Évolution du Service de la Dette
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Le service de la dette a connu une augmentation significative au deuxième semestre 2024. Les conditions d'emprunt du Sénégal se sont dégradées, portant le service de la dette à plus de 2500 milliards FCFA, contre des prévisions de moins de 1900 milliards.
Dans une déclaration, le ministère des Finances et du Budget a largement abordé les risques liés à la dette publique. Selon les services de Cheikh Diba, « Sur les six dernières années, le stock de la dette de l’Administration centrale de l’État du Sénégal est passé de 7 137,4 milliards FCFA à 13 854,3 milliards FCFA à fin 2023, soit une progression de 17,58 % par rapport à fin 2022. En tenant compte de la dette du secteur parapublic (1 380,8 milliards FCFA), le stock de la dette totale (secteur public) s'élève à 15 235 milliards FCFA, soit 79,97 % du PIB à fin décembre 2023. L'encours global de la dette publique est constitué à 66,8 % de dette extérieure et 33,2 % de dette intérieure », indique le document.
Selon le ministre des Finances, cette évolution significative est à mettre en relation avec les ressources mobilisées dans le cadre du financement des Plans d’Actions Prioritaires (PAP 2014-2018, PAP 2019-2023) du Plan Sénégal Émergent (PSE, horizon 2035). « Ce plan a nécessité la mobilisation de ressources d’un montant total de 9 685,6 milliards FCFA pour la période 2014-2018, et 14 098 milliards FCFA pour la période 2019-2023. Selon le type de créancier, la dette extérieure de l’administration centrale est constituée à 26,15 % de dettes multilatérales, à 24,39 % de dettes commerciales (dont 18,09 % pour les eurobonds) et à 15,5 % de dettes bilatérales. Cette répartition dénote un poids de plus en plus important des crédits commerciaux au détriment des prêts concessionnels et semi-concessionnels », précise le rapport.
Il est important de noter que l’encours de la dette publique, à fin 2023, est composé de 11 594 milliards FCFA de dette à taux fixe (soit 84 %) et de 2 178 milliards FCFA de dette à taux variable (soit 16 %, y compris les BTA). « Concernant la maturité, l’encours de la dette à court terme (selon l’échéance initiale) est arrêté à 193 milliards FCFA, tandis que celui à moyen et long terme s’élève à 13 660,9 milliards FCFA, soit 99 % du portefeuille de la dette », lit-on dans la déclaration.
Le service de la dette explose au deuxième semestre 2024
En 2024, il a été exécuté à hauteur de 57 % au premier semestre. Selon la déclaration, la mise à jour du service à payer pour le dernier semestre a pris en compte les intérêts sur les nouvelles dettes enregistrées, notamment l’eurobond à placement privé (dont les intérêts sont estimés à 17,79 milliards FCFA), ainsi que les émissions sur le marché régional, dont les conditions financières se sont dégradées (hausse des taux d’intérêts et raccourcissement de la maturité), reconnaît le ministère des Finances. « Compte tenu de ces nouvelles informations, le service de la dette de 2024 mis à jour devrait s’établir à 2502,62 milliards FCFA », contre des prévisions dans la LFI 2024 de moins de 1900 milliards.
Le document soulève de grosses inquiétudes pour le Sénégal concernant la capacité à refinancer la dette. Deux options sont redoutées par les nouvelles autorités : soit un coût de refinancement très élevé, soit l’impossibilité de refinancer cette dette. Cela dit, l'espoir demeure, vu les temps de maturité plus ou moins longs. « Les résultats de l’analyse montrent que le risque de refinancement est plus ou moins maîtrisé, même si la dette intérieure, avec un temps moyen d’échéance de 3,4 ans, fait l’objet d’un suivi particulier afin de rallonger les maturités dès que la situation du marché régional devient plus favorable. Toutefois, avec un montant d’environ 430 milliards FCFA mobilisé au cours de l’année 2024 (jusqu’en fin septembre) sur des maturités à court terme, soit 169 milliards FCFA sur la dette intérieure et 262 milliards FCFA sur celle extérieure, ces indicateurs risquent de se dégrader sensiblement, entraînant ainsi un pic en 2025, avec un service de la dette projeté à 3 585,52 milliards FCFA, soit 2 653,44 milliards FCFA en principal et 932,08 milliards FCFA en intérêts. » Cela pourrait créer un cycle infernal avec des pics identifiés en 2026, 2027 et 2028, en raison essentiellement du remboursement de l’eurobond 2018 et de certains prêts commerciaux.
Dans le même sillage, le gouvernement redoute une hausse des taux d'intérêt à supporter, qui pourrait avoir de lourdes conséquences. Le risque de taux d’intérêt, explique le rapport, concerne l’exposition à l’évolution des taux d’intérêt pouvant impacter le montant du service de la dette budgétisée. « Le taux d’intérêt implicite moyen pondéré du portefeuille de la dette extérieure ressort à 3,4 % à fin décembre 2023, et environ 15,4 % de ce stock est à taux variable. Même si une tendance baissière est notée sur certains taux de référence comme l’euribor, l’exposition au taux d’intérêt variable reste non négligeable, avec des taux SOFR toujours élevés (autour de 5 %). Les intérêts dus au titre de la dette directement libellée en taux variables pour l’année 2025 ressortent à près de 237,69 milliards FCFA. Ainsi, toute augmentation d’un point de base (1 %) des taux d’intérêt variables entraînerait une hausse du service de 2025 de l’ordre de 2,38 milliards FCFA : 237,69 * 1/100 », conclut le document.
MOR AMAR