Publié le 13 Mar 2020 - 20:39
CINQ AUTRES PERSONNES CONTAMINEES A TOUBA

L’émigré a propagé le virus au sein de sa famille

 

Le Sénégal compte désormais 10 cas positifs de la Covid-19, 2 cas guéris et 8 actuellement sous traitement. Le bilan s’alourdit dans la ville de Touba qui a 5 nouveaux cas, avec 71 contacts de haut risque et la possibilité d’avoir de nouveaux cas parmi eux.

 

Un malheur ne vient jamais seul. L’adage se vérifie dans la ville de Touba où 5 nouveaux cas sont venus, hier, s’ajouter à celui de la veille. En quittant l’Italie, dans la nuit du 6 mars avec le vol de la Royal Air Maroc, le ‘’modou-modou’’ sénégalais ignorait qu’il allait mettre toute une ville, voire un pays, en danger. Il a déjà contaminé 5 membres de sa famille. La liste pourrait ne pas être exhaustive. Car, selon le directeur général du Centre des opérations d’urgence sanitaire (Cous), Docteur Abdoulaye Bousso, ils ont listé 71 contacts de haut risque.

‘’Aujourd’hui, ce cas sur lequel nous traitons, nous faisons beaucoup attention. Parce qu’il y a des possibilités que nous ayons de nouveaux cas positifs dans les contacts’’, prévient l’urgentiste. Il souligne que, depuis le 2 mars 2020, le pays a 10 cas positifs et 2 qui sont guéris. ‘’Nous sommes en train de gérer 8 patients qui sont hospitalisés au Service des maladies infectieuses de Fann. Il s’agit de 2 ressortissants français et 6 Sénégalais’’, précise le Dr Bousso.

Pour ce qui concerne l’émigré, Dr Bousso renseigne qu’ils sont en train de rechercher l’ensemble des personnes qui ont été en contact avec lui. Ils ont pu répertorier 71 personnes. Ces individus sont essentiellement des membres de sa famille et quelques personnels de santé qui sont dans le centre de santé où il a été vu. ‘’Nous sommes également en attente de la liste des passagers du vol Royal Air Maroc que la compagnie va nous donner. Parce qu’il a voyagé dans la nuit du 6 et est arrivé à l’aube. C’est-à-dire le 7 (mars). Mais pour nous, ces passagers sont des contacts de bas risque. Parce que, dans l’historique du patient, il a commencé à développer les signes une fois arrivée sur le territoire sénégalais. Ce qui fait que seuls les 71 contacts sont de haut risque’’, explique-t-il. Ce qui est important, poursuit le médecin, c’est qu’ils aient la possibilité de lister tous les contacts. Mais le fait d’avoir un cas positif dans les contacts ne pose pas de problème. Parce que, dit-il, cela signifie qu’ils ont fait le tour des contacts.

71 contacts de haut risque

Le directeur général du Cous a, ensuite, fait le point sur l’ensemble des contacts suivis depuis le début de la maladie. Concernant les 5 testés positifs, leurs équipes sont actuellement à Touba en train de faire le suivi des contacts. ‘’Nous avons 593 personnes que nous suivons et sommes en attente de la liste des passagers de Royal Air Maroc. Nous sommes vraiment à pied d’œuvre pour suivre l’ensemble des contacts et nous demandons une grande vigilance’’.  

S’agissant des 5 premiers cas, il souligne que tous les passagers qui ont voyagé dans le vol du 25 février d’Air Sénégal, également ceux qui ont voyagé dans le vol du 24 février de Turkish Airlines dans lequel avaient voyagé le premier cas français et le 4e cas anglais, sont sortis de leur liste de suivi. ‘’Aujourd’hui, nous avons 448 passagers que nous ne suivons plus. Donc, tous les passagers qui ont été dans ces vols, nous ne les comptons plus’’, fait-il savoir.

Actuellement, le ministère est déjà à 1 041 contacts suivis, depuis le début. C’est-à-dire les 593 qui sont toujours sur la liste de suivi et les 448 qu’on ne suit plus.

Dans l’attente de la liste des passagers de la Royal Air Maroc

Le directeur du Cous lance un appel à toutes les personnes sénégalaises ou étrangères qui ont séjourné dans des pays d’épidémie, les 14 derniers jours, et qui sont présentement sur le territoire national, de prêter attention à leur état de santé.

‘’À chaque fois qu’ils ont un signe particulier, je leur demande d’appeler le service de santé. C’est très important, parce que les premières personnes touchées sont les membres de la famille directe. Les premières personnes à risque sont les enfants, le père et la mère. Ils ont la responsabilité de protéger ces personnes et il est important, dès que ces personnes sentent des signes, qu’elles s’isolent et appellent les services de santé’’, conseille-t-il. Avant de rassurer que toutes les personnes qui sont au Service des maladies infectieuses et tropicales se portent bien. D’autant que, chaque jour, des contrôles se font.

Le porte-parole du Msas, Docteur Aloyse Waly Diouf, qui a donné l’information sur les nouveaux cas, a fait le point sur tous les résultats des examens virologiques de ce jour qui leur ont été notifiés par l’Institut Pasteur de Dakar. Si cinq cas suspects ont été déclarés positifs à la Covid-19, tous des membres de l’entourage familial du patient sénégalais revenu d’Italie, ‘’un cas suspect est revenu négatif. Le Msas renouvelle son appel au calme, à la sérénité et au respect strict des mesures recommandées’’.

