Le professeur Daouda Ndiaye déparasite
Dans quelques mois, le Sénégal va inaugurer le Centre international de recherche et de formation en génomique appliquée et de surveillance sanitaire (Cigass). Construit sur 2 000 m2, ce bébé du parasitologue professeur Daouda Ndiaye, est une première en Afrique. Dans cet entretien, le nouveau lauréat du Prix francophone de l’Académie nationale de pharmacie française fait un diagnostic médical en passant par la vaccination contre la Covid-19, le vaccin antipaludique et les mutants.
Vous êtes lauréat du Prix francophone de l’Académie nationale de pharmacie française. Comment est décerné ce prix ?
Cette académie regroupe des académiciens de la France et des académiciens (correspondants) qui sont dans beaucoup de pays francophones, mais également alliés à la Francophonie. C’est un prix qui récompense le travail des chercheurs, de spécialistes de la santé, d’enseignants issus de pays francophones qui aura apporté beaucoup à la communauté mondiale dans la lutte contre les différentes maladies. Il aura également fait de telle sorte que des pays francophones où affiliés à la Francophonie, que ce soit en Europe, en Afrique en Amérique, en Asie, puissent avoir un impact dans l’amélioration des conditions de santé des populations, à travers la personne qui a été primée.
En d’autres termes, il faut avoir réalisé, pendant au moins une quinzaine ou vingtaine d’années, des performances en matière médicale, scientifique, en mettant en place des dispositifs, des techniques qui améliorent la santé des populations et de façon palpable. C’est-à-dire sur quelque chose qu’on peut vraiment mesurer et évaluer.
Pour moi, cela a été lié par le travail concernant, d’abord, le paludisme, depuis une vingtaine d’années, mais surtout des techniques que nous avons mises en place. Notamment en 2010, alors que j’étais aux Etats-Unis, à l’université de Harvard en tant que chercheur, une technique qu’on appelle le Tapiac qui permettait d’évaluer la sensibilité des médicaments antipaludiques sur le plasmodium.
Après cela, nous avons, avec l’université de Harvard, développé des techniques de génomique. Ils permettaient de ratisser et de voir le profil génétique des souches qui circulent. La dernière, c’est Illumigene Malaria qui a été une technique de pointe qui a guidé beaucoup de pays. A travers cela et notre expertise, il fallait démontrer qu’au-delà des techniques créées, vous avez aidé des pays à pouvoir lutter efficacement contre les pandémies. De 2016 à 2019, nous avons accompagné l’Algérie pour éliminer le paludisme. Nous avons accompagné d’autres pays tels que le Burundi, Madagascar, la RD Congo, la Mauritanie, la Guinée, le Bénin, y compris le Sénégal, à mettre en place des stratégies de lutte contre le paludisme, mais également les aider à améliorer leur succès.
Donc, c’est un travail qui est évalué ?
C’est un ensemble de processus qui est parachevé par les publications scientifiques. C’est un prix qui est décerné au-delà de ça à des chercheurs non seulement par rapport à ce qu’ils ont créé, fait, mais également ce qu’ils représentent à travers le monde par rapport aux maladies. Nous avons joué un rôle fondamental dans le développement de nouveaux outils. Nous avons, durant Ebola avec Broad Institute et l’université Harvard et l’université du Nigeria, aidé à la mise en place d’une technique qui permettait de diagnostiquer Ebola à travers notre consortium. Nous avons mis en place des plateformes pour séquencer des virus nouveaux. Ce qu’on appelle la Meta génomique. C’est un prix qui doit récompenser la présence de la personne dans les grandes institutions de ce monde. Je suis membres de l’OMS, en tant que conseil paludisme, sur des questions de résistance, de diagnostic.
Nous faisons partie, aujourd’hui, des rares experts du monde à avoir été choisis pour s’occuper de l’élimination du paludisme à l’échelle mondiale. En 2020, l’OMS nous a cooptés pour intégrer le groupe des experts de Covid en charge de la pharmacopée.
