Publié le 31 Mar 2022 - 17:42
PAPA MAHAWA DIOUF (DG DE L’ASPT ET PORTE-PAROLE DE BBY)

 “Le Sénégal est crédible”

 

Le Secteur du tourisme sort la tête de l’eau, après l’intermède Covid-19 qui a mis à mal son économie. Le Président de la République vient d’inaugurer l’hôtel RIU niché dans la nouvelle station balnéaire de Pointe Sarène. Dans cet entretien le Directeur général de l’Agence sénégalaise de promotion touristique, Papa Mahawa Diouf, se prononce sur les défis de l’heure, l’apport des nouvelles infrastructures sur la vente de la destination Sénégal et les stratégies mises en place pour relancer le secteur. Avec sa casquette de porte-parole de Benno Bokk Yaakaar (BBY), il aborde la question du parrainage et lance un coup de gueule sur les dérapages ethnicistes qui menacent le pays.

 

Lors de l’inauguration de l’hôtel RIU, le Président de la République a réclamé des performances dans le secteur du tourisme. Compte tenu du contexte difficile, quels sont les leviers sur lesquels vous comptez vous appuyer pour mener cette relance du tourisme ?

La relance du tourisme, naturellement, obéit à plusieurs facteurs. Evidemment, des infrastructures hôtelières de dernière génération, avec une chaine internationale comme RIU qui dispose de 100 hôtels dans 20 pays, à travers le monde, en 2020. Le Sénégal étant l’un des derniers hôtels qui arrivent. Ils ont chez le pays voisin, le Cap-Vert, 7 hôtels. Ils emploient 25 000 personnes à travers le monde et, rien qu’en 2020, ils ont transporté pas moins de 22,3 millions de clients, en année de crise. Et ils sont en train de reprendre de la croissance. Une reprise autour de 75%, 80% dans le monde. Je crois même qu’ils ont retrouvé leur niveau de 2019. Donc, c’est une bonne opportunité pour le Sénégal et ça renseigne, au moins sur trois choses. La première : il fait bon d’investir au Sénégal. Une multinationale peut choisir, aujourd’hui d’investir au Sénégal, parce que le pays reçoit bien les investisseurs internationaux. Il est attractif au plan des investissements directs étrangers. Cela veut que l’environnement des affaires est très favorable. Que le travail qui a été fait, à travers ce programme PREA qui était disposé à améliorer cet environnement des affaires, est bon.

Deuxièmement, la relance du tourisme passe forcément par la gestion de la crise sanitaire, avec la Covid-19.  Est-ce que le Sénégal est capable de faire venir des touristes du monde entier. Qui viennent avoir leur séjour et repartir en toute sécurité et au besoin d’avoir une structure sanitaire qui puisse les prendre en charge. Selon cette chaine internationale qui s’appelle RIU, c’est possible au Sénégal. Troisième élément, c’est la bonne nouvelle avec la reprise économique du secteur, pour en revenir aux performances dont vous parlez : que ce soit le personnel, au niveau économique, avec toute la chaine de valeurs, le domaine de la pêche, de l’horticulture, de l’élevage, de l’aviculture. C’est donc une relance du secteur et de toute la chaine. Et, en maintenant le niveau de qualité et de formation des acteurs et des professionnels, nous sommes sûrs que le Sénégal va aller un peu plus vers la résorption de la crise liée à la Covid-19

Parlant de l’hôtel de RIU et, d’une manière générale, de la nouvelle station balnéaire de Pointe Sarène, on voit que le département y fonde beaucoup d’espoir. Pensez-vous qu’ils puissent impacter sérieusement et durablement cette relance du secteur ?

Il y a 800 emplois attendus et, dans le développement déjà attendu de cet hôtel-là, dans la station de Pointe Sarène, il est prévu une progression vers plus de 1025 chambres, avec des projets d’extension, comme l’a dit la représentante de RIU. L’objectif est de faire une autre gamme. Ça c’est la gamme club, mais, il y a également la gamme palace. Combinée à la station qui existe à Saly, cela montre que l’offre balnéaire du Sénégal est en train de s’élargir qualitativement. Lorsqu’une marque internationale comme RIU vient s’investir, ça crédibilise la destination et la station balnéaire. Et c’est ça la vision du Président de la République : aménager des zones intégrées et qui sont bien mises en œuvre par la Sapco sous la supervision du ministre Alioune Sarr.

