Publié le 31 Dec 2014 - 10:38
INCOMPREHENSION, REPRESSION, MORT D’HOMME

La douloureuse contrepartie d’un réveil tardif

 

2014 est une année à oublier très vite dans l’histoire de l’enseignement supérieur. La répression aveugle justifiée par l’urgence de la mise en œuvre des réformes a abouti à la mort de l’étudiant Bassirou Faye. La lumière n’est toujours pas faite, mais les esprits semblent s’être calmés. Reste à savoir les conséquences des perturbations sur le plan pédagogique.

 

L’enseignement supérieur a été marqué par de nombreux troubles durant une bonne partie de l’année 2014. La courbe de la violence n’a cessé de monter jusqu’au jour où est survenu le drame : l’assassinat par balle de l’étudiant Bassirou Faye par un policier. En fait, 2014 a démarré avec l’héritage de 2013. C’est-à-dire les premières tentatives difficiles d’applications des directives du conseil présidentiel.

Dès le mois de janvier, le ministre en charge de l’enseignement supérieur s’est frotté aux étudiants. Premier problème : le refus de la signature du protocole d’accord sur les droits d’inscription. Les étudiants avaient estimé que les montants proposés par Mary Teuw Niane étaient trop élevés. Après moult négociations, trois universités ont signé, le vendredi 10 janvier, mais les deux plus grandes, à savoir UCAD et UGB, n’ont pas paraphé.

Le jour de la signature, l’UCAD a été absente du fait de dissensions internes entre les délégués. Les émissaires de l’UGB eux étaient bien présents, mais ils ont refusé de signer. Un comportement que le ministre n’a pu digérer. Il envoie alors une note aux émissaires venus de Saint-Louis. La menace est sans voile. ‘’Si vous ne signez pas le protocole avant ce mercredi (15 janvier) à 18 heures, l’Université va être fermée’’. La mise en garde va très vite porter ses fruits puisque les étudiants de Saint-Louis et ceux de Dakar ont tous capitulé avant l’expiration de l’ultimatum. Cheikh Mbacké Sène de l’UGB dénonce un forcing et qualifie le document de ‘’protocole de la honte’’.

Le ministre a certes arraché une signature, mais pas une adhésion. Les incompréhensions restent entières et l’esprit de défiance plus que jamais de mise. Car, à côté des frais d’inscription, il y a le ‘’Master pour tous’’ mais surtout les nouveaux critères d’obtention et de perte de la bourse fortement rejetés par les étudiants. Misant sur une application immédiate des nouveaux critères, le ministre a voulu purger des états de la direction des bourses tous ceux qui n’entrent pas dans la nouvelle grille, en premier ceux qui ont 30 ans. Cette opération va durer plusieurs mois.

Ce qui a privé des étudiants d’un revenu précieux pendant 10 mois. La réponse du gouvernement face aux différentes revendications a été de ‘’militariser’’ le campus. Les forces de l’ordre l’ont partagé tout ce temps-là avec les étudiants. Certains ironisaient même en disant que les bourses des étudiants ont été allouées aux policiers. Le Syndicat autonome de l’enseignement supérieur lui n’en rit pas. Il dénonce avec la dernière énergie ce qu’il qualifie de transformation du campus en caserne.

Les manifestations réprimées se suivent au fils des mois. Les forces de l’ordre semblaient avoir reçu la bénédiction du gouvernement, tellement l’usage de la force était excessif. Et l’irréparable se produisit un certain 14 août. Aux environs de 15 heures, un policier a descendu un étudiant en première année à la faculté des Sciences et des techniques. Son nom : Bassirou Faye. Très vite, son camarade de chambre du nom de Sette Diagne s’impose comme témoin principal pour avoir déclaré dans les médias qu’il est capable d’identifier le policier auteur du coup fatal.

Mais en attendant le coupable direct, deux autres, indirects, sont identifiés : Mary Teuw Niane, ministre de l’Enseignement supérieur et son collègue de l’Intérieur Abdoulaye Daouda Diallo. Ils sont considérés comme les artisans de la répression aveugle ayant abouti à mort d’homme. Etudiants, société civile et surtout enseignants réclament leur démission. Le SAES en avait fait d’ailleurs une condition non négociable pour la reprise des cours. Une exigence que les camarades de Seydi Aboubacar Ndiaye ont  sans doute rangée au placard au fil des mois.

La thèse de l’infiltration policière

Se trouvant à l’étranger au moment du drame, le président de la République a fait une communication depuis le salon d’honneur de l’aéroport. Mais c’est pour dénoncer des forces tapies dans l’ombre, accusant de passage l’opposition de manipuler les étudiants. Macky Sall a promis de faire toute la lumière sur cette affaire, avec sanction des coupables et commanditaires, s’il y en a. Très vite, une enquête est ouverte. Le 15 octobre, le procureur de la République Serigne Bassirou Guèye présente à la nation un présumé coupable répondant au nom de Tombong Oualy. ‘’Nous avons suffisamment d’indices qui nous permettent de dire que nous tenons le bon suspect’’, déclare-t-il en conférence de presse.

Le policier est présenté par les autorités, particulièrement le ministre de la justice Me Sidiki Ka, comme un intrus du jour. C’est donc la thèse de l’infiltration policière, mais une infiltration bien particulière puisqu’étant l’œuvre d’un membre de la maison. La réaction de la famille du défunt ne s’est pas fait attendre. Ibrahima Sombel Faye, porte-parole de la famille et grand frère du disparu, déclare que l’agent identifié par Sette Diagne n’est pas Tombong Oualy. La confusion s’installe. Depuis lors, Tombong Oualy est dans sa cellule en garde à vue. L’enquête, elle, semble piétiner. La vérité tarde à se manifester.

Abdoulaye Daouda Diallo a retiré ses bataillons depuis le drame. Quant au ministre Mary Teuw Niane, il semble avoir mis la pédale douce. Mieux, il a même, lors d’un atelier d’évaluation des décisions issues du conseil présidentiel sur l’enseignement supérieur, reconnu son erreur d’avoir voulu appliquer sa politique sans concertation. Quant aux perturbations qui en ont découlé, elles sont la cause de la session unique à l’UCAD. La publication des résultats des examens attendue au mois de février permettra de déterminer leurs conséquences sur le plan pédagogique. 

BABACAR WILLANE

 

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