Le Saint Siège prépare une période de transition inédite après la démission-choc de Benoît XVI
Le Vatican a entamé mardi une période de transition inédite, au lendemain de l'annonce-choc de la démission du pape Benoît XVI, qui fera ses adieux aux fidèles la veille de son départ prévu le 28 février.
La dernière audience générale, qui se tient habituellement à l'intérieur, aura lieu le 27 février sur la Place Saint-Pierre "parce qu'il y aura beaucoup de monde", a annoncé le porte-parole du pape au cours d'une conférence de presse au Vatican. D'ici là, Benoît XVI maintiendra "tous les engagements programmés" y compris des entretiens cette semaine avec les présidents du Guatemala et de Roumanie, a précisé le porte-parole, le père Federico Lombardi. Après l'annonce de sa décision historique -c'est la deuxième démission volontaire d'un pape en 2.000 ans d'histoire de l'Eglise-, le pape réapparaîtra pour la première fois en public ce mercredi, pour l'audience hebdomadaire, puis pour une messe des Cendres qui, à titre exceptionnel, se déroulera à la Basilique Saint-Pierre. Très attendue aussi jeudi, son intervention devant le clergé de Rome, qui pourrait être une sorte de testament théologique. Suivra ensuite une semaine d'exercices spirituels dans le cadre du Carême, au cours de laquelle il disparaitra de la scène jusqu'à ses adieux.
Benoît XVI redeviendra le cardinal Joseph Ratzinger le 28 février à 19h00 GMT, tout simplement "parce que d'habitude, c'est l'heure à laquelle il finit sa journée normale de travail", a expliqué le porte-parole. S'ouvrira alors la période de "siège vacant", pendant laquelle le "patron" du Vatican sera le camerlingue, l'actuel numéro deux et secrétaire d'Etat du Vatican, Tarcisio Bertone. Un conclave des cardinaux aura lieu dans un délai de 15 à 20 jours pour élire le nouveau chef d'une Eglise forte d'un milliard de fidèles, si possible avant Pâques, le 31 mars. Le père Lombardi a une nouvelle fois balayé les rumeurs sur l'état de santé du pape: il a admis que Benoît XVI portait un pacemaker "depuis un certain temps", dès avant son accession à la papauté en 2005, mais a minimisé une intervention récente révélée mardi par un journal, qui n'a consisté, selon lui, qu'"à changer les batteries (de ce pacemaker), une opération de routine, qui n'a rien à voir avec sa décision". "Le motif est celui qu'a avancé le pape, la perception que ses forces diminuent avec l'avancement de l'âge", a martelé le porte-parole, en répétant qu'"il n'y a pas de maladies spécifiques".
Le père Lombardi a confirmé que Benoît XVI avait pris sa décision au retour d'un voyage au Mexique et à Cuba, en mars 2012. Un cercle très restreint de collaborateurs, dont son secrétaire Georg Gaenswein, en avait été informé, selon les médias italiens. Le cardinal Angelo Sodano a parlé d'un "éclair dans un ciel serein". Comme en écho, un éclair a frappé le soir même la basilique Saint-Pierre, capturé par un photographe de l'AFP. Selon le quotidien La Stampa, le pape, après avoir fait son annonce en latin lundi, s'est retiré et a fondu en larmes. Le directeur du journal la Repubblica, Ezio Mauro, a salué "l'irruption de la modernité" dans une Eglise vieille de 2.000 ans. Autre innovation: "l'Eglise aura deux papes: un régnant et un émérite. Du jamais vu", souligne le vaticaniste Marco Politi. Benoît XVI continuera en effet d'habiter au Vatican, dans un monastère, "où il se dédiera à la prière et à la réflexion sans avoir de charge" au sein de l'Eglise, a répété le père Lombardi.
Selon lui, "il n'y aura aucun problème avec son successeur, aucune interférence à attendre ni même le moindre malaise pour son successeur" car "le pape est une personne d'une discrétion et d'une rigueur extrêmes". Pour la Repubblica, cependant, "son poids intellectuel et spirituel ne pourra pas ne pas influencer" le nouveau pape. En attendant, avant même que la date du conclave pour convoquer les 117 cardinaux électeurs (âgés au maximum de 80 ans) ne soit fixée, des noms circulent déjà avec insistance pour la succession: l'archevêque de Milan Angelo Scola, celui de Manille Luis Antonio Tagle, ses collègues de San Paolo, Claudio Hummes, de New York Timothy Dolan ou le Canadien Mgr Marc Ouellet. Les vaticanistes sont convaincus que le pape a insisté sur son âge avancé (presque 86 ans) pour inviter les cardinaux à choisir un homme relativement jeune.
Selon le prêtre italien Andrea Gallo, Benoît XVI a lancé un autre message en démissionnant: "Vu les scandales, la chute verticale des vocations, les couvents pour femmes et hommes vides, beaucoup de catholiques en Europe et dans le monde qui abandonnent l'Eglise, il a compris qu'il faut affronter ces problèmes avec un mini-concile, un Concile Vatican III". Ce sera la mission du nouveau pape, selon ce curé progressiste qui a cité parmi les "thèmes fondamentaux" à aborder: "la collégialité, la bioéthique, la sexualité qui doit être vécue comme un don de Dieu, le célibat, l'ordination des femmes". Mardi soir s'est tenue une cérémonie d'anniversaire des accords de Latran, en présence du numéro deux du Vatican, Tarcisio Bertone. Mais cette année, l'hôte de cette fête où se presse le gratin politique et religieux de Rome, l'ambassadeur d'Italie près le Saint-Siège, a relevé "une certaine mélancolie".
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