Partant de tout cela, ils ont vu que notre dossier était le meilleur. C’est une consécration pour l’ensemble des efforts que nous avons pu mener pour aider le monde dans la lutte contre le paludisme.
Quel sera l’apport de ce prix dans votre carrière et surtout pour le Sénégal ?
Quand vous recevez ce prix, vous êtes reconnu par l’Académie française. Dans toutes les disciplines du monde, les décideurs veulent coopérer avec les meilleurs experts. Parce qu’ils veulent vendre un produit, défendre un programme, mettre en place un processus. Dans tous les pays du monde, dans le cadre de la santé, si vous proposez un programme, quelle que soit la maladie, ils vont demander qui a validé ce processus. Pour preuve, quand il s’agissait d’évaluer la Chine, il ne s’agit pas de choisir des experts par-ci. Il fallait choisir des experts qui devaient aller en Chine et qui devaient montrer ce qui se passe là-bas et certifier.
A l’issue de cette certification, il ne doit pas y avoir de doute, parce qu’on va voir qui a évalué, si cette personne est une reconnaissance mondiale. Ce que nous gagnons déjà, c’est une reconnaissance par nos pairs. C’est aussi un meilleur appui de nos pays. Nous pouvons aider les payer à aller vers l’élimination et à faire venir de l’argent. Parce que, comme je l’ai dit, que ça soit les politiques, les financiers, pour pouvoir sortir de l’argent, il faut des personnes crédibles. Si nous sommes dedans pour faire venir des partenaires, des bailleurs de fonds, c’est évident. C’est aussi une reconnaissance de l’école sénégalaise, parce qu’au temps, pour aller dans un autre pays pour apprendre, on vous dit, il faudra revoir le diplôme. Maintenant, s’ils reconnaissent qu’ici la formation est l’une des meilleures au monde, on ne demandera plus à nos jeunes de faire une validation, entre autres. Cela va faire forcément venir les partenaires financiers, ouvrir des portes aux investisseurs. Cela va permettre une crédibilité des formations qui seront faites à Dakar par rapport à ce que nous sommes en train de faire. Il n’y a pas de limites. Cette consécration ouvre des portes.
Pensez-vous développer des relations nationales et internationales avec les pharmaciens ?
C’est vrai que c’est un excellent point. Nous avons eu à développer beaucoup de relations à travers le monde. Mais pas un focus avec les pharmaciens. Nous avons ouvert beaucoup de portes par rapport à cela, mais bien entendu nous pouvons essayer de voir comment on peut mieux renforcer cela. Même si l’on n’exclut rien aujourd’hui. Que ça soit la pharmacie, la médecine, la chirurgie dentaire, la recherche de la formation. Chaque fois qu’on pensera pouvoir intervenir dans un secteur ou dans un autre, on va tout faire pour qu’il y ait un apport pour que nos jeunes collègues, nos compatriotes puissent bénéficier de cette nouvelle position.
Il y a beaucoup de limites sur la technologie se rapportant à la médecine au Sénégal. Pensez-vous qu’on peut arriver un jour à son perfectionnement ?
Oui. D’ailleurs, c’est une raison pour laquelle le Centre international de recherche et de formation en génomique appliquée et de surveillance sanitaire est né. Ce prix est décerné, il y a quelques mois. Dès que les gens ont eu écho de ça, les partenaires se sont rués au Centre international de recherche et de formation en génomique appliquée et de surveillance sanitaire et sont venus nous accompagner. Au moment où je vous parle, ce centre a fait un mois. Il y a trois institutions qui sont placées pour prendre le centre à leur disposition, afin d’en faire un hub africain. En le faisant, ils apportent une plateforme. Tous les partenaires qui ont voulu investir ici, qui ont voulu avoir une mainmise au niveau de ce centre, il y a des conditions. Vous ne venez pas les mains vides. Il faut apporter une plateforme, et ça c’est les nouvelles générations de machines qui existent à travers le monde. Ce que nous avons aujourd’hui dépasse les frontières.
