Vingt ans de prison ferme requis contre l’ex-président Mohamed Ould Abdel Aziz
L’ancien dirigeant est accusé d’enrichissement illicite. D’après la justice, il se serait constitué un patrimoine et un capital estimés à 67 millions d’euros.
Le procureur a requis, mardi, vingt ans de prison ferme contre l’ancien président mauritanien Mohamed Ould Abdel Aziz, jugé depuis le mois de janvier à Nouakchott pour avoir abusé de son pouvoir afin d’amasser une immense fortune. « Tous les éléments entre les mains de la justice prouvent la constitution d’un crime », a fait valoir le magistrat.
Accusant Mohamed Ould Abdel Aziz d’avoir « accumulé une très grande fortune que ses revenus légaux ne peuvent justifier » et d’avoir exercé « des activités commerciales incompatibles avec ses fonctions de président de la République » de 2008 à 2019, le procureur a évoqué « un enrichissement illicite condamné par la loi ». Il a aussi réclamé la confiscation des biens de l’ancien chef d’Etat.
Une fortune estimée à 67 millions d’euros
D’après la justice, Mohamed Ould Abdel Aziz, 66 ans, se serait constitué un patrimoine et un capital estimés à 67 millions d’euros au moment de son inculpation, en mars 2021. Sans nier être riche, l’ancien chef d’Etat, fils de commerçant, a refusé de s’expliquer sur l’origine de sa fortune et dénonce une machination ayant pour but de l’écarter de la vie politique.
Il est l’un des rares, parmi les anciens dirigeants poursuivis devant les tribunaux, à devoir répondre d’enrichissement illicite dans l’exercice du pouvoir. Ses pairs jugés par les justices nationale ou internationale le sont surtout pour des crimes de sang, tel, ailleurs en Afrique de l’Ouest, l’ancien dictateur guinéen Moussa Dadis Camara, en procès depuis septembre 2022.
Lors de son réquisitoire d’environ trois heures, le procureur a demandé des peines de dix ans de prison ferme contre les deux anciens premiers ministres et contre deux ministres, ainsi que la confiscation de leurs biens. Il a requis cinq ans de prison contre les autres prévenus.
Descente aux enfers
Après plus de dix ans à la tête de ce vaste et pauvre pays sahélien de 4,5 millions d’habitants, secoué naguère par les coups d’Etat et les agissements djihadistes mais revenu à la stabilité quand les troubles gagnaient le reste de la région, l’ancien président a connu une descente aux enfers depuis l’arrivée au pouvoir de Mohamed Ould Ghazouani. Ce dernier s’est toujours défendu d’ingérence dans le dossier.
Ancien chef d’état-major et ministre de la défense, Mohamed Ould Ghazouani a longtemps été considéré comme l’un des plus fidèles compagnons de l’ex-président. Après avoir préparé son accession au pouvoir, Mohamed Ould Abdel Aziz lui avait cédé la place à l’issue d’élections, dans la première transition non imposée par la force dans un pays abonné aux coups d’Etat depuis son indépendance.
Une quarantaine de défenseurs devaient commencer à plaider ce mardi. Aucune précision n’a été fournie quant à la date du jugement.
Le Monde avec AFP