Avec RIU, ce sont eux qui amènent les touristes, ou bien, ils se contentent de mettre en place les infrastructures et c’est à vous d’amener les touristes ?

C’est un peu tout ça, en même temps. D’abord, RIU est un groupe qui est lié TUI et TUI c’est le tour operator. Donc, eux, ils ont l’habitude de remplir des hôtels, en affrétant des avions pour les touristes, en les amenant en club. Dans l’hôtel, ils ont un programme d’activités déjà ficelé, mais, s‘ils ont envie de sortir de l’hôtel, ils peuvent toujours le faire. Mais, cette offre-là, certainement, ne sera pas en permanence là. Donc, la cible locale est une alternative. La cible événementielle peut être utile aussi, comme le Forum mondial de l’eau ou les JO de 2026. Ces infrastructures-là peuvent en tirer le meilleur profit. Et nous aussi, dans notre travail de communication sur l’offre de la destination, évidemment, depuis même un peu plus de 2 ans, nous mettons que RIU est en train d’investir au Sénégal. Aujourd’hui, on va le mettre dans la gamme de l’offre balnéaire que nous allons présenter un peu partout à travers le monde.

On reproche souvent au Sénégal de faire du tourisme bas de gamme, au lieu d’un tourisme de luxe qui est beaucoup plus porteur de valeur ajoutée. Que répondez-vous à cela ?

C’est une question très intéressante qui va permettre de voir, de montrer la stratégie de l’Agence sénégalaise de promotion touristique. D’abord, le Sénégal a défini une nouvelle stratégie qui vise, de plus en plus, le tourisme haut de gamme. C’est le plan stratégique de développement qui a été mis en branle, dès 2019-2020. D’abord, il y a le PSE. Au niveau du département, c’est la lettre de politique sectorielle que nous suivons. A l’ASPT, nous avons défini une stratégie quinquennale qui permet de voir comment faire évoluer notre offre touristique, au plan de sa promotion. Aujourd’hui, l’image du Sénégal dans le monde et dans ces marchés classiques, c’est d’abord le balnéaire. C’est Saly, un peu Cap-Skirring, Saint-Louis, et puis l’offre écotouristique Sine-Saloum et Kédougou. C’est ce qu’on a comme image globale.

Mais, spécifiquement, c’est la première destination soleil d’hiver en Europe du sud. Les gens qui veulent se dépayser et aller dans un pays tropical, pas totalement loin de l’Europe, dans les années 80 aux années 90, ils avaient comme première destination le Sénégal. Entre temps, les choses ont évolué. Il y a d’autres destinations de même distance qui ont développé un modèle d’industrie hôtelière beaucoup plus performante. Des pays comme Saint Domingue et le Cap-Vert sont allés dans ce sens. Mais, nous avons des avantages qu’ils n’ont pas. Nous avons l’avantage de la diversité de l’offre.

Et vous avez raison, dans ce tourisme de masse, balnéaire, classique du Sénégal- Mais, le Sénégal est en train de glisser vers autre chose. C’est un peu les lodges que vous avez dans le Sine-Saloum. Là-bas, c’est surtout de l’écotourisme. L’expérience dans la mangrove. Vous avez la croisière sur le fleuve Sénégal. Les chutes de Dindéfélo qui offrent une autre expérience ; la promenade des lions dans le Sine-Saloum. C’est de l’écotourisme, c’est du nature qui montre une autre façon de découvrir le Sénégal. Et puis, il y a l’offre qui se renforce dans l’hôtelier, avec RIU. Qui est toujours dans l’hôtellerie de masse en club, mais, qui peut proposer autre chose, si ça marche, notamment, les hôtels palaces qui demandent une autre cible.