Nous n’envions personne aujourd’hui. On ne va pas se limiter à la recherche scientifique médicale. J’ai des collègues avec qui j’ai commencé à travailler en cancérologie sur comment aider ces disciplines à ne plus aller en France, en Europe ou aux Etats-Unis pour faire des tests ou des analyses. L’objectif, c’est de tout faire à Dakar. On fait un centre multidisciplinaire. Dans tous les secteurs de la santé humaine et animale, dans le cadre de la formation, de la recherche, du diagnostic, de la prise en charge pour lutter efficacement contre les maladies non transmissibles comme transmissibles. Mais également, pour lutter contre les maladies émergentes et non émergentes qui gangrènent le monde. On peut anticiper sur beaucoup de choses par rapport à la compréhension de ces microbes qui circulent et mieux peaufiner des stratégies de prise en charge de lutte, aussi bien au niveau hospitalier que communautaire.
Comment est né ce Centre international de recherche et de formation en génomique appliquée et de surveillance sanitaire (Cigass) ?
Ce projet est né d’un acte citoyen en 2016. Après Illumigene Malaria, j’ai tout de suite compris qu’il y aura de l’argent et des portes ouvertes. Dès que j’ai eu cette certification, la première chose, j’ai parlé au doyen de la faculté de Médecine d’alors, Doyen Amadou Diouf, d’un projet pour créer une chose à Dakar. Avec le recteur d’alors, le professeur Ibrahima Thioub, qui ont tout de suite compris l’ampleur, ils m’ont dit que c’est faisable. Je leur ai dit que les moyens ne sont pas aujourd’hui réunis, mais j’ai de quoi commencé et avec les retombées des activités scientifiques et de mon statut, je pourrais gagner quelque chose. Je suis un pur produit de l’école sénégalaise, qui a tout obtenu de Dakar, avant d’arriver à l’étranger. Il est important pour moi de créer une sorte de legs pour les générations futures. Quelque chose de vraiment extraordinaire qui permet, demain, à ces jeunes de rester ici et faire tout à Dakar. J’ai voulu rendre à l’université ce que l’université m’a donné. C’est un projet ambitieux. Je me suis enfermé trois semaines pour le rédiger. J’ai été aidé par des collègues pour peaufiner la vision stratégique de ce centre, afin que ça soit un centre multidisciplinaire. J’avais aussi l’ambition d’en faire un centre accrédité OMS.
Donc, le centre est aujourd’hui accrédité OMS pour le diagnostic, parce que c’était anticipé. Au moment où on rédigeait le projet, l’OMS avait déjà octroyé ça. Des institutions comme CDC étaient d’accord pour m’accompagner, de même que Harvard et Broad Institute. La première chose que nous avons faite, c’est d’envoyer une masse critique de jeunes chercheurs sénégalais, tous diplômés à Dakar, en formation à l’université de Harvard. Il y a au moins une vingtaine de jeunes chercheurs déjà préparés. C’est pourquoi, dès que le centre est ouvert, le travail a démarré. Pas plus tard qu’hier, le CDC et la Fondation Bill et Melinda sont prêts à lancer d’autres équipements au centre. C’est une vision d’un citoyen qui a voulu faire en sorte que ce qu’il a gagné en termes de prestige sur le plan financier puisse impacter le vécu des Sénégalais, d’abord, par leur formation et un appui par rapport à la prise en charge. Récemment, il y a eu vraiment l’appui du chef de l’Etat. Dès qu’il a été au courant de ce centre, il a donné son appui considérable.
Le centre est accrédité OMS. On a vu que, parfois, les décisions de l’OMS sont controversées. N’y a-t-il pas de contraintes ?
