Publié le 5 Sep 2022 - 21:59
DAKAR NOYÉE DANS DE GRAVES INONDATIONS

 Au bout du chaos !

 

Comme l'ensemble du territoire national, Dakar a enregistré de fortes pluies, depuis le début du mois de septembre. La capitale sénégalaise est sévèrement touchée par les inondations. Dans ce désastre, des sinistrés crient leur désespoir. Ils se posent beaucoup de questions, malgré les assurances du chef de l'État.

 

À Dakar, on ne veut plus entendre le tonnerre gronder. La pluie a créé une véritable psychose au sein de la population. Voilà des jours que la capitale sénégalaise est engluée dans les inondations tant redoutées. Les pluies diluviennes se succèdent, plongeant une grande partie de la population dans le désarroi. La dernière qui s'est abattue hier, sur la région, a, pour ainsi dire, porté le coup de grâce. Une nuit entière durant laquelle il a été hors de question de fermer l'œil, dans certaines parties de la capitale. Notamment à la cité Isra, un quartier de Thiaroye-Azur.

Dans une des maisons envahies par l’eau, les efforts consentis pour l’évacuer ne servent à rien. Ici, le volume ne fait qu'augmenter, du fait de la pluie qui tombe dru. La pompe à beau hoqueter, s’époumoner : rien ! De guerre lasse, les membres de la famille sinistrée lâchent prise et s'en remettent à Dieu. ''On n'a pas d'autre choix ; l'eau est devenue ‘inarrêtable’. Et c'est dans ces conditions que nous allons passer la nuit'', confie tristement l'un d'eux.

Et ce n'est pas la seule famille dans ce cas de figure. Dans plusieurs endroits, c'est la même situation.

Pendant que des familles pataugent dans leurs propres maisons, d'autres s’affairent autour de la fosse septique qui est prise d’assaut par les torrents d’eau. Ils balaient presque tout sur leur passage. De l'autre côté, des chauffeurs de taxi s'efforcent de traverser l'eau. C'est la seule option possible.

Les images les plus inquiétantes sont du côté de la route nationale RN1. Entre Poste de Thiaroye et la zone appelée Cinéma Thiaroye, c'est la mer. La route est complètement engloutie dans les eaux. Une situation invivable. Les riverains immortalisent les images et postent sur les réseaux sociaux ce qu'ils appellent ''catastrophe''. Le message d'inquiétude est le même : ''Regardez ce qu'est devenue la RN1. Ce n'est pas possible !"

Au téléphone, Aliou s'enflamme : "On n'a pas besoin d'expliquer, c'est un phénomène qui ne laisse personne indifférent. Il n'y a pas un seul Sénégalais qui n'est pas au courant de ce qui se passe.'' Le jeune homme, qui dit vouloir rallier son lieu de travail, est contraint de retourner à la maison. ''Il est impossible de passer. L'heure est vraiment grave. Il faut agir. C'est plus qu'une urgence !", crie Aliou avant de raccrocher. Apparemment, c'est le sauve-qui-peut.

Après la pluie, le beau temps, a-t-on l'habitude de dire. Mais, en réalité, cette assertion est loin de trouver son sens dans la capitale sénégalaise. Après le déluge, l’eau stagne.

Actuellement, Dakar a perdu sa quiétude et les interrogations se multiplient. Sur le visage du jeune Babacar Sarr, il y a tout ce qui peut se rapporter à la déception, à la désolation et surtout à l'inquiétude. ''Je doute de l'utilité de nos gouvernants. Aucune expertise, aucune vision, aucun sens de l'anticipation. Pourtant, la situation des inondations n'est pas difficile à régler'', dit-il.

Interrogations

Mais il est à peu près sûr que les techniciens de l'Office national de l'assainissement du Sénégal (Onas) ne sont pas de cet avis. Selon eux, le volume journalier d'eau pompé à Dakar s'élève à 910 600 m3. Et il y a 75 stations de pompage des eaux pluviales. Cela suffit pour constater que la région est très exposée aux inondations. Et à chaque fois, les services de pompage ont du pain sur la planche. La preuve, pour la journée du 3 septembre, le volume d'eau évacué a été de 225 325 m3. Et globalement, depuis le début des opérations, 6 363 716 m3 d'eau ont été évacués.

Alors que des habitants de la cité Bellevue ont récemment déclaré à la presse que leur localité a été inondée jusqu'à un mètre de hauteur, lors de précipitations notées au mois d'août, des questions taraudent les esprits : "Vu sa proximité avec l'océan Atlantique, est-il difficile de trouver des possibilités pour mettre fin aux inondations ? Est-ce que Dakar doit normalement se trouver à chaque fois dans de pareilles situations ?" D'aucuns soutiennent que son ouverture sur la mer est une bonne chose pour régler l'affaire.