C’était vrai, le Sénégal est en transition, pour vendre ce que je viens d’énumérer qui n’est plus simplement l’hôtel, la plage… Moi, je n’aime pas trop le terme tourisme bas de gamme. En tout cas, le Sénégal peut offrir plusieurs gammes à plusieurs cibles et c’est cela notre particularité. Et le tourisme événementiel qui va être de plus en plus important, parce que le Président a investi pour cela. Avec l’aéroport, la compagnie aérienne, le stade de football, avec le Dakar Aréna, le CICAD, l’hôtel Radisson, le TER, le Sénégal devient une destination pour les événements internationaux.

Avez-vous des chiffres à nous donner sur la relance : le nombre de touristes, depuis la levée des mesures de restriction, le taux de remplissage des réceptifs, le chiffre d’affaires de 2021 ?

Il est difficile de parler du chiffre d’affaires global. Ce qu’on sait, c’est que, du point de vue du trafic aérien, autour d’octobre, on était à 79, 80 ou 83% de retour sur la limite de 2019. Les hôteliers nous disent, pour certains, qu’à partir de la Toussaint, ils ont recommencé à voir un regain de relance des arrivées sur leurs agendas et leurs réservations habituelles dans l’hôtellerie. Mais, on n’est pas en mesure, à ce stade, de vous donner un chiffre d’affaires global. Mais, les indicateurs sur les arrivées à l’aéroport sont très positifs. Je pense qu’avant la fin de 2022, on va retrouver un niveau de trafic et d’arrivées en matière de touristes de 2019.

Donc, c’est combien de touristes à peu près ?

Nous étions, en 2109, à 1,9 voire 2 millions de touristes. Et on avait en perspective d’atteindre, dès 2023, les 3,5 millions de touristes. Et il faut faire le ratio entre les 2,5 millions arrivés à l’aéroport et les plus de 1,9 million de touristes.

Vous revenez d’un voyage à Bruxelles où vous avez pris part au salon des vacances. Quelles retombées faut-il en attendre pour le Sénégal ?

C’est d’abord, pour parler de la synergie qu’il y a avec RIU, TUI, qui est le tour operator, était dans cet atelier. Donc, on a discuté de comment organiser l’arrivée des touristes qui vont venir du marché belge, parce qu’il y a beaucoup de touristes qui viendront du marché belge, néerlandais, espagnol et de Londres. Donc, cela a permis de voir avec ces acteurs comment avoir une synchronisation, une synergie d’action sur la promotion de la destination Sénégal auprès de ces marchés-là. Cela a été aussi une occasion pour le marché belge. Les marchés belge et français sont les principaux marchés émetteurs de touristes vers le Sénégal. Donc, cette présence dans ce premier salon qui n’était pas à son niveau habituel nous a permis de montrer à tous ces professionnels et le grand public également que le Sénégal est prêt.

Et nous y sommes allés, pas en tant qu’agence sénégalaise, simplement de promotion touristique, mais avec un fanion. Et nous sommes surtout allés avec le secteur privé sénégalais. Ceux qui ont des hôtels, des agences de tourisme et qui peuvent, tout de suite, proposer des choses aux professionnels bruxellois et à la clientèle directement, pour montrer que nous sommes debout. Que nous ne sommes pas une économie touristique effondrée et qui n’a pas les leviers pour continuer. Parce qu’ailleurs, c’est ça le problème. Vous voyez des hôtels qui n’ont plus de professionnels. Ils sont allés ailleurs. Le secteur est tellement démantelé qu’ils n’arrivent plus à le faire fonctionner. Nous, on montre que nos hôtels sont debout. On a fait face à la Covid et on a des mécanismes et des procédures qui protègent le client et, surtout, nous avons un Etat qui accompagne le secteur. Il faut rappeler tous les accompagnements faits par l’Etat, notamment, le crédit hôtelier de 65 milliards FCFA. Et, à peu près 75 milliards qui ont été reconduits, comme l’a rappelé lundi le Président de la République.

Vous avez été reçu récemment par les membres de Harlem Tourism board. Qu’est-ce que cela représente et quel impact cela va avoir sur votre mission ?