Toutes les décisions prises par nos ministères de la Santé sont des décisions OMS. Ce sont les gens qui parlent seulement. Nos ministères fonctionnent sur la base des décisions de l’OMS. Les gens doivent savoir que l’OMS, c’est nous et d’autres experts. Par rapport à la Covid, avec tout ce qui a été dit, finalement, c’est la décision de l’OMS qui est appliquée. C’est les experts accrédités qui décident pour l’OMS. Si le Sénégal arrive à éliminer le paludisme en 2030, c’est l’OMS qui viendra pour signer cela. Si elle ne vient pas, il n’y aura pas de certification. Les vaccins qu’on dit homologués, c’est l’OMS qui signe. Si elle ne signe pas, le vaccin ne passe pas. Les médicaments qu’on boit au-delà de la Covid-19, si l’OMS ne signe pas le médicament ne rentre pas, parce que, c’est la police du monde en matière de Santé.
C’est vrai que les autres critiquent l’OMS, c’est normal, parce que des décisions aussi importantes parfois c’est difficile à prendre. Pour avoir ce prix, il fallait que je sois à l’OMS en tant qu’expert, pour prouver que je suis là où on décide. Le fait d’avoir un centre accrédité en matière de diagnostic, pour le moment, c’est le diagnostic microscopique du paludisme. C’est une chance pour le Sénégal. Chaque année à Genève, il y a une réunion de l’OMS, un pays qui ne va pas à la réunion est exclu. Quand tu es exclu, les bailleurs de fonds ne vont plus t’appuyer. A l’OMS, contrairement à ce qui est dit, c’est du sérieux. Les grands prix Nobel, les experts de ce monde, leur rêve c’est d’arriver à l’OMS pour être crédibles. C’est là où les décisions sont prises. Mieux vaut être à l’OMS que de ne pas être à l’OMS. Tous les spécialistes de la Santé savent qu’avoir un papier de l’OMS ou être écouté ou reconnu par l’OMS, c’est une porte ouverte à tout, par rapport aux financements et à la crédibilité.
Comment va se faire la gestion du centre ?
C’est un centre universitaire. Mais avec le recteur, nous avons discuté qu’il soit international. C’est-à-dire où il y aura un conseil d’administration. N’oublions pas que les Américains ont beaucoup investi dans ce centre. C’est la matière grise. Ils m’ont donné beaucoup d’équipements ; ils veulent continuer à appuyer la recherche. La recherche coûte trop cher et nos pays ne peuvent pas le financer. Ce sont des milliards en matière de financement, en matière de formation continue, de maintenance des équipements, nos pays ne peuvent pas le faire. Nous avons l’université de Harvard qui a une mainmise ici.
Ce centre est une sorte de succursale de l’université de Harvard en Afrique. C’est une chose importante pour la gestion. Cela permet à notre université d’avoir un produit qui appartient au Sénégal et géré financièrement depuis les Amériques. Il y aura un conseil scientifique. Il y a un personnel médical pour le moment représenté par les universitaires que nous sommes. Il y a au moins 6 universitaires qui sont en fonction. Il y a un personnel scientifique la plupart est pris en charge par des projets. Ce centre va non seulement jouer le rôle de centre, mais également pour faire le diagnostic de routine. Nous avons planifié d’avoir un personnel permanent, mais qu’une partie puisse être recrutée par l’université, notamment, l’Etat pour que les retombées puissent servir à tout le monde. Le personnel scientifique a été préparé, depuis au moins 10 ans. C’est la partie scientifique qui est la plus importante. Ce qu’il faudra, c’est de faire en sorte qu’il soit recruté complètement par l’université et non pas pris en charge par des projets. Ce que je veux éviter, c’est la fuite de cerveaux. Parce qu’aujourd’hui, quand on est expert de ce centre, ça ouvre toutes les portes.
