Au ‘’royaume d’enfance’’ de Bassirou Diomaye Faye
La commune de Ndiaganiao a donné au Sénégal son 5e président de la République. Ce village traditionnel sérère du département de Mbour est le fief de Bassirou Diomaye Faye, élu ce dimanche président du Sénégal. Votre journal ‘’EnQuête’’ vous propose une immersion dans les profondeurs du royaume d’enfance du tout nouveau président de la République.
Longtemps resté au statut de communauté rurale, Ndiaganiao est passé commune de plein exercice, grâce à l’Acte 3 de la décentralisation.
Ndiaganiao et sa population
C’est un village situé au sud-est du département de Mbour. Trente-trois kilomètres le séparent du chef-lieu de département Mbour. Sur la route nationale n°1, la commune de Sandiara offre l’axe principal qui mène à Ndiaganiao.
Il s’agit, en effet, d’une route de 14 km qui ne l’est, de nos jours, que de nom. En effet, c’est un véritable parcours du combattant pour accéder au village, avec le chantier de reconstruction de l’axe Sandiara - Ndiaganiao. Sur la route, un paysage pittoresque habité principalement de baobabs accompagne le visiteur pour lui faire passer tout le stress causé par les nids de poule et autres crevasses difficilement franchissables qui jalonnent l’axe.
À l’entrée de la commune, la tradition sérère la plus profonde se charge de vous transmettre les salutations des habitants les plus hospitaliers de la contrée. Principalement sérère, cette population est également composée de Peulhs et de Wolofs vivant dans 38 villages répartis en deux entités. Une qui est proche de l’ancien royaume du Baol et une autre qui est proche de celui du Diobasse.
‘’La partie qu’on appelle Ndiaganiao, en tant que telle, est une sorte de tranche du Baol, et de l’autre côté, la partie qu’on appelle Sandock, vers le nord-est de la commune. D’ailleurs, au regard des dialectes parlés, il y a une petite différence entre les personnes qui viennent de ces deux entités. C’est dans le même sérère kahmè que les gens appellent le sérère Sine et qui n’est pas forcément cela. C’est du sérère kahmè, parce que dans le sérère kahmè, vous avez le Baol, le Sine, le Niominka et le Diobasse. Vous avez aussi beaucoup de sérères de dialectes dans le sérère kahmè. Ndiaganiao est de ce sérère kahmè. Ce n’est pas comme dans les collines de Thiès où il y a le none, le safène, ainsi de suite. Cela est une bonne partie du sérère kahmè’’, révèle Diomaye Faye.
Les habitants de Ndiaganiao, comme tous les Sérères, sont des agropasteurs, car l’agriculture et l’élevage sont combinés et ils le font de manière parfaite. Aujourd’hui, ils sont estimés à plus de 500 000 âmes vivant dans la commune.
Le nom du village collé à la culture du ‘’niébé’’ (haricot)
‘’Diégaa niao’’ (la terre où il y a des haricots) serait l’origine étymologique du nom de la commune qui a donné au Sénégal son président de la République le plus jeune de son histoire, Bassirou Diomaye Faye. Son oncle et parrain raconte que l’histoire du village est collée à cette culture.
En effet, explique-t-il, ‘’la première personne qui s’est établie ici plus ou moins, pas en tant que résident permanent, mais en tant que chasseur qui venait justement de l’autre côté qui fait partie de Ndiaganiao, s’appelait Samba Ndiaye. D’ailleurs, le père du candidat porte son nom. Il y avait ici une grande mare, une rivière que l’on appelait ‘Ndel nianiao’. Et le nom de Ndiaganiao vient du fait que lui, pendant la saison sèche, venait ici chasser et comme la terre était fertile, il faisait aussi de la culture de haricots. Et quand les chasseurs venaient vers le Sine, ils passaient à Ndiaganiao. Les gens disaient ‘nu njaga a niao’ (avez-vous des niébés) ; ‘nga a ndéta ma jag na niao’ (nous allons là où il y a des niébés). Ce n’est pas lui qui l’a fondé. Ce sont d’autres personnes qui sont venues et qui ont nommé le village après, parce qu’ils savaient qu’ils s’établissaient ici’’.
Auparavant, le village n’avait pas de nom, puisque c’étaient des habitations spontanées qui y étaient installées, et ces habitants n’avaient pas l’autorisation de s’installer de la part du Tègne du Baol. ‘’C’est à lui que le Tègne avait donné l’autorisation d’établir une terre pour lui, car au Sénégal, il y a ce qu’on appelle les Lamanes (qui veut dire celui qui est le propriétaire de la terre par le feu). C’est différent du propriétaire par la hache qui pouvaient couper des arbres dans un endroit pour en faire un champ et chaque fois qu’un chef de la famille décède, pour réaffirmer la possession de la terre où l’on a coupé des arbres, on donne une vêle ou un veau. Ce n’était pas comme les systèmes occidentaux où l’on ravage tout, mais c’était beaucoup plus un système féodal, beaucoup plus allégé que pour les Européens’’, raconte M. Faye.
Un village qui a longtemps produit de dignes fils
En ce qui concerne ses fils, l’homonyme du président Bassirou Diomaye Faye indique que dans le peuple de Ndiaganiao, il y en a eu beaucoup qui sont célèbres dans le monde académique, politique ou des affaires. ‘’Ndiaganiao est une zone d’individus qui ont vraiment l’essence des mœurs sérères : le ’thiahane fahé’ (ce n’est pas bon de s’amuser). Les choses qu’ils font, ils les font avec application, à fond. Et l’école qui a été créée là est l’un des établissements qui réalisaient les meilleurs résultats à l’entrée en 6e. Par exemple, durant ma promotion, on avait fait 100 % au CEPE et 98 % à l’entrée en 6e’’, assure Diomaye Faye.
IDRISSA AMINATA NIANG (Mbour)