Le Giaba sous pression
La pandémie de Covid-19 n’a pas encore fini de révéler ses impacts sur le fonctionnement de certaines institutions. Pour le Groupe Inter-gouvernemental d’action contre le blanchiment d’argent en Afrique de l’Ouest (Giaba), c’est un blocage qui est noté dans le cadre des évaluations mutuelles. Ce qui crée des craintes chez le directeur général du Giaba pour la conclusion de ces travaux à temps.
Kimélabalou Abba, Directeur général du Giaba, a évoqué, hier, à Saly Portudal, l’impact de la Covid-19 sur les travaux de son institution pour les Etats membres. Il présidait la cérémonie d’ouverture du 3e Forum régional des parties prenantes du Giaba sur les nouvelles problématiques mondiales de la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme (LBC/FT) et leurs enjeux pour les Etats membres du Giaba.
Dans ce cadre, il a informé du blocage constitué par la présence de la pandémie qui a interrompu certaines activités et les voyages, causant par la même occasion un retard dans le déroulement de leur plan d’action.
Dans ce sens, renseigne-t-il, ‘’la survenance et la persistance de la pandémie de la Covid-19 ont constitué un autre défi majeur avec l’impossibilité des voyages, l’interdiction des réunions d’une grande taille. Ce qui fait craindre au réseau mondial de LBC/FT du Gafi que le Giaba ne sera pas en mesure de conclure à temps le présent cycle d’évaluations mutuelles qui doit impérativement prendre fin en 2024’’.
D’ailleurs, explique le DG, ‘’depuis un certain temps, l’institution ne cesse de tirer la sonnette d’alarme sur sa situation dans le réseau mondial de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme (LBC/FT) du Gafi (Groupe d’action financière) qui lui vaut d’être mis sous un programme d’amélioration de son efficacité en matière d’évaluations mutuelles et de rapport de suivi par le Gafi depuis le début de cette année (février 2021)’’.
Ainsi, il précise : ‘’Depuis septembre 2016, en effet, date du début du second cycle de ses évaluations mutuelles, le Giaba n’a pas cessé d’être confronté à des défis majeurs au nombre desquels : l’insuffisance criarde du personnel technique compétent du Secrétariat du Giaba chargé de coordonner les évaluations mutuelles, avec pour corollaires, le retard dans la finalisation des différentes versions des rapports d’évaluation mutuelle (REM) pour adoption à la plénière ; la qualité rédactionnelle et la cohérence desdits rapports ; l’inexpérience de certains experts évaluateurs issus des Etats membres qui ne maîtrisent pas suffisamment la méthodologie d’évaluation ou ne dédient pas le temps suffisant à l’exercice ; la rédaction des projets de REM par ces experts évaluateurs avec des conclusions sans cesse discutables, entraînant de multiples retards et reports dans la planification et la participation non significative des délégués des Etats membres aux commentaires et aux discussions sur les REM pendant la plénière.’’
Toutefois, il renseigne qu’en dépit de toutes ces contraintes, le Secrétariat du Giaba a déroulé ses programmes et a obtenu des résultats probants. ‘’Ainsi, au titre des évaluations mutuelles, principale mission du Giaba, neuf rapports d’évaluation mutuelle sur les 17 pays membres du Giaba ont été adoptés, de 2017 à ce jour (Ghana, Sénégal, Cabo Verde, Burkina Faso, Mali, Sierra Leone, Bénin, Nigeria et Niger). Trois évaluations mutuelles sont en cours de finalisation. Il s’agit de celles de la Guinée-Bissau (dont le REM sera adopté en février 2022), du Togo et de la Gambie dont les REM seront adoptés au cours de la plénière de mai-juin 2022. Les évaluations de la Côte d’Ivoire et du Liberia auront lieu respectivement en mars et en août 2022. Quant aux autres pays membres, à savoir la Guinée, l’Union des Comores et Sao Tomé et Principe, leurs évaluations mutuelles seront conduites au cours des années 2023-2024’’, fait-il savoir.
En ce qui concerne les études et recherches de typologies, qui constituent la deuxième mission principale du Giaba, plusieurs rapports ont été adoptés. Kimélabalou Abba dresse une liste de parutions : ‘’Flux financiers illicites (FFI) et l’Économie du commerce illégal en Afrique de l’Ouest (février 2018) ; Étude sur le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme résultant de la contrebande de marchandises en Afrique de l'Ouest (2019) ; Blanchiment de capitaux et financement du terrorisme à travers le secteur de l’industrie extractive et minière en Afrique de l’Ouest (octobre 2019) ; Blanchiment de capitaux et financement du terrorisme à travers les prestataires de services de change informel et illégal en Afrique de l’Ouest (août 2020).’’
‘’Par ailleurs, ajoute-t-il, s’agissant des évaluations nationales des risques (ENR), 12 pays ont achevé leurs exercices et adopté des plans d’action basés sur les risques de BC/FT identifiés, tandis que les cinq autres pays restants, dont trois de la CEDEAO, sont à divers niveaux de finalisation de leurs évaluations’’.
Sur ce point, note-t-il, ‘’le Sénégal est l’un des meilleurs élèves du Giaba et dans tous les compartiments, dans tous les aspects de la lutte, y compris la corruption, le Sénégal fait des efforts, même si ce n’est pas une lutte qui est facile. Mais le pays continue à faire des efforts pour éradiquer, sinon atténuer ce phénomène de la corruption’’, a indiqué le juge Abba.
IDRISSA AMINATA NIANG (Mbour)