Nous sommes très heureux d’avoir pu accueillir au Sénégal, pour la première fois, l’office du tourisme d’Harlem. Le conseil supérieur du tourisme d’Harlem dirigé par M. Rodgers qui est venu nous visiter avec des cinéastes nord-américains, avec d’autres membres du Harlem tourism board, pour visiter le Sénégal comme destination. Ils ont été reçus par le ministres et par le maire de Gorée. Vous pouvez comprendre tout l’impact que cela a pour eux, que le Sénégal redevienne le centre du tourisme de mémoire qu’il était dans les années 90-2000. Cette rencontre a eu lieu, à la suite de l’ouverture de la ligne Air Sénégal sur New-York et Washington. Pour nous, cela a été l’occasion d’aller voir comment on peut faire en sorte de reconnecter la destination Sénégal avec les acteurs et organisations des afro-descendants nord-américains.

Et notamment sur la préoccupation du pèlerinage, du tourisme mémoriel. Ils ont fait le tour du Sénégal. Ils sont allés à Saint-Louis et le Sine-Saloum aussi et ils ont fait la cause et l’offre de Dakar, dans le but, avec ces agences de voyage et professionnels, d’offrir pour la première fois, depuis très longtemps, une offre variée aux agences de voyage, aux spécialistes des organisations de tourisme mémoriel. Nous avons grand espoir que la prochaine étape sera pour eux d’organiser ces voyages. Et ils le préparent même pour le mois d’août, pour commencer à envoyer les premiers voyageurs.

Et qu’en est-il du partenariat avec Basketball Africa league ? Quel est l’objectif et qu’attendez-vous d’une telle collaboration ?

La BAL est l’équivalent de la NBA en Afrique. Ils appartiennent donc à la NBA dont le réseau a la qualité d’être dense, un réseau de famille, de professionnels du basket et un réseau d’américains qui permet d’attirer des touristes sur le continent africain et en particulier le Sénégal. Donc, nous avons noué ce partenariat avec la BAL pour deux raisons. D’abord, utiliser son circuit de promotion pour promouvoir la destination Sénégal. Deuxièmement, promouvoir aussi le Sénégal en tant que destination événementielle. C’était cela le but et nous en espérons les plus grandes retombées en termes de promotion de la destination Sénégal et de visibilité du Sénégal, comme destination ‘safe’, ‘secure’, pacifique et comme une destination qui offre plusieurs expériences de tourisme possibles. Avec leur réseau Facebook, réseaux sociaux, leurs relations, nous comptons collaborer pour rendre visible le Sénégal.

Vous êtes aussi porte-parole de BBY. Le parrainage cristallise les débats. Pourquoi la majorité s’y accroche, malgré la décision de la Cour de justice de la CEDEAO ?

Je ne crois pas que la décision de la Cour de Justice interdise le parrainage. Il existe dans notre arsenal juridique et les processus électoraux, depuis fort longtemps. On en demandait aux candidats indépendants, depuis 20 ans, je crois. Par ailleurs, il me parait surprenant que de véritables démocrates qui tiennent à nos institutions puissent refuser le parrainage, dans des élections comme celles-là. Avoir des élections sans parrainage, sans filtre, c’est avoir des élections qui vont perdre de la crédibilité. Pour des gens qui considèrent qu’ils ont la confiance des Sénégalais, je ne vois pas où est le problème que d’aller demander le nombre de signatures nécessaires, pour être candidat. Cela ne doit pas être un problème.

Mais, des députés ont été élus avec moins de voix que ce qui est demandé pour le parrainage. Donc, on peut supposer que si le parrainage avait été en vigueur, ils ne seraient pas parlementaires.  

Oui, je comprends ce que vous dites, mais, ne personnalisons pas les sujets. Disons que nous avons un système électoral où, si on ne met pas de filtre, on risque de voter pendant 48 heures. Il y aura tellement de listes que l’organisation matérielle et son coût seront quasiment de l’ordre de l’absurde. Et ce n’est pas un mécanisme nouveau en termes de démocratie. On n’est pas en train de réinventer la roue. C’est une pratique universelle, en démocratie.

