Publié le 4 May 2019 - 20:21
SUPPRESSION PREMIER MINISTRE

Jour de vérité pour Mahammed B. A. Dionne

 

En plénière aujourd’hui, l’Assemblée nationale va statuer sur le projet de loi n°07-2019 portant réforme de la Constitution. Ce qui devrait être une simple formalité. En effet, d’après l’ancien député libéral Doudou Wade, la Constitution sénégalaise est l’une des plus faciles à réviser au monde.

 

Aujourd’hui, à l’Assemblée nationale, s’ouvrira une nouvelle page de l’histoire de la République du Sénégal. Après Senghor 1963-1970, Abdou Diouf 1983-1991, Macky Sall va, une nouvelle fois, modifier profondément le régime politique via le même procédé, c’est-à-dire la suppression du poste de Premier ministre. Si ce projet est inscrit sous le sceau du ‘’Fast-track’’, il n’en demeure pas moins que son opérationnalisation fait déjà l’objet de toutes les conjectures. Certaines sources confient à ‘’EnQuête’’ que, lors du passage de la loi en commission technique, mardi dernier, il a beaucoup été question de la nouvelle rédaction de l’article 52 de la Constitution portant sur les pouvoirs exceptionnels du président de la République. Sans vouloir être des oiseaux de mauvais augure, certains députés n’ont pas manqué de demander au gouvernement de clarifier ladite disposition qui, à les en croire, peut demain être sujet à controverse.

Citant un alinéa de l’ancienne disposition (encore en vigueur), l’un d’eux a défendu qu’elle comporte en son sein un alinéa qui prévoit que le chef de l’Etat ne peut, en vertu des pouvoirs exceptionnels, dissoudre l’Assemblée nationale. Mais la majorité des parlementaires estiment qu’à ce propos, il n’y a pas d’équivoque possible. Le président de la République ne peut, même en cas de situation exceptionnelle, procéder à la dissolution de l’Assemblée nationale. Pour eux, le nouvel article 52 n’est pas en contradiction avec l’ancien.

Sur un autre registre, ils sont nombreux, les spécialistes, à soutenir qu’il y a, dans le projet de réforme, un net progrès, en ce qui concerne la séparation entre les pouvoirs Exécutif et Législatif. La réforme constitutionnelle, estiment-ils, instaure définitivement une séparation rigide desdits pouvoirs. Toutefois, il faut reconnaitre que cette séparation a toujours été consacrée, dans une moindre mesure certes, par les textes, sans que cela ne puisse se matérialiser dans les faits. Tout dépendra alors de ce que les représentants du peuple voudront bien en faire.

Le système de scrutin étant ce qu’il est, il est fort à parier qu’il n’y aura pas de sitôt un bouleversement. Du moins, aussi longtemps que le chef de l’Etat aura sa majorité à l’Assemblée nationale. Mais, en cas de cohabitation, les choses pourraient bien changer. Le Législatif va dicter sa loi, informe un spécialiste.

Mais cette séparation rigide n’est pas du goût de tous les députés. Ce membre de la majorité, même s’il affirme vouloir voter la loi pour ses nombreux avantages, regrette le déficit de dialogue entrainé par la suppression du poste de Premier ministre. A l’en croire, les moyens d’action dont disposaient les pouvoirs Législatif (motion de censure et question de confiance) et Exécutif (dissolution) permettaient de contourner des facteurs de blocage. ‘’Imaginons demain, s’il y a cohabitation, les conséquences pourraient être fâcheuses, si le président ne dispose pas de pouvoir de dissolution. Parce que le régime des ordonnances est strictement encadré. De même, avec la suppression du poste, il n’y aura plus de dialogue véritable. Parce qu’il n’y a plus aucune responsabilité du gouvernement ou des ministres vis-à-vis du parlement. Les questions écrites, orales et d’actualité ne viseront qu’à amuser la galerie’’, dénonce-t-il.

Ce qui est sûr, c’est que, sauf tremblement de terre, Mahammed Boun Abdallah Dionne va, à partir d’aujourd’hui, ou dans les heures et jours à venir, migrer de la primature vers la présidence où il ne sera plus que secrétaire général. Celui à qui certains taillaient déjà des habits de dauphin va ainsi être réduit à sa plus faible expression. Il perd ainsi tout pouvoir de nomination et, par ricochet, de l’arme politique qui pouvait lui permettre de se tracer un destin présidentiel.

En effet, comme Premier ministre, Boun Dionne avait non seulement son cabinet, mais aussi un large éventail de postes qui lui permettait de caser une certaine clientèle. D’ailleurs, aujourd’hui, c’est le sort de ces dizaines et des dizaines de travailleurs logés à la primature qui pose le plus d’inquiétude.

Sort des collaborateurs de Boun Dionne

Que vont-ils devenir, avec cette suppression pour le moins inattendue ? En tout cas, jusqu’avant le dernier remaniement ministériel. Rappelons que rien que le budget de fonctionnement de la primature était chiffré à plus de 14 milliards de F Cfa. Et inutile de dire que les dépenses de personnel occupaient une bonne partie de cette enveloppe. L’Etat se retrouve ainsi avec un gros boulet entre ses mains. Conseiller spécial du Premier ministre, Moubarack Lo ne s’inquiète pas outre mesure. A l’en croire, ils sont des agents de l’Etat qui, lui, ne disparait pas. ‘’Nous allons donc attendre sereinement les décrets qui vont s’occuper du sort des différents agents qui étaient rattachés à la primature. Pour moi, il n’y a aucun problème, car l’Etat est une continuité. Je ne pense pas qu’il y ait un quelconque risque sur la tête des travailleurs, malgré la suppression du poste’’, tranche-t-il.

Vont-ils suivre leur futur ex-boss à la présidence ou être versés dans les ministères et autres services de l’Etat ? Rien n’est moins sûr. Leur ancien boss, par contre, sait bien ce qui l’attend. Désormais, il n’aura presque plus de mainmise sur ses ex-poulains. ‘’Tel est, en fait, l’enseignement majeur qui ressort du projet de réforme de la Constitution déposé, hier, à l’Assemblée nationale. En tout, c’est 22 dispositions qui sont concernées par le projet de réforme de la Constitution. Il s’agit des articles 40, 43, 49, 50, 51, 52, 53, 55, 56, 57, 59, 76, 80, 81, 82, 83, 84,85, 86, 87, 101 et 103’’, écrivions-nous dans nos précédentes éditions (voir ‘’EnQuête’’ du 9 avril dernier).

Pour Macky Sall, c’est la voie royale pour plus de ‘’célérité, d’efficacité et d’efficience à l’action gouvernementale’’.

MOR AMAR

 

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