Que retenir du score de Tshisekedi au lendemain des résultats provisoires ?
Félix Tshisekedi a été réélu président de la République démocratique du Congo (RDC), avec 73,34% des voix selon un score officiel annoncé ce 31 décembre 2023 à Kinshasa. En attendant les résultats définitifs de cette présidentielle et ceux des élections législatives, provinciales et communales partielles, voici quelques éléments de décryptages concernant la victoire du chef de l'État sortant.
RFI
La République démocratique du Congo (RDC) a le nom de celui qui va diriger le pays pour les cinq prochaines années : il s’agit du président sortant, Félix Tshisekedi, qui a remporté cette présidentielle, à un tour, avec plus de 73 % des suffrages. Des résultats annoncés ce 31 décembre 2023 par la Commission nationale électorale indépendante (Céni).
Kinshasa a majoritairement voté pour Félix Tshisekedi, selon les résultats de la Céni
Depuis la situation est plutôt calme dans le pays, comme à Kinshasa où les envoyés spéciaux de RFI se trouvaient ce 1ᵉʳ janvier 2024 à la mi-journée. Plus précisément dans la commune de la Gombe, considérée comme le centre administratif de la capitale. Un quartier de bureaux qui, forcément, sont fermés en ce jour férié.
Comme un peu partout dans le monde hier soir, les gens y sont sortis pour fêter la nouvelle année. Des stigmates d’une nuit de fête qui étaient encore visibles ce lundi matin.
Dans les rues de la capitale, il n’y a pas de contestation non plus. Selon les résultats de la Céni, la ville a majoritairement voté pour le président Félix Tshisekedi. Ce qui n’était pas évident puisque, traditionnellement, Kinshasa est plutôt acquise à l’opposition. Même si l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS), le parti présidentiel, a un bastion assez fort dans la commune de Limete.
Des alliés de poids dans plusieurs provinces
Finalement, Kinshasa s’est alignée sur beaucoup de provinces et notamment tout le nord de la RDC. Il faut dire que le président sortant s’était allié à des personnalité de poids, comme le vice-Premier ministre, ministre de la Défense, Jean-Pierre Bemba, dont le bastion est le Grand Équateur. Des scores également inattendus à l’Est, hors Katanga acquis à son ex-gouverneur Moïse Katumbi.
Faut-il y voir l’influence des alliés présidentiels venus des Kivus, le ministre des Finances Vital Kamerhe ou encore le président du Sénat Modeste Bahati ?
Dans le reste du pays, une seule province échappe au président réélu : le Kwilu, fief historique de l’opposant Martin Fayulu.
‘’Il y a d’abord cette stratégie très identitaire pendant la campagne. Le président de la République sortant a battu campagne, efficacement, sur une rhétorique très nationaliste anti-Rwanda. Il était un des seuls à pointer directement Paul Kagame comme la source du malheur à l’Est du pays. Le président Tshisekedi a aussi joué sur les peurs – peur de l’inconnu, peur du candidat de l’étranger – parce qu’il s’est finalement construit l’image de protecteur de la souveraineté nationale et, visiblement, apparemment, au regard des résultats provisoires – qui sont contestés par l’opposition –, cette stratégie semble marcher’’, analyse Trésor Kibangula, analyste politique à l'institut de recherches Ebuteli.
Élections en RDC: quelles sont les prochaines étapes après les résultats provisoires pour la Présidentielle?
Si les résultats provisoires de la Présidentielle ont été annoncés ce dimanche, ça ne signifie pas la fin du processus électoral, puisque les candidats vont pouvoir déposer à partir de mardi des recours devant la Cour constitutionnelle.
Un timing serré pour les candidats qui veulent présenter deux recours : ils ont deux jours pour cela, les 2 et 3 janvier. Ces recours éventuels seront examinés par la Cour constitutionnelle qui a une dizaine de jours pour se prononcer et proclamer les résultats définitifs de cette présidentielle.
On attend aussi d’autres résultats. Il y avait en effet trois autres scrutins organisés en même temps : députation nationale, députation provinciale et municipales partielles. Et il va encore falloir attendre pour avoir une idée de la composition du Parlement puisque la proclamation doit avoir lieu le 3 janvier, comme pour les provinciales. Pour les municipales, ce sera un peu plus long : résultats prévus le 4 février prochain.
Et puis, il y a les scrutins qui doivent encore être organisés. Ce sont principalement des scrutins indirects. Le corps électoral doit être de nouveau appelé ce lundi 1er janvier. Selon le calendrier de la Commission électorale nationale indépendante (Céni) : le 25 février, élections des sénateurs ; le 12 mars, des gouverneurs et vice-gouverneurs ; le 30 mars, des bourgmestres, bourgmestres adjoints et les conseillers urbains ; et le 27 mai, des maires et des maires adjoints. D’autres scrutins suivront en 2024, mais plus tard au niveau des secteurs et des chefferies.