Dans les élections du genre, il y a toujours des logiques de parrainage. Il y en a qui passent cette étape, d’autres qui ne la passent pas. Ce sont les règles du jeu démocratique. Et l’esprit, en tout cas, personne ne peut nier son caractère démocratique. Il s’agit pour tout le monde d’aller chercher un minimum de parrainages pour pouvoir être candidat. Je ne pense pas que cela puisse poser problème, au contraire, cela consolide la démocratie. Cela la crédibilise. On ne peut pas être toujours dans la logique où, lorsqu’on est capable de gagner sa commune, le système électoral est bon. Et quand c’est compliqué pour toi de gagner le niveau national, on évoque tout de suite les limites du système. Le système électoral est le même pour tout le monde.

Mais, le parrainage intégral est tout nouveau. Pour des Législatives, c’est la première fois qu’on en demande pour tout le monde. Pourquoi ne pas laisser chacun y aller, comme cela a été le cas, lors des précédentes, étant donné que cela s’était plus ou moins bien passé ?

Je pense que les Législatives avaient suffisamment montré une nécessité d’encadrer le processus. Je crois qu’on avait 47 listes. Cette fois, je pense qu’on n’allait pas avoir 47, mais le double même, si on libère tout le monde. Avec un certain nombre de listes, organiser sur le plan de logistique, les élections, c’est quasiment impossible… Vous vous souvenez avec les 47 listes, les difficultés qu’il y a eu dans certaines zones. Il faut crédibiliser les élections.

Le reproche qui vient souvent est de dévoyer le secret du vote. On considère que celui qui parraine montre clairement pour qui il compte voter. C’est une sorte de sondage ?

Je pense qu’en France, ils sont en élection présidentielle. Il y a des candidats de premier ordre qui n’ont pas même pas pu se présenter.

D’une manière générale, ces tensions ne sont-elles pas symptomatiques de l’échec du dialogue national qui aurait dû être le cadre pour aplanir toutes ces difficultés ?

On peut le voir comme ça. Mais, attention à deux choses. Il y a une culture politique d’une frange de l’opposition qui me parait un peu passéiste, anachronique, parce que fondée toujours sur la contestation permanente. La contestation permanente, c’est en face du parti-Etat ; c’est en face des médias muselés ; c’est en face d’un totalitarisme d’Etat. Ici, nous sommes dans une démocratie ouverte où, chaque matin, les animateurs radio, de revue de presse, se défoulent sur le Chef de l’Etat, parfois, sur sa famille et en toute liberté. Et ils ne sont pas menacés. Pour certains, ils réussissent même à gagner des mairies. Dans un pays comme celui-là, ériger en règle la contestation relève de l’absurde. Il faut que les gens arrivent à faire des propositions.

La deuxième que je voulais dire sur le dialogue, c’est qu’au Sénégal, le dialogue politique est permanent. C’est dans l’ADN du pays et de la coalition BBY, mais aussi, du président de la République qui, il faut le rappeler, a choisi de ne jamais gouverner seul. Il s’agit de l’élargissement et de la démarche inclusive, en impliquant toujours les forces vives de la nation. C’est cela l’esprit du dialogue. C’est donc plus un esprit, une démarche, une doctrine de gouvernance, bien plus qu’une opération ponctuelle qui vise à avoir des résultats immédiats.

Mais, si je puis donner un conseil à nos amis d’en-face, il faut s’adapter à la réalité démographique du pays. Il ne faut pas sous-estimer la culture démocratique sénégalaise. Il ne faut pas sous-estimer la force citoyenne de nos compatriotes. Ce legs démocratique laissé par les pères fondateurs est très fort. On n’est plus dans un régime de parti unique… Ici, tout est ouvert. Quelle est cette façon de voir la politique qui n’est pas fondée sur les échanges, les idées, mais, sur la menace, la bravade, l’annonce du feu qui va brûler le pays. Ce pays ne brûlera pas, parce que les citoyens qui doivent le défendre feront face et le défendront dans la paix, dans la force des idées et des propositions.

