Une cinquantaine d’Etats en appelle à la CPI pour mettre fin à l’impunité
Après bientôt deux ans d’impasse diplomatique, une cinquantaine d'Etats appellent le Conseil de sécurité des Nations unies à saisir la Cour pénale internationale sur la Syrie. Ils vont remettre ce lundi 14 janvier une lettre au secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-Moon.
Exécutions sommaires, arrestations arbitraires, tortures, disparitions forcées... Le document, signé par plus de 50 pays dont la France, rappelle l'ampleur des crimes commis depuis bientôt deux ans en Syrie. Ces crimes, pour certains, relèvent sans doute des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité, comme l’indiquait par exemple en août dernier une commission d'enquête des Nations unies. Ce document rappelle aussi que le gouvernement de Bachar el-Assad n'a jamais pris de mesures pour traduire en justice les auteurs de ces actes.
Face à cette situation « désespérée » et à l’impasse diplomatique, des Etats de différentes régions du monde appellent le Conseil de sécurité des Nations unies à déférer immédiatement le dossier syrien à la Cour pénale internationale (CPI). La Suisse, à l’origine de cette initiative, a œuvré pendant 7 mois à rassembler le maximum de signatures. « Des crimes de guerre graves se déroulent en Syrie. Il faut faire de sorte qu'ils ne restent pas impunis », a déclaré le chef de la diplomatie suisse, Didier Burkhalter. « Nous faisons une proposition. C'est maintenant au Conseil de sécurité de décider. Il peut la stopper ou la poursuivre. »
Pas de paix sans justice
Créée en 2002, la CPI devrait juger « sans discrimination » les crimes commis par toutes les parties : ceux des forces du régime de Bachar el-Assad, mais aussi ceux de l'armée libre ou des groupes islamistes. À court terme, une telle action pourrait avoir un effet dissuasif pour les acteurs du conflit, espèrent les signataires de cette lettre. À plus long terme, ils souhaitent aussi préparer l'après-Assad. « Pas de paix sans justice », estiment-ils. « La paix en Syrie ne pourra être effective que si les principaux auteurs des crimes les plus graves – quel que soit leur camp – sont poursuivis en justice, insiste dans un communiqué Souhayr Belhassen, présidente de la Fédération internationale pour les droits de l’Homme (FIDH). L’avenir de la Syrie doit passer par une lutte déterminée contre l’impunité. »
Blocage attendu au Conseil de sécurité
Si la plupart des pays européens se sont ralliés à l'initiative, ni les Etats-Unis - qui ne sont pas membres de la CPI - ni la Russie, ni la Chine, tous trois membres permanents du Conseil de sécurité, n'ont signé ce document. Cette nouvelle démarche risque donc de connaître le même sort que les précédents efforts diplomatiques. Elle devrait se heurter aux divisions de la communauté internationale et à un véto au Conseil de sécurité. En décembre, Moscou avait déjà demandé à la Suisse de renoncer à cette initiative. Les participants espèrent toutefois créer une dynamique autour de cet appel et fédérer, peut-être, de nouveaux ralliements capables de peser sur la diplomatie russe. Sans intervention du Conseil de sécurité, la CPI ne peut être saisie sur la question syrienne.
RFI