Israël
En Israël, la Cour suprême rejette une disposition majeure de la très contestée réforme de la justice portée par Benyamin Nétanyahou
Les quinze juges ont examiné des recours déposés contre une première clause du projet qui vise à les empêcher d’annuler les décisions du gouvernement au motif qu’elles sont « déraisonnables ».
Le Monde
Les quinze juges de la Cour suprême israélienne ont rejeté, lundi 1er janvier, un volet-clé de la réforme judiciaire controversée de Benyamin Nétanyahou. Le projet du premier ministre divise profondément la société israélienne depuis le début de l’année 2023. De nombreuses manifestations ont eu lieu.
Dans une décision rendue lundi, le tribunal a voté de justesse, à la majorité de 8 voix contre 7, en faveur de l’annulation. La Cour suprême a examiné des recours déposés contre une première clause du projet de réforme, qui a été adoptée par le Parlement à la fin de juillet 2023. Cette mesure vise à empêcher les juges de la Cour suprême d’annuler les décisions du gouvernement au motif qu’elles sont « déraisonnables », ce qu’elle a fait à plusieurs reprises jusqu’ici.
Le ministre de la justice, Yariv Levin, a accusé la Cour de « s’arroger tous les pouvoirs », après sa décision. « Dans les faits, les juges [de la Cour suprême] prennent entre leurs mains, avec cette décision, tous les pouvoirs qui, dans un régime démocratique, sont répartis de manière équilibrée entre les trois pouvoirs », exécutif, législatif et judiciaire, a écrit le ministre sur Telegram. Il a aussi critiqué la publication de cet arrêt « en pleine guerre [dans la bande de Gaza], ce qui va à l’encontre de l’unité nécessaire en ces jours pour le succès de nos combattants sur le front ».
Le Likoud, parti de M. Nétanyahou a, lui, fustigé le calendrier de cette décision, affirmant qu’il était « regrettable que la Cour suprême ait décidé de publier son verdict au cœur d’un débat social en Israël pendant que les soldats de droite et de gauche se battent et risquent leurs vies dans la campagne ». « La décision de la Cour est contraire à la volonté du peuple d’unité, surtout en période de guerre », a ajouté le parti.
L’opposition salue la décision
Le chef de l’opposition et ancien premier ministre Yaïr Lapid a, pour sa part, salué la décision, jugeant que la Cour avait « fidèlement rempli son rôle en protégeant les citoyens d’Israël ». Cette décision « met fin à une année difficile de conflits qui nous ont déchirés de l’intérieur et ont conduit à la pire catastrophe de notre histoire », a déclaré sur X M. Lapid, se référant à l’attaque du Hamas.
La décision « doit être respectée », a réagi sur X Benny Gantz, membre du cabinet de guerre et ancien rival de Benyamin Nétanyahou, appelant à l’unité « pour gagner la guerre, ensemble ».
Le Mouvement pour la probité du pouvoir, qui avait déposé le recours contre cette clause, a salué une décision « historique », affirmant dans un communiqué : « Le gouvernement et les ministres qui ont voulu se passer du pouvoir judiciaire ont appris qu’il y a des juges à Jérusalem et une démocratie avec une séparation des pouvoirs ».
L’association d’anciens militaires Ahim Laneshek (Frères d’armes) a apporté son soutien sur X à « l’indépendance de la Cour suprême », tout en appelant à éviter « toute manifestation de haine et de division ».
Mouvement de contestation
Depuis son annonce début janvier 2023, le projet gouvernemental a donné lieu à l’un des plus importants mouvements de contestation qu’ait connu Israël depuis sa création, en 1948.
Selon le gouvernement, la réforme visait entre autres à rééquilibrer les pouvoirs, en diminuant les prérogatives de la Cour suprême au profit du Parlement. Les opposants à la réforme craignent de leur côté que les changements proposés, en faisant sauter des garde-fous à l’action du pouvoir législatif et exécutif, ne fassent basculer la démocratie israélienne vers un système illibéral.
Ils accusent M. Nétanyahou, en procès pour plusieurs affaires de corruption et de conflit d’intérêts, de vouloir cette réforme pour se sortir de ses ennuis judiciaires. Le premier ministre n’a pas encore réagi à la décision.
Israël n’a pas de Constitution ni l’équivalent d’une chambre haute du Parlement, et la doctrine sur le « caractère raisonnable » a précisément été utilisée pour permettre aux juges de déterminer si un gouvernement outrepasse ses prérogatives.
La Cour suprême a par ailleurs décidé qu’elle avait l’autorité d’invalider une Loi fondamentale « dans les cas rares et exceptionnels dans laquelle le Parlement outrepasse son autorité ». Les Lois fondamentales font office de Constitution en Israël.
Le Monde