   

Les Législatives s’annoncent disputées et BBY reste minée par des tensions entre responsables. Pensez-vous que l’initiative du Chef de l’Etat d’envoyer des émissaires dans tous les départements va porter des fruits ?

Oui, cela commence à porter des fruits. Le président de la coalition a bien fait d’avoir engagé cette dynamique-là. Et dans tous les départements du pays, des missions de rassemblement et de réconciliation sont en œuvre et nous avons de bonnes raisons de croire que l’issue sera heureuse. Parce que, il y a un bon état d’esprit. Dans toutes les familles politiques, il peut y avoir des tensions. Mais, on mesure aussi la grandeur politique des uns et des autres dans leur capacité à se dépasser pour l’intérêt général. Et l’intérêt général, du Président de la République, c’est d’abord l’intérêt du Sénégal.

Quel commentaire faites-vous sur la reprise du dossier Adji Sarr – Ousmane Sonko ?

(Rires). Il est regrettable qu’on veuille réduire le débat public national à une affaire privée. Ça reste une affaire privée. Je demeure convaincu que le Sénégal mérite qu’on parle du pays, de son développement, pour son essor économique, des propositions et des contre-propositions qu’on fait en face de ce qu’est en train de réaliser le Président de la République. Et Dieu sait si c’est exceptionnel et, chaque jour, les Sénégalais se rendent à l’évidence que les ambitions sont grandes, les réalisations sont colossales, l’impact économique est incontestable et le cap est clair pour ce régime. On sait, avec le leader que nous avons, le plan Sénégal émergent, et la coalition qui est en train de se consolider, exactement où le Chef de l’Etat veut mener le pays.

Donc, ça mérite un débat. 10 ans pendant lesquels ce pays s’est incontestablement transformé et personne ne le conteste. Qu’est-ce qu’on va en faire ? A côté du Mali, des tensions dans la sous-région, les menaces djihadistes, quel est le projet politique alternatif ? On ne peut pas réduire cette question qui porte le destin de 17 millions de Sénégalais à une histoire de salon de massage. Voilà pourquoi, je n’ai aucun commentaire sur cette affaire. C’est une affaire de justice entre deux privés. C’est regrettable que toute la presse nationale, tous les analystes veulent se concentrer sur un sujet qui finalement ne nous regarde pas.

Mais, à partir du moment où beaucoup de responsables de la majorité se sont mués en défenseurs acharnés de Adji Sarr contre Sonko, cela a amené la question sur…

Vous avez vu des responsables de la majorité défendre Adji Sarr ?

Bien sûr, ils se sont relayés sur les plateaux télé.

Je pense qu’il y a des gens qui ont agi à titre personnel. En tout cas, nous, vous n’avez jamais vu un texte de la coalition où on a dit qu’on allait défendre x ou y. Mais, j’en appelle à de la responsabilité. C’est un crime odieux qu’on fait à la démocratie sénégalaise, si on veut limiter la perspective du débat public à une histoire qui s’est passée dans un salon de massage entre deux personnes privées. Alors, je ne sais pas ce qui s’est passé là-bas et cela ne me regarde pas. Je ne souhaite à personne de voir dans la rue, dans la presse, ses problèmes privés. La vie politique du pays ne doit pas aller à ce niveau. Sincèrement, je le regrette pour les deux. Franchement, ils doivent tous nous en épargner. Et le premier qui doit nous en épargner c’est Ousmane Sonko lui-même.

Sur le plan économique, la conjoncture est difficile et la vie chère. Pendant ce temps, il est fait au régime le reproche de ne faire que des dépenses somptuaires. Que répondez-vous à cela ?

Vous voyez, on avait dit sur le TER. Plus personne ne le dit. Plus personne n’ose dire que les dépenses qui ont été faites pour le TER étaient des dépenses de prestige. C’est cela aussi la différence dans le leadership et en particulier de celui du Président Macky Sall. Lorsqu’il y a 5 ans, il parlait du TER, en parlant de l’accroissement démographique de la banlieue, et du triangle Dakar-Mbour-Thiès, en disant que cette densification va nous poser problème, dans 15 ans. La mise en route du TER a clos totalement ce débat, en termes d’impact économique, en termes de démographie. En termes de capacité d’aménagement et de développement, c’est sans commune mesure.