Demain, d’autres bailleurs de fonds vont demander ; ils sont prêts à doubler le salaire de ce personnel. Maintenant, s’ils sont quelque part où ils sont sécurisés, quel que soit le prix, parce qu’ils sont en train de vivre leur art, ils vont rester. Ils sont épanouis ici. Quand on dit à un jeune, je veux des découvertes, on va réfléchir. Chaque semaine, on a des réunions pour réfléchir sur des stratégies. Il faudra tout faire pour sécuriser ce personnel, pour qu’il n’y ait pas de fuite de cerveau et pour qu’il n’y ait pas de danger financier. Parce que ce personnel est une sorte de convoitise vers le monde. Il y a le mercato, partout. Les gens sont capables d’aller chercher une personne dans une équipe de haut niveau pour une équipe moyenne en triplant le salaire. L’argent, c’est le nerf de la guerre.
Pour le moment, je me débrouille pour payer les salaires. Il y a au moins une vingtaine de personnes pour lesquelles je m’occupe de leur salaire.
Quel est le coût de ce centre ?
Il y a des équipements en route. Parce que dans deux mois, il y aura au moins 600 millions qui seront en route. L’équipement seul va coûter pratiquement 2 milliards 500 millions à 3 milliards. Je ne parle même pas du bâtiment. Je ne donne pas les chiffres, parce que le Sénégalais aime les chiffres. Mais c’est beaucoup d’argent. Peut-être que, d’ici six mois, quand tous les équipements seront là, on vous dira le coût. Je veux éviter le fait que, demain, un autre pays veut ouvrir un centre, ou veut le faire au niveau du pays, on va dire que tel montant va suffire. Alors que ça ne suffira pas. Je veux arriver au top pour faire un bilan global. Au-delà de l’infrastructure bâtie sur 2 000 m2, au-delà des équipements, il y a une partie capitale qu’il fallait gérer. C’est la formation du personnel qui devait travailler ici. C’est beaucoup d’argent, depuis 2010. Cette masse critique de chercheurs qui se sont rendus à Harvard, au CDC Atlanta à l’Institut Broad, c’est une masse extrêmement importante d’argent et de préparation.
C’est pourquoi, pour moi, l’aspect financier est minime par rapport à l’aspect global du coût de ce centre. Parce que sinon, une institution va vous dire : on va créer ce centre-là demain. Ils vont le créer, mais ça ne fonctionnera pas. Ils seront obligés de se fier ici ou qu’on déploie une partie du personnel là-bas. Parce qu’on ne forme pas un expert en génomique en cinq ans. C’est minimum 10 ans. Ces gens qui sont là, je ne suis pas prêt à les libérer. A la limite, on peut aider temporairement, de loin. Parce que c’est un processus très long d’investissement de matière grise. Le coût dépasse même ce que les gens peuvent imaginer. Le centre est devenu physique, mais, il a été virtuel depuis 2014 avec Ebola. C’est l’image du pays qui est rehaussé à travers ce centre.
C’est pourquoi, au-delà de l’aspect travail, il y a des logements. Un expert qui quitte son pays n’a pas besoin d’aller dans un hôtel. Il peut loger dans le centre et faire son travail. Comme dans les hôtels, on a voulu en faire vraiment un local qui n’envie vraiment pas un hôtel par rapport au standing. On a mis la barre très haut.
Vous êtes connu pour avoir fait vos preuves dans la lutte contre le paludisme. Un vaccin antipaludique pour les enfants est trouvé. Est-il efficace ?
On le souhaite. Mais pour le moment, ce qu’on peut dire par rapport à ce vaccin RTSS qui a été testé dans beaucoup de pays comme le Malawi, le Kenya et le Ghana : c’est que les premiers résultats qui sont sortis, parce que cet essai a commencé depuis 2018-2019, prouvent que ce vaccin est efficace à plus de 60 à 70 %. C’est vraiment une première pour un vaccin contre le paludisme. Le paludisme, depuis combien d’années on n’a jamais eu un vaccin en miniature ou à gérer ? Même si ce vaccin était efficace à 30 %, c’est bon pour le moment. Parce que mieux vaut sauver 10 personnes que de ne sauver personne. Ce vaccin va sauver des vies.
