voire deux mois du pèlerinage, donc au moment où les prix de location des avions montent en flèche.
S’il faut mettre en concurrence notre compagnie nationale avec des géants du transport aérien tels qu’Emirat, Turkish Air Lines ou même Ethiopian Air Lines qui disposent d’une flotte bien fournie et très expérimentée les chances de notre compagnie nationale sont voisines de zéro. Comment une compagnie obligée de louer des avions peut-elle se mesurer aux détenteurs de ces engins volants et proposer un meilleur prix ? Sa seule chance réside alors dans le désistement de ces derniers quand ils trouvent notre offre inintéressante.
Cependant, les lacunes congénitales qui plombent notre compagnie, constituent-elles une raison suffisante pour notre pays qui se veut émergent, de débrancher les appareils qui la maintiennent encore en vie?
L’heure est venue pour l’Etat du Sénégal d’assumer son rôle et de booster l’économie nationale en optant pour notre compagnie nationale qui a besoin d’être soutenue. Sinon, qui le fera à sa place ? Est-il logique de confier ce transport à des compagnies de pays amis tels le Maroc, l’Ethiopie ou même l’Arabie Saoudite ? Imagine-t-on le Sénégal investi de ce rôle dans ces pays ? « Bien sûr que non.
Cela relève de l’absurdité », me dirait-on ! Alors, ce genre de complexe doit être derrière nous. Donnons à notre compagnie nationale, les moyens qu’il faut pour assumer ce rôle. N’est-il pas paradoxal de se doter d’un aéroport flambant neuf digne du 21ème siècle et de s’éterniser dans la location d’avions faute d’une flotte nationale ?
En conclusion, le Sénégal doit supprimer les appels d’offre pour une durée d’au moins deux ans afin de donner à notre compagnie nationale une chance réelle de prendre en charge le transport des pèlerins. Bien sûr qu’il faudrait des garde-fous pour éviter les travers d’un monopole.
Il appartiendra alors à Sénégal Air Lines de trouver un partenaire dans une combinaison ‘gagnant-gagnant’ où les pèlerins bénéficieraient d’un prix du billet accessible, associé à un service de qualité incluant la disponibilité du zam-zam, la gestion des bagages et la régularité des vols.
Cheikh Bamba Dioum
G.I.E YOONU MAKKA