Atouts et faiblesses
Après avoir servi sans grands succès les Nations Unies au Mali, en Centrafrique et en Libye, le Pr. Abdoulaye Bathily vient d’être nommé envoyé spécial du président Bassirou Diomaye Diakhar Faye et jouera, à ce titre, un rôle majeur dans la médiation entre pays de la CEDEAO et ceux de l’Alliance des États du Sahel (AES).
Le président de la République, Bassirou Diomaye Faye, a nommé Abdoulaye Bathily comme envoyé spécial. Interpellé sur la démarche qu’il compte adopter en tant que médiateur désigné par la CEDEAO pour mener les négociations avec les pays de l’Alliance des États du Sahel (AES), le président Faye a affirmé : ‘’J’ai pu convaincre le professeur Abdoulaye Bathily d’en faire un envoyé spécial. Pas seulement pour cette mission de médiation que la CEDEAO m’a confiée, mais aussi pour d’autres missions. Je peux avoir besoin de son expérience, de son vécu, de sa respectabilité, de sa stature internationale.’’
Par cette nomination, cette grande personnalité de la gauche au Sénégal revient aux affaires, après une riche carrière au plan international. Une carrière qui n’a pas toujours été sanctionnée par de grands succès. Son dernier poste en date est celui de représentant du secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies en Libye. Au mois d’avril dernier, l’historien avait claqué la porte, après avoir constaté l’impossibilité de trouver une solution entre les différents protagonistes qu’il accusait de mettre leurs ‘’intérêts personnels’’ au-dessus des intérêts de leur pays.
Avant la Libye, le Pr. Abdoulaye Bathily a été le représentant spécial de l’ONU pour l’Afrique centrale et chef du Bureau régional des Nations Unies pour l’Afrique centrale, de 2014 à 2016. À ce titre, il était au cœur de la mission onusienne en Centrafrique. Mais là aussi, il n’y a eu guère de grands succès. Idem pour son passage à la tête de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (Minusma) entre 2013 et 2014.
La grande question est donc de savoir si le diplomate sénégalais pourrait, cette fois, faire la différence et aider le président de la République à réconcilier la CEDEAO avec ses membres qui ont entamé une procédure de retrait.
En tout cas, le président de la République, qui dit avoir tout fait pour le convaincre, semble beaucoup compter sur lui aussi bien pour cette question que pour d’autres. ‘’C’est quelqu’un qui, avant même d’en faire un envoyé spécial -j’ai dû lui tordre la main pour qu’il accepte d’en être un - m’a régulièrement conseillé par rapport à mes prises de position’’, a assuré le président de la République Bassirou Diomaye Faye, non sans saluer le patriotisme de l’homme politique sénégalais.
Le chef de l’État n’a pas tari d’éloges à l’endroit de l’ancien leader de la Ligue démocratique (LD). Ce dernier, selon lui, fait partie ‘’des grands hommes qui aiment fondamentalement ce pays, qui se sont beaucoup sacrifiés pour ce pays’’ Il est convaincu qu’en se reposant sur des hommes comme lui, le Sénégal ‘’peut bâtir des consensus forts, non seulement au niveau national, mais aussi dans la sous-région et au niveau international’’.
Avec ses différences expériences dans des théâtres d’opération très difficiles, le professeur Abdoulaye Bathily ne sera pas dépaysé en se rendant dans les pays de l’AES pour jouer les bons offices. Il pourra compter sur sa grande connaissance du contexte géopolitique ouest-africain, mais aussi sur sa maitrise des spécificités culturelles de certains des pays frondeurs de la CEDEAO, dont le Mali dont il parle l’une des langues les plus importantes, à savoir le soninké.
Le professeur Abdoulaye Bathily, 67 ans, est un homme à multiples facettes. Certains connaissent le brillant historien qui a fait ses études en Angleterre et a publié un lexique soninké-français. D'autres se souviennent du leader marxiste de la Ligue démocratique qui n'a pas hésité à s'allier avec le libéral Abdoulaye Wade pour chasser le socialiste Abdou Diouf du pouvoir. C'était en 2000. Beaucoup, enfin, l'ont rencontré lors de ses multiples missions de paix au Liberia, en Guinée-Bissau, au Niger ou au Mali.
MOR AMAR