Publié le 11 Nov 2024 - 17:31

La diaspora au cœur des enjeux politiques

 

La campagne électorale pour les Législatives au Sénégal bat son plein et la diaspora sénégalaise, répartie dans le monde entier, ne reste pas en marge de cette effervescence politique. Avec la création de quinze sièges parlementaires réservés aux Sénégalais de l’étranger, l’engagement des communautés sénégalaises dans les pays comme l’Italie, les États-Unis, la Belgique, l’Espagne, la France et le Maroc prend une importance sans précédent. Partout, l’objectif est clair : mobiliser les électeurs de la diaspora pour influencer l’issue des élections.

 

À Bergame, la scène électorale s’anime sous un ciel européen. La salle est comble et l’enthousiasme palpable, avec l’hymne national sénégalais retentissant dans la liesse. Le maire de Keur Massar, Bilal Diatta, a fait le déplacement pour soutenir la campagne de Pastef, à des milliers de kilomètres de son pays. Les partisans, en majorité des jeunes et des familles, scandent les noms de Pastef et de son leader charismatique Ousmane Sonko. Pour Sadibou Diakhaté, un militant de Turin, la ferveur est sans équivoque. "Il y a des dizaines de manifestations de ce genre depuis le début de la campagne en Italie", explique-t-il, ajoutant que Pastef est "le seul parti capable de mobiliser un grand nombre de militants".

De l’autre côté de l’Atlantique, l’ambiance est plus modérée. À Cincinnati, les Sénégalais se réunissent dans un espace communautaire appelé Store Market Darou Salam pour mener leurs activités de campagne. Aïcha Diallo, investie par Pastef pour les États-Unis et le Canada, a fait une visite remarquée. "La campagne est plus active dans les grandes villes comme New York et Atlanta, mais ici, c’est plus discret", confie Pape Moussa Sow, un habitant de Cincinnati. Il déplore un certain manque d'enthousiasme, mais note que les actions de Pastef restent les plus visibles, par rapport aux autres coalitions.

La Belgique,  un terrain de débats passionnés

À Bruxelles, au cœur du quartier de Matonge, la communauté sénégalaise se réunit pour des meetings électoraux souvent animés. Mamadou Diop, président de l’association Senebel et membre de Pastef, décrit l’atmosphère : "Il y a parfois des frictions entre militants, mais cela fait partie du jeu démocratique