Le FPDR désapprouve Macky
Le Front patriotique pour la défense de la République (FDPR), a fait sa ‘’contre-adresse’’ à la nation hier à la permanence Mamadou Lamine Badji du Pds, après celle du Président Macky Sall, le 31 décembre passé. Les opposants ont passé en revue les promesses non tenues, les programmes inachevés et la situation sociale du pays depuis 2012.
‘’ No, he can’t ‘’. L’opposition, réunie au sein du FPDR est décidément bien rodée à la technique de la récupération. Le slogan travesti, inspiré du fameux ‘’Yes we can’’, a servi de sentence aux propos liminaires du coordonnateur Mamadou Diop Decroix. Le responsable de And-Jef s’est attaqué derechef à l’instabilité des programmes, des hommes et des discours. ‘’Trois programmes en trois ans
(Yoonu Yokkute, SNDES, PSE) ; trois premiers ministres (Abdoul Mbaye, Aminata Touré, Mahammad Dionne), et autant de slogans aussi ‘’creux les uns que les autres’’ (gouvernance sobre et vertueuse, accélérer la cadence, ou encore le temps de l’action). Le leader de ce pôle d’opposition se désole de l’inaction du président. Car, à l’en croire, ‘’Macky Sall envisage de gouverner le pays et d’avoir un second mandat exactement comme il l’a fait quand il n’était pas à la tête du pays, c’est-à-dire sur la base de promesses’’. Très en verve, Mamadou Diop Decroix passe en revue la politique économique du pays.
OFNAC, Arcelor Mittal, Pétro-Tim,
Que sont devenues la gestion vertueuse, la transparence et la reddition des comptes ? se demande Mamadou Diop Decroix. Le coordonnateur ne s’est pas privé de brocarder la série de valses-hésitations qui ponctuent le non-passage des ministres devant l’Office National Anticorruption (OFNAC). Cette structure qui se veut l’incarnation de la volonté de transparence du président Macky Sall, ‘’n’a pratiquement existé que sur le papier’’, ironise Decroix. Alors qu’Oumar Sarr, coordonnateur du PDS, s’est appesanti lui sur les faiblesses de cette loi portant déclaration de patrimoine.
‘’Il n’y a aucune sanction réelle prévue pour ceux qui ne font pas les déclarations. La loi a été votée en avril, ils avaient trois mois pour déposer, personne ou presque ne l’a fait. C’est un leurre. Il n’y a aucune sanction pour les fausses déclarations car beaucoup vont en faire. Plus grave, il n’y a aucun contrôle citoyen’’, déclare le maire de Dagana. Ce dernier qui s’est offusqué du nouveau code des marchés qui permet le gré à gré au-delà de 50 milliards, a abordé l’autre sujet polémique : les affaires Pétro-Tim et Arcelor Mittal. ‘’Nous avons écrit au président Macky Sall pour demander qu’il revienne sur ses signatures du décret donnant à son frère une partie du pétrole du Sénégal, et que ses ministres reviennent sur la signature avec Arcelor-Mittal’’, informe M. Sarr.
Demande sociale en manque de financements
‘’L’équation de l’emploi est réglée par une machine économique qui tourne. Pour la nôtre, Macky Sall cherche la clé de démarrage’’. Cette déclaration du coordonnateur du Front, résume la position de l’opposition sur les actes posés par le président Sall. Les chiffres à la baisse du programme Yoonu Yokkute dressés par Decroix illustrent, selon lui, l’incurie gouvernementale à prendre en main la demande sociale. Explications : ‘’De 70 000 emplois/an promis, nous sommes passés à une promesse nouvelle de 30 000/an dans le discours de 2012. En 2013, alors que nous devrions être à 140 000 emplois créés, nous nous sommes retrouvés avec 376 entreprises fermées. Ce qu’évidemment les maigres recrutements dans la fonction publique et l’agence de la sécurité de proximité ne pouvaient combler.’’
Le financement de programmes sociaux comme la Couverture maladie universelle (CMU), n’a pas échappé au laser du FPDR. Alors que la Caisse autonome de protection sociale universelle (Capsu) devait être fonctionnelle avec 120 milliards F CFA par an, seuls ‘’10 milliards ont été budgétisés en 2014, les bourses familiales comprises’’, renseigne Decroix. Aussi, selon ce dernier, le montant initial devrait être financé avec la réduction du train de vie de l’État, ‘’mais nous avons eu droit à une augmentation de ces dépenses’’. C’est pourquoi, poursuit Mamadou Diop Decroix, ‘’l’annonce de 20 milliards de bourses familiales qui vient d’être faite par Macky Sall ne peut émouvoir ceux qui savent’’.
Casamance : ‘’Où sont les progrès notables ?’’
A ce tableau social négatif, le FPDR rajoute une couche avec la situation délétère en région naturelle de Casamance. Les accusations d’anéantissement du MFDC par Macky Sall émanant de Salif Sadio, et l’adresse de noël 2014 du cardinal Théodore Adrien Sarr où ‘’l’objectif de la paix est loin d’être gagné’’ poussent M. Diop Decroix à se demander : ‘’Où sont donc les progrès notables déjà réalisés dans les négociations de paix ?’’ Aussi a-t-il estimé que les Sénégalais devraient exiger la lumière sur le processus, surtout avec la longévité du conflit.
‘’S’il pouvait être concevable il y a 20 ans de laisser les autorités traiter le dossier dans le secret, aujourd’hui, plus de 30 ans après le début des hostilités en Casamance et sans aucune avancée visible, le moment est venu de dire non à l’opacité’’, suggère-t-il. Insistant, il a dénoncé l’élan d’auto-culpabilisation que les autorités tentent de distiller parmi les citoyens avides de transparence. ‘’C’est plutôt l’omerta puisqu’on était parvenu à convaincre les Sénégalais qu’il est antipatriotique de s’intéresser à l’évolution du conflit et de chercher à en savoir plus’’, croit savoir Mamadou Diop Decroix.
Ousmane Laye Diop (stagiaire)