Clinton pousse Alger sur la voie d'une opération au Mali
La visite de Hillary Clinton ce lundi en Algérie n'a officiellement pas d'objectif précis. Dans les faits, la rencontre de la secrétaire d'État avec le président Abdelaziz Bouteflika sera consacrée pour une large part à la situation au Mali. Washington veut convaincre Alger du bien-fondé d'une intervention militaire dans le nord du Mali et obtenir son accord pour déloger les terroristes d’Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi).
Puissance militaire et diplomatique régionale, l'Algérie a un rôle clé dans la crise malienne. D'une part car les autorités algériennes possèdent des renseignements de première main sur Aqmi, dont la plupart des cadres sont issus du Groupe salafiste pour la prédication et le combat (GSPC), un mouvement algérien actif durant la guerre civile. D'autre part grâce aux liens forts qu'Alger entretient avec les leaders touaregs maliens. Enfin parce que l'Algérie possède 2000 kilomètres de frontières avec le Mali, par lesquels transite la majorité des biens, en particulier l'essence, dont a besoin le «Malistan». «Ce dernier point est le plus important», souligne un diplomate français.
Au départ hostile à voir des troupes dans ce qu'elle considère comme son pré carré, l'Algérie a fini par infléchir sa position. Alger aurait désormais donné son accord tacite à l'opération à condition qu'elle ne comporte que des troupes africaines. Signe de cette évolution, des militaires algériens participeront, les 3 et 4 novembre, à une réunion de planification avec leurs homologues ouest-africains même si une participation directe des Algériens reste exclue.
Pour une solution politique
Les points de vue ne sont pas pour autant accordés. Les Algériens estiment ainsi que la solution au problème malien est avant tout politique. Ils demandent qu'un plan pour l'avenir des populations du Nord soit adopté avant toute opération. Contrairement à la France, ils n'écartent pas non plus le dialogue et particulièrement avec les Touaregs d'Ansar Dine, qu'ils considèrent avant tout comme des nationalistes. Ce groupe islamiste, dirigé par Iyad ag Ghaly, un très proche des Algériens, est l'un des principaux acteurs au nord du Mali. «Les Algériens pensent qu'Ansar Dine peut rejoindre dans son ensemble le front antiterroriste», indique, dubitatif, un spécialiste français du dossier. Les États-Unis n'excluent pas non plus qu'Ansar Dine puisse tenir un rôle.
Washington partage avec Alger une autre divergence d'avec Paris: le timing. Alors que la France entend intervenir le plus tôt possible, les Américains veulent prendre leur temps. «Une telle opération doit être préparée, bien financée et bien renseignée», ne cesse de répéter Johnnie Carson, du département d'État. C'est sur ce dernier point, le renseignement, que Hillary Clinton souhaite le plus l'aide des Algériens, qu'elle voudrait également voir plus souples sur l'avenir du nord du Mali. Seule certitude, les États-Unis, longtemps prudents sur le sort du Mali, sont clairement engagés. Le remplacement annoncé du général Ham par l'expérimenté général Rodriguez à la tête de l'African Command sonne comme une preuve de plus.
Le Figaro