Babacar Sarr est l'un des Sénégalais préoccupés par ces questions. ''En tant que citoyen, je pense que j'ai ma liberté de pensée. C'est pourquoi je dis que ce n'est pas normal que Dakar soit aussi inondée, après chaque forte pluie. C'est une région qui n'est pas aussi vaste que ça. De plus, c'est une presqu'île ! Il y a l'océan à côté. Pourquoi les autorités étatiques peinent toujours à trouver les moyens d'évacuation vers la mer ? Pour moi, on doit faire appel à des techniciens. J'ai vraiment l'impression que l'État a délaissé le peuple. Et voilà le résultat''.

Très remonté contre les dirigeants sénégalais, un habitant de Tableau Tivaouane (quartier à côté de Poste Thiaroye) affirme que ces derniers n'ont aucune politique de prise en charge des sinistres. ''Il n'y a aucune explication que le manque de volonté politique et surtout de vision'', fulmine-t-il.

Le second Plan décennal de lutte contre les inondations validé avant la fin du mois

À chaque fois que Dakar est plongée dans les eaux, généralement, le débat tourne autour du plan d'Organisation des secours en cas de catastrophes (Orsec). En tant que principal mécanisme de coordination et de gestion des catastrophes et urgences au Sénégal, ledit plan est loin d'accomplir sa mission. C'est l'avis de beaucoup de Sénégalais. ''C'est une chose dont nous n'avons aucune connaissance. Nous ne sentons pas ses effets pour la plupart'', a simplement répondu un homme trouvé à la station d'essence de Diamaguene. L'air nerveux, il attend désespérément une voiture pour rentrer chez lui. Ce qui n'est pas aussi facile, car beaucoup d’automobilistes ont décidé tout bonnement de garer leurs véhicules.

Toutefois, quoique loin de faire l'unanimité, on apprend, à travers un communiqué relatif à la mise en œuvre de ce plan, que dans le cadre de la lutte contre les inondations, des interventions ont été notées lors des pluies catastrophiques qui plongent Dakar dans la peur. D'après la Brigade nationale des sapeurs-pompiers (BNSP), à ce jour, 208 sites inondés sont recensés. Mais ceux qui sont traités et libérés sont au nombre de 79. Il reste ainsi 129 sites en cours de traitement. Et le communiqué de préciser : "De nombreux sites, du fait de la multiplication des précipitations et/ou de la remontée de la nappe phréatique, ont été libérés plusieurs fois.''

Selon les informations, les inondations ont fait trois morts (voir ailleurs). Actuellement à La Mecque, le président de la République Macky Sall a présenté ses condoléances aux familles éplorées avant d'assurer que le plan Orsec va continuer d'assister les populations.

En outre, le chef de l'État précise que le second Plan décennal de lutte contre les inondations sera validé avant la fin du mois.

MACKY SALL SUR LES INONDATIONS MEURTRIERES

"Trois décès, c'est beaucoup’’

Les pluies des 72 dernières heures ont fait trois morts. Le Chef de l'État, depuis La Mecque, a réagi à la triple tragédie.

C'est depuis La Mecque, où il effectue son petit pèlerinage appelé Oumra, depuis 48 heures, que le chef de l'État s'est adressé aux sinistrés des dernières pluies qui désolent la capitale. Le président Macky Sall a, d'emblée, présenté ses condoléances aux familles éplorées, puisque trois pertes humaines ont été enregistrées.  

Les drames, précise-t-il, ont eu lieu dans le nord du pays, plus précisément dans le Fouta, au village de Sadel. Il y a eu un cas d'électrocution à Cambérène et le dernier décès a eu lieu dans la commune de Yeumbeul, département de Keur Massar. "Trois décès, c'est beaucoup’’, s’est exclamé le chef de l’État. Macky Sall indique que l'eau vient avec une force redoutable et ceci avec naturellement des conséquences sur l'habitat.

‘’Nous vivons des périodes de dérèglements climatiques qui entrainent une non-prédictibilité. Il est très difficile, aujourd'hui, de prévoir ce qui va se passer d'une année à l'autre. A l'intérieur d'une même année, même saison, on voit des changements qui peuvent intervenir. Mais déjà, la météo avait indiqué que les fortes pluies se concentreraient autour de la fin du mois d'août-début septembre. Après, cela va s'estomper’’, a poursuivi le président Sall.

‘’Dans cette séquence temporelle, nous sommes exposés à des risques. C'est pourquoi, depuis le déclenchement du plan Orsec, nous avons maintenu le dispositif qui est sur place, même quand cela ne pleut pas pour apporter les secours de l'État, organiser la riposte. C'est à dire d'assister les populations, évacuer les voies d'eau et d'apporter aussi le soutien aux ménages impactés et touchés. Là aussi, nous exprimons toute notre compassion et condoléances aux familles qui ont perdu des êtres chers. C'est tout le Sénégal qui a perdu", a confié Macky Sall au micro de nos confrères de la RTS.

En outre, il a saisi l'occasion pour encore demander aux ministres de l'Intérieur, de l'Eau et de l'Assainissement et de la Solidarité d'être aux côtés des populations impactées.

CHEIKH THIAM (AVEC LA RTS)

EL HADJI FODÉ SARR

 

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