''Odieuse à près de 60%'', selon deux économistes
Léonce Ndikumana et James K. Boyce ont fait l'économie de leur livre, ''La Dette odieuse de l'Afrique'', hier devant les étudiant du Bordeaux Management School (Bem) de Dakar. Selon les deux co-auteurs, ''près de 60% de la dette africaine peut être qualifiée d’odieuse''
Afin de camper le débat, Léonce Ndikumana et James K. Boyce ont procédé à la définition des concepts. Selon les deux économistes, la dette odieuse peut se décliner en une tragédie en trois actes pour les populations africaines. Il s'agit du vol et du détournement des fonds empruntés, du coût d’opportunité de cette fuite des capitaux , c'est à dire le renoncement aux gains que l’investissement des fonds détournés aurait pu générer, enfin du remboursement coûteux du service d’une dette virtuelle (en termes de réalisations) pour les populations africaines.
De leur avis, il y a trois conditions à remplir pour qualifier ainsi la dette. D'abord c'est l'absence de consentement car les populations ne sont pas au courant. De même elle se caractérise par l'absence de bénéfice public, du moment où cette dette contractée à des fins publiques est utilisée pour servir des intérêts privés. Également, les conditions précitées sont clairement connues des créanciers. Autrement dit, ''les banquiers complices octroient la dette en sachant que l'argent sera détourné'', révèlent-ils. ''La dette odieuse qualifie la dette contractée au nom de la population par un gouvernement à des fins acceptables (financement du développement, soutien budgétaire…), puis détournée par les hauts fonctionnaires de ce gouvernement à des fins criminelles'', résument les deux professeurs.
Évoquant l'usage de cet argent détourné, ils disent qu'il peut servir au placement dans des comptes privés au sein des centres financiers off-shore, mais aussi au maintien d’un régime dictatorial/militaire et au financement de la répression. Ce qui fait dire aux auteurs que pour chaque dollar que l’étranger prête à l’Afrique, ''environ 60% en ressortent sous forme de fuite de capitaux''. De ce fait, ''près de 60% de la dette africaine peut être qualifiée d’odieuse'', s'alarment-t-ils. C'est pourquoi ils estiment que le monde ''est endetté vis-à-vis de l'Afrique et non le contraire''.
Léonce Ndikumana est professeur d’économie à l’Université du Massachusetts à Amherst, États-Unis. Entre 2006 et 2011, il fut haut-fonctionnaire à la Banque africaine de développement (Bad), où il a eu à occuper, à partir de 2008, le poste de Directeur de la recherche. Il est diplômé de l’Université du Burundi et titulaire d’un doctorat de l’Université Washington à Saint-Louis (Missouri), États-Unis.
Son collègue, James K. Boyce, est professeur d’économie dans la même université où il encadre le programme sur le développement. Il est auteur de plusieurs ouvrages et articles de recherche sur des thèmes se rapportant à l’économie du développement. Il est diplômé de l’Université de Yale et titulaire d’un doctorat de l’Université d’Oxford, Royaume-Uni.
PIERRE BIRAME DIOH
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