Donc, ceux qui disent cela, bien souvent, manquent d’arguments. Encore une fois, les dépenses qui sont investies, que ce soit sur les infrastructures- ce ne sont pas des infrastructures qu’on va déboulonner et amener ailleurs, ça appartiendra aux enfants du Sénégal dans 50 ans. L’hôtel RIU baobab, on ne va pas le démanteler pour l’amener ailleurs. Et si l’hôtel continue de fonctionner, d’ici, 50 ans, ce sont des Sénégalais qui vont y travailler. L’extension du TER qui va à Diamniadio. Dans 50 ans, les rails seront toujours là.

Il faut reconnaitre que nous avons un Président sacerdotal qui travaille pour le legs des générations futures. Ces ressources en termes d’infrastructures qui sont implantées dans le pays : Ila Touba, ponts de Rosso, Foundiougne, de la Gambie. Ce n’est pas fait pour lui. C’est fait pour nos enfants et petits-enfants. Voilà pourquoi ceux qui parlent de la taille de l’investissement, de prestige, manquent d’ambition pour ce pays. Le Sénégal mérite tout ce qu’il y a de technologiquement bien, d’économiquement bien et crédible pour son développement, comme il y en a dans d’autres pays. S’il faut aller les chercher, il faut le faire. Et s’ils viennent ici, c’est parce que le Sénégal est crédible. Il est crédible du point de vue de ses institutions, de sa démocratie, de ses compétences, mais aussi de la gestion du pays.

Dernièrement, il y a eu beaucoup de sorties malheureuses sur l’ethnie, la religion. La dernière en date est celle de Chérif Aïdara. Ces dérapages se multiplient et sapent les fondements de notre société. Quel est votre avis là-dessus ?

Tous les démocrates et tous ceux qui se sentent inscrits dans ce legs du Sénégal qui est le legs des pères fondateurs, que soit Léopold Sédar Senghor, Cheikh Anta Diop, Mamadou Dia, Abdou Diouf, Abdoulaye Wade et le continuateur légitime, le Président Macky Sall. Tous ceux qui s’inscrivent dans cette tradition de dialogue des cultures, des communautés religieuses, confrériques, entre les peuples qui constituent le Sénégal doivent arrêter de garder le silence. Ils doivent pouvoir se lever à chaque fois que c’est nécessaire pour dire non à ces… Je ne sais même pas comment les qualifier. Le débat qui porte sur l’ethnie, la différence entre nos religions, c’est cela notre force. C’est à ça que nous avons été éduqués par nos chefs religieux, par nos hommes de sagesse et j’appelle tous les compatriotes à défendre cette ligne qui est la ligne du Président de la République. Vous l’avez vu, il était intervenu sur la question religieuse pour être ferme. Ces gens ne méritent pas l’attention des compatriotes. Parce que tout ce qu’on a dit ici, en termes de ressources, d’économie, d’infrastructures, cela ne représente absolument rien à côté de ce legs d’une communauté nationale forte autour du vert-jaune-rouge, autour d’une seule identité.

Et cela mérite que, lorsqu’il y a des dérapages que tous les Sénégalais se lèvent à l’unisson, par la presse écrite, la presse audiovisuelle, qu’il y ait une mobilisation pour montrer que, sur ces questions, le Sénégal sait être un et indivisible. Parce que si nous continuons à laisser l’opportunité aux uns de parler de religion, les autres de parler d’ethnie…, nous mettons en danger ce que nous avons de plus cher. Ces gens qui tiennent des discours séparatistes, haineux, ethniciste, de clivage inter-religieux, je les combats et j’en fais mes adversaires politiques. Et j’appelle tout le monde à leur faire face, parce qu’ils n’ont pas droit de cité dans notre modèle démocratique.

Propos recueillis par GASTON COLY

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