Tous les jeunes qui ont eu à prendre ce vaccin, plus de la moitié est sauvée contre un paludisme grave et au décès. Donc, pour le moment, ce vaccin est efficace, mais à un certain degré. Pour le moment, ça ne peut pas protéger tout le monde, mais le niveau de protection est vraiment très acceptable pour être donné aux populations. C’est pourquoi les pays vont se battre pour avoir les vaccins en premier. Nous sommes convaincus que le vaccin est efficace et surtout qu’il est toléré. Parce qu’il est testé sur des enfants de bas-âge où on sait qu’il n’y a aucune immunité. Si ce vaccin a pu les protéger, que sera-t-il pour un enfant de 10 ans ?
Tous les pays sont en train de se battre pour avoir le vaccin. Est-ce qu’au Sénégal vous êtes dans cette dynamique ?
Je ne sais pas ce que l’Etat est en train de faire. J’ai une réunion demain (aujourd’hui) avec le programme. Mais rassurez-vous, le Sénégal est très bien encadré par rapport à cela. Les bailleurs de fonds nous appuient, nous sommes très présents dans toutes les commissions. J’ai discuté avec quelqu’un qui est dans la Commission mondiale de décision ; je ne vais pas révéler notre discussion. Mais si on devait faire une compétition, le Sénégal va être choisi en premier. Parce qu’ils savent le sérieux qu’il y a au Sénégal en matière de lutte. Au Sénégal, les partenaires ont aidé le programme, et le programme a fait un excellent travail. Le mercredi dernier, on a eu une réunion du Comité d’élimination du paludisme au Sénégal. C’est une première au Sénégal.
Donc, les gens sont convaincus qu’on peut aller vers l’élimination. On ne peut pas se permettre de faire un comité, si on ne peut même pas contenir le paludisme. Mais avec le niveau contrôle, on est sûr qu’on maitrise la pandémie et tout le monde veut aller vers l’élimination. Je reste convaincu que si les efforts consentis jusqu’ici sont maintenus, si l’Etat renforce son dispositif, comme on est en train de le faire à travers la Covd-19 et que les bailleurs accompagnent financièrement, nous irons vers l’élimination. Parce que techniquement, nous sommes prêts.
Le vaccin contre le paludisme a montré ses preuves dans beaucoup de pays. Aujourd’hui, on parle de troisième dose de vaccin contre la Covid-19. Est-il nécessaire, au moment où nous sommes en train de continuer la vaccination ?
Oui. Je suis formel. C’est important. Je préfère avoir une protection limite, minime, que de ne pas avoir une protection. Surtout que, pour la Covid-19, les gens sont en train d’écrire les publications. Depuis Omicron, les gens sont Covid, mais ne décèdent pas, pour le moment. Au début, on entendait tant de mille de décès par jour. Là, vous avez des trentaines de milliers de cas, mais pas de décès. C’est parce que les vaccins ont joué leur rôle et c’est ça la vérité.
Maintenant, des mutants (variants) sont naturellement présents. Aujourd’hui, c’est parce que la Covid-19 est très médiatisée, c’est normal, mais ces mutants ont existé chez tous les pathogènes. Quand il y a pression médicamenteuse, c’est-à-dire quand on donne des médicaments ou des vaccins, il y a toujours une forme d’échappement mise en place par l’agent pathogène (le microbe). Cette Covid ne va pas se laisser faire. Elle va muter. Tant qu’il est là, il va continuer à muter. Il mutera avec des séquences coriaces qui vont pouvoir échapper à l’individu et qui vont créer des problèmes à l’individu. Parfois, il peut muter et devenir inoffensif. Omicron, comparé à Delta, mute 30 fois plus et plus rapide, mais est fragilisé. C’est vrai que le virus a tendance à perdre sa puissance. Mais je reste convaincu que c’est parce que les vaccins ont joué leur rôle. Tant qu’on n’aura pas découvert de façon formelle une mutation qui rendrait ces vaccins inefficaces, ils doivent être maintenus.