CORONAVIRUS A TOUBA

 

Dr Dieng retrace le parcours de l’émigré

 

La maladie du coronavirus est bien présente dans la région de Diourbel. Le ministre de la Santé et de l’Action sociale y est attendu aujourd’hui, pour visiter le dispositif mis en place dans la cité religieuse et dans la région. Un comité régional de gestion des épidémies se réunit dans l’après-midi. En attendant, le médecin-chef de la région médicale de Diourbel a fait le point sur les 6 cas enregistrés à Touba.

 

La pandémie du coronavirus inquiète dans la région de Diourbel où le ministre de la Santé est attendu ce matin. Il pourrait être reçu par le khalife général des mourides, après une visite du dispositif sanitaire mis en place dans la cité religieuse où doivent se tenir d’importants événements religieux dont le magal de Kazou Rajab. Dans l’après-midi, un comité régional de gestion des épidémies, avec comme ordre du jour : situation et échanges sur la gestion de l’épidémie de coronavirus, sera présidé par le gouverneur de région.

Faisant hier le point sur la présence de la pathologie dans la région, le médecin-chef de la région médicale de Diourbel a annoncé 6 cas de coronavirus. ‘’Un émigré résidant en Italie, testé positif, a contaminé 5 autres membres de sa famille’’, déclare docteur Mamadou Dieng qui a retracé le circuit emprunté par l’émigré. Il apprend que le ‘’modou-modou’’ est arrivé à l’aéroport international Blaise Diagne, à bord d’un avion de la Royal Air Maroc. Ensuite, il a rallié Touba à bord d’un véhicule de la compagnie ‘’Allo Taxi’’.

Docteur Dieng confie : ‘’L’avion qui a amené l’émigré a fait escale au Maroc, avant de débarquer à l’aéroport de Diass, durant la nuit du 6 au 7 mars, vers 1 h du matin. Il ne présentait aucun signe, à son arrivée au Sénégal. Il a été contrôlé deux fois au coronavirus, au Maroc et au Sénégal. C’est pourquoi il a pu regagner son domicile sans problème.’’ La blouse blanche ajoute qu’il ‘’est resté chez lui et c’est le 9 mars, durant la journée, vers 18 h, qu’il a ressenti une forte fièvre et a commencé à tousser. Mais ce n’est que le 10, c’est-à-dire le lendemain, qu’il s’est présenté dans une des structures de Touba. Nous nous étions déjà préparés à ce genre de situation. Un prélèvement a été effectué sur le patient suspect qui a été confiné dans une cabine, en attendant que les résultats de l’Institut Pasteur ne nous reviennent attestant qu’il était infecté du coronavirus’’.

Quid des membres de la famille du malade et des personnes qu’il a rencontrés ? Le médecin renseigne que ‘’toutes les mesures nécessaires ont été prises au niveau du domicile de l’émigré, polygame et marié à deux épouses. Nous avons établi la liste de tous les membres de sa famille. Ils sont suivis de très près’’.

Des sources informent que 73 personnes, composées essentiellement de membres de sa famille et d’une partie du personnel du centre de santé de Darou Marnane où le malade a été consulté, ont été listées.

Dans la cité religieuse de Touba, une équipe a inspecté, le même jour, le domicile pour évaluer les risques de transmission. D’ailleurs, dans la région de Diourbel, le personnel de santé rouspète. Sous couvert de l’anonymat, un agent de santé crie sa colère : ‘’Nous sommes exposés. D’ailleurs, des collègues du centre de santé de Darou Marnane ont été contaminés par le ‘modou-modou’. Les moyens tardent à être décentralisés. Ce qui n’est pas juste. C’est une gestion solitaire et cavalière de la tutelle.’’

C’est finalement le mardi dernier que les kits, blousons et autre matériel ont été distribués. Du côté du Service régional de l’hygiène de Diourbel, le chef de la brigade régionale, lors du comité régional de développement consacré au magal de Kazu Rajab, déplorait le manque criard de personnel au niveau de la brigade spéciale de Touba. Le commandant Fallou Sarr laissait entendre : ‘’Touba compte quatre agents dont un gradé. Il faut un plaidoyer pour une augmentation du personnel. Ce qui est largement insuffisant. La difficulté réside dans l’application des normes standards. On n’a pas un système de riposte adapté au coronavirus. On parle de moyens, alors que tous les services sont démunis. Il faut impliquer les organisations de base.’’

S’exprimant lors de cette même rencontre, docteur Ahmadou Kane, médecin au centre hospitalier régional Heinrich Lübke de Diourbel, notait : ‘’C’est un concept générique qui peut semer le doute chez les praticiens. L’hôpital Fann peut servir de référence pour le bilan paraclinique. Mais il faut penser à les prendre en charge au niveau local. Durant l’Ebola, il y avait des équipements constitués de préfabriqués. Ce qui peut beaucoup aider à la prise en charge des patients avant leur transfert sur Dakar.’’ 

BOUCAR ALIOU DIALLO (DIOURBEL)

VIVIANE DIATTA

 

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