Pourquoi les banques ont “peur’’ de financer
La gestion du risque et le suivi post-financement sont essentiellement les équations qui effraient les banques, dans le cadre de l’octroi de crédits aux petites et moyennes entreprises (PME). C’est ce qu’a relevé hier le directeur général d’Ecobank, Sahid Yallou, lors d’un panel organisé par l’Agence de développement et d’encadrement des PME (Adepme).
Au-delà de l’accompagnement, pour être performantes, l’accès au crédit reste un élément clé pour le développement des petites et moyennes entreprises (PME). Ce qui reste encore un défi à relever face aux contraintes auxquelles elles font face au niveau des banques. ‘’Les PME sont l’espoir de tout ce que nous pouvons espérer comme progrès, aussi bien en termes de création de richesses, de lutte contre le chômage et d’internalisation de la valeur ajoutée. En somme, 99 % de nos entreprises sont des PME, mais il y a seulement 30 % en termes de création de richesses. Ce qui veut dire que nous sommes très loin du potentiel de cette classe d’entreprises. Le diagnostic soulève souvent la problématique de l’accès au financement. La problématique du financement ne doit pas être simplement celle du prêt. Cela peut être aussi celle de la participation, de prise d’ouverture du capital. Mais, aujourd’hui, le système financier est dominé par l’intermédiation, à savoir les banques’’, relève le directeur général d’Ecobank.
Sahid Yallou, qui intervenait lors du panel sur ‘’Le pilotage de la performance et management de la qualité dans les institutions publiques’’, organisé à l’occasion de la cérémonie de remise de certification à l’Agence de développement et d’encadrement des PME, a fait savoir que quand les banques sont interrogées sur la problématique du financement des PME, ce qui ressort tout de suite, c’est le risque. ‘’En général, si les banques ont peur d’aller à fond sur ce segment, c’est parce que les expériences passées n’ont pas laissé de bons souvenirs. Les banques ont encaissé énormément de créances douteuses. Cette question de la qualité du crédit des PME traduit l’asymétrie d’information qu’il y a entre le porteur de projet et le prêteur. Ce qui fait le plus peur au prêteur, c’est le comportement futur du porteur de projet. Lorsque nous faisons face à un chef d’entreprise de mauvaise foi, quelle que soit la pertinence de son projet, cela ne passe toujours pas’’, rapporte le DG d’Ecobank.
Ce sont les deux problématiques majeures, d’après M. Yallou, qui font qu’aujourd’hui, les banques ont cette tendance à se dire qu’elles ont 50 % de chance de voir ce crédit finir en ‘’créance douteuse’’. ‘’Donc, la seule alternative, c’est de demander une garantie immobilière.
Mais cela ne devrait pas être ainsi. Parce que dans l’accompagnement, la garantie ne fait pas le crédit. Ce qui fait le crédit, c’est le business. Il y a souvent de belles idées, la motivation qui accompagne ces promoteurs sans qu’ils puissent trouver la réponse adéquate. C’est à ce moment qu’il est important pour nous de pouvoir compter sur des structures comme l’Adepme. Parce qu’elle répond à une problématique qui est celle de la connaissance du porteur de projet, son accompagnement pour sa mise aux normes, la traduction de ses idées, de son exploitation, de ses cibles, par des chiffres bien organisés’’, renchérit-il.
Le suivi post-décaissement est aussi un challenge que l’Adepme est en train d’adresser, selon le patron d’Ecobank. ‘’C’est important pour nous d’avoir ce type d’accompagnement pour pouvoir alléger les procédures d’octroi de prêt. Si on arrive à régler ces problèmes, je suis sûr que nous allons nous retrouver très prochaine à voir la part de la contribution des PME dans le produit intérieur brut (PIB) atteindre 60 à 70 % et cela, c’est un taux de croissance garantie pour l’Etat du Sénégal’’, estime-t-il.
L’Adepme décroche une double certification
Il convient de souligner qu’en charge d’appui et du suivi des PME, l’Agence de développement et d’encadrement des petites et moyennes entreprises (Adepme) a décroché, la double certification ISO 9001 & ISO 27001 décernée par le Bureau Véritas Sénégal. La cérémonie de remise de ces distinctions a eu lieu hier, à l’occasion de ce panel.
‘’L’Adepme a le mérite d’apporter une preuve constatée par un organisme indépendant, que le système de management est bien conforme aux exigences des normes internationales. La certification ISO 9001, référentiel du système de management de la qualité, est un passeport international qui démontre la capacité de votre entreprise à délivrer un service conforme aux attentes de vos clients enfin de garantir leur insertion. La certification ISO 27001 démontre la capacité de votre entreprise à lutter efficacement contre les risques tels que la perte de données, la cybercriminalité, les atteintes à l’image et les conséquences financières’’, explique le directeur de Véritas Sénégal, Malick Diop.
Ces certificats participeront ‘’sans aucun doute’’, selon M. Diop, à la valorisation des actions de l’Adepme au profil de ses partenaires. Délivrées sur la base de référentiels internationaux ‘’très connus’’ et appliqués dans plus de 100 pays, le patron de Véritas à Dakar estime que ces certificats contribueront au renforcement de l’Adepme. ‘’Maintenant que vous avez passé le gap de la certification, le challenge qui vous attend réside dans son maintien. Ceci n’est pas la fin, mais le début d’une autre ère’’, dit-il.
De son côté, le directeur général de l’Agence de développement et d’encadrement des petites et moyennes entreprises (Adepme) est également conscient du challenge qui attend sa structure après ceux deux distinctions. ‘’Les démarches qualité sont celles d’amélioration continue. A partir du moment où on y est, on ne peut pas s’arrêter. Parce que l’objectif, c’est à chaque fois de s’évaluer, de regarder les écarts, de les corriger, d’ajuster son management et de s’adapter. Le périmètre qui a été certifié est essentiel, puisqu’il consiste à évaluer et à réévaluer les entreprises. C’est l’unité de scoring (NDLR : profilage des entreprises). On a d’autres processus qui sont essentiels dans l’agence. Ceux qui permettent d’accorder ou de rendre disponibles les ressources de subvention pour l’assistance technique. Celles qui concernent les projets et programmes de l’Etat ou confiés par des partenaires’’, témoigne Idrissa Diabira.
Le DG de l’Adepme a ainsi soutenu que relever le défi des PME pour qu’elles soient ‘’performantes’’, c’est aussi pour eux, s’assurer d’avoir un niveau de performance qui leur permet lorsqu’ils les accompagnent, d’être ‘’regardées avec confiance’’ par les partenaires et, en particulier, ceux financiers. ‘’Nous nous sommes donc engagés dans différentes démarches de certification, d’autoévaluation, de comparaison et de normalisation pour être aux meilleurs standards internationaux’’, indique M. Diabira.
MARIAMA DIEME