Macky peut et doit mieux faire
Trois après son accession à la magistrature suprême, le président de la République Macky Sall et son gouvernement font l’objet de beaucoup de critiques sur le plan économique. S’ils ne sont pas accusés du fort taux de chômage des jeunes, c’est le faible pouvoir d’achat qui leur est imputé ou encore le taux de croissance qui, selon certains, est toujours insuffisant. La situation du Sénégal est-elle aussi mal en point depuis le 25 mars 2012?
Au rayon des qualificatifs, les mentions ne manquent pas pour décrire la gouvernance de Macky Sall, 3 ans après son accession à la magistrature suprême. Assez bien, Bien, Peut mieux faire... Ce sont entre autres les mentions décernées à l’économie sénégalaise. ‘’Ayant hérité d’un pays où son prédécesseur prédisait qu’il serait incapable de payer les salaires des fonctionnaires les 3 mois suivant son installation au fauteuil présidentiel, on peut s’estimer heureux’’, croit savoir Moustapha Tall, Opérateur économique. De l’avis de ce dernier, si le Sénégal arrive à lever la tête, c’est parce que beaucoup d’efforts ont été consentis.
En 2015, l’Etat projette d’atteindre 5,4% de croissance si l’on se fie aux données de la Direction de la Prévision et des Etudes Economiques (DPEE). Ces progressions notées font croire à M.Tall que les actes posés rassurent. Il en veut pour preuve le fait que le chef de l’Etat ait consolidé les rapports avec les partenaires économiques historiques, prôner l’autosuffisance en riz, lancer l’autoroute Thiès-Touba….
Des incertitudes pèsent sur plusieurs secteurs
Mais selon l’opérateur économique, Macky Sall aurait pu mieux appréhender la situation économique du pays, s’il avait tenu au préalable ‘’des Etats généraux’’. Cela lui aurait permis, dit-il de ‘’savoir où investir plus’’. Il a certes choisi de faire de l’agriculture le moteur de la croissance économique, un choix amplement justifié puisqu’étant un secteur qui emploie près de 70% de la population, sauf, conseille-t-il, qu’il faut l’organiser, afin d’atteindre les objectifs fixés. Le climat de fin de l’impunité qui règne actuellement dans le pays est un point positif qui, selon Moustapha Tall, trace les voies de l’émergence.
Professeur d’économie à la Faseg, Malick Sané estime quant à lui que l’économie sénégalaise se porte ‘’assez bien ‘’, et bien qu’étant en dessous de la moyenne des pays de l’Uemoa. Beaucoup de mesures hardies ont été prises, mais il n’en demeure pas moins que plusieurs secteurs de l’économie sénégalaise sont mal en point. Prenant exemple sur le secteur agricole, M. Sané a regretté le déroulement de la campagne de commercialisation de l’arachide, où s’est posé un ‘’problème de financement’’. De fait, les huiliers n’ont pas pu acheter toute la production attendue.
Quid du secteur industriel ? Beaucoup d’entreprises sénégalaises sont en difficulté en l’occurrence les Industries Chimiques du Sénégal (ICS), Sénégal Airlines… ce qui pose un réel problème. Et même si le Plan Sénégal Emergent (PSE) est axé sur le long terme, la véritable question se trouve, selon M.Sané, dans la ‘’mise en œuvre et la capacité du Sénégal à pouvoir lever tous ces financements qui sont prévus’’. Il estime également que l’amélioration du climat des affaires ne devrait pas non plus être en reste surtout que l’Agence Nationale de la Statistique et de la Démographie (ANSD) annonçait, à l’issue de son enquête en 2014, que 855 entreprises étaient en cessation d'activité bien avant et au courant de l’année 2013.
Les visas et Ebola : des points noirs
Les points noirs sont l’instauration de visas pour entrer au Sénégal et la maladie Ebola. Pour le premier point, le chef de l’Etat a déclaré ce 17 mars qu’’en politique, il faut savoir revenir sur une décision’’. Une façon d’annoncer qu’il va remédier à la situation d’autant plus que le secteur du tourisme mérite véritablement d’être relancé. Pour le professeur Sané, ‘’des mesures contradictoires notamment l’instauration des visas’’, ont conduit à cette situation malencontreuse.
De son côté, la maladie Ebola a eu un impact assez significatif sur l’économie. La fermeture des frontières avec la Guinée, s’est fait ressentir sur les exportations vers ce pays où le Sénégal exporte en moyenne 11%.
Toujours au chapitre des écueils qu’il faut lever, figure la résorption du chômage des jeunes. En diminuant le taux de chômeurs, l’Etat éviterait le ‘’gaspillage des ressources humaines’’. C’est la conviction de Mbaye Diène, Professeur à la Faseg et chercheur au Consortium pour la Recherche Economique et Sociale (CRES). Il estime qu’il faut mener des réformes qui permettent l’adéquation de l’offre de formation à la demande du marché du travail. Ainsi, le taux de chômage serait réduit de façon considérable. Soulignant par ailleurs qu’il est salutaire de réduire les impôts, il pense qu’il y a des ‘’efforts à faire sur le plan infrastructurel pour soutenir les performances des industries et la productivité’’.
Aminatou AHNE (Stagiaire)