Donc, si on parvient à voir que le virus qui est là par rapport aux mutants a pu surmonter ce vaccin, ce vaccin n’aurait plus sa raison d’être. Mais jusqu’à présent, il n’y a pas de preuve que ces mutants contournent les vaccins. Donc, il faut aller vers le vaccin. De plus, ceux qui font les vaccins ne dorment pas. Ils savent que le virus est en train de réfléchir pour contourner le vaccin ; eux aussi sont en train de renforcer la puissance du vaccin. Même s’ils ne changent pas le processus du vaccin, mais en mettant des dispositifs à l’intérieur qui rendraient le vaccin beaucoup plus efficace.
A ce rythme, est-ce qu’on ne va pas arriver à quatre, voire six doses de vaccin ?
Aujourd’hui, vous avez été vaccinée contre le tétanos. Si demain, vous êtes piqué par une aiguille, on vous dit d’aller prendre le sérum antitétanique. Mettons-le à l’échelle de médicaments. Si vous avez le paludisme, aujourd’hui, vous vous traitez, dans un mois, vous pouvez refaire le palu. Vous allez prendre encore les médicaments. Ceux qui vivent avec des maladies métaboliques prennent les médicaments tous les jours.
Il y en a qui prennent l’insuline injectable tous les jours. Donc, pourquoi les gens pensent que le fait de prendre les vaccins, c’est beaucoup ? Heureusement, le commun des Sénégalais a compris. Si on arrive à plusieurs doses, où est le problème ? Tant que cela ne crée aucun problème à l’individu, il faut se vacciner. Vous voyez ce qui a été dit, au début, que cela va créer des problèmes. Depuis un an, les gens se sont vaccinés, il n’y a pas eu de problème. Ce qui m’importe, c’est de sauver l’individu. Ce qui nous intéresse, c’est de faire en sorte que la population soit protégée. C’est pourquoi, autant les gens vont dire non, nous, nous dirons oui, parce que c’est ça la solution, la vérité. Si on sait ce que le vaccin peut nous rapporter, qu’on ne le fasse pas faire et qu’on laisse faire, nous avons failli à une mission. C’est facile de dire, comme certains le veulent, ne prenez pas le vaccin. Mais la responsabilité nous oblige, par rapport à ce que nous savons, par rapport à ce que nous avons compris et devant Dieu, de dire la vérité. Je ne regarde pas la population en disant la vérité. Nous avons prêté serment devant les hommes, certes.
Mais c’est au nom du Seigneur que nous avons prêté serment de ne dire que la vérité et de ne faire que la vérité et ce qui est important pour la communauté. Pourquoi les gens ciblent les vaccins ? Mais un médicament est plus dangereux ! Il est éliminé par le rein et métabolisé par le foie. Beaucoup de problèmes qu’on voit au niveau hépatique parfois sont liés aux médicaments. Beaucoup de personnes qui prennent un médicament à vie, finalement, ils ont un problème de reins. Beaucoup de problèmes au niveau du foie, c’est parce qu’il y a des molécules qui sont métabolisées au niveau du foie. Et pourtant, les gens prennent les médicaments. Si certains disent non aux vaccins, parce qu’en réalité ils ont peur, ça se comprend. Ce que je ne peux pas comprendre, c’est que certains qui se lèvent pour contredire les scientifiques dans le domaine scientifique. Et quel est leur argument : ‘’Le Blanc a dit.’’
PAR VIVIANE DIATTA