Le secteur encore gangrené par des écueils multiformes
Malgré les efforts consentis par l’État et les acteurs, la filière de la noix de cajou continue de souffrir de nombreuses contraintes structurelles qui entravent son essor. Au-delà de la production, de la commercialisation et de l’exportation, la transformation, créatrice de valeur ajoutée et d’emplois, demeure véritablement le parent pauvre de cette filière pourtant porteuse de paix en Casamance, notamment.
Pour l'exercice 2023, ce sont 160 000 t de noix d’anacarde qui ont été exportées vers l’Asie, notamment en Inde, principal pays de destination des noix de cajou. Cette campagne a généré 95 milliards de francs CFA. Cette nette progression des exportations depuis 2017, année à laquelle l'État a décidé d'exporter exclusivement les noix de cajou à partir de la gare maritime de Ziguinchor, est le résultat d'efforts fournis par les acteurs et l'État. Il s'agit notamment du dragage du fleuve Casamance et de son balisage lumineux, des travaux de réhabilitation et d'extension du port de Ziguinchor ainsi que du lancement du Projet d’appui à la compétitivité de l’anacarde sénégalaise (Pacas).
"Un plan visant à soutenir la compétitivité de l’anacarde, à permettre une meilleure maîtrise de la filière, à stimuler la transformation, mais également à nationaliser la commercialisation de l’anacarde sénégalaise, jusqu'ici contrôlée à 90 % par les Indiens et les Vietnamiens", avait souligné Boubacar Konta, président de l'Interprofession cajou du Sénégal (Icas).
Toutefois, malgré ces mesures conjoncturelles, ces chiffres et ces lettres cachent mal les nombreuses difficultés auxquelles la chaîne de valeur est toujours confrontée. Ces contraintes sont d'abord liées à l’organisation de la filière. "L’organisation de la filière sur le plan commercial pose problème. L'État n’a, jusqu'à présent, élaboré aucune politique claire de commercialisation de la noix de cajou", souligne M. Konta. Selon qui la concurrence pose également problème pour les transformateurs locaux, car ils ne disposent pas de moyens suffisants. "Ils n’ont pas accès au financement. Il leur est difficile de s’approvisionner en matière première, car les prix ne sont pas soutenables pour eux", déplore le président de l'Interprofession cajou du Sénégal. Il estime également que la production pose problème, car elle ne bénéficie pas du soutien de l'État, tout comme l'absence d'agrément pour l'exportation.
Le président de l'Icas estime qu'il est nécessaire d'organiser des assises sur la chaîne de valeur de l’anacarde. Il exhorte le nouveau gouvernement à consacrer un conseil interministériel et présidentiel sur cette filière créatrice d'emplois durables dont la contribution à la paix et à la lutte contre la pauvreté en Casamance ne souffre d'aucun doute.
La Journée nationale du cajou du Sénégal : lancement officiel de l'exportation du cajou 2024
Ces propos de M. Konta ont été tenus hier, à Ziguinchor, à l’occasion de l’ouverture de la 2e édition de la Journée nationale du cajou du Sénégal. Cette journée consacre officiellement le lancement de l'exportation du cajou 2024, après celle tenue à Sédhiou en 2023. Organisés par Ica, en partenariat avec l’Alliance du cajou africain (Aca), ces deux jours permettront à l’ensemble des acteurs de la filière d’échanger sur les connaissances liées au secteur, mais également de célébrer leurs pratiques en vue de leur optimisation.
"Elles sont une tribune pour booster la transformation locale de la noix de cajou, mais également pour promouvoir la consommation locale", a expliqué Boubacar Konta. Ils sont près de 262 participants à prendre part à cette rencontre, dont le thème principal est axé sur "Cajou sénégalais et développement durable : renforcer la transformation et favoriser la consommation locale".
Hubert Sagna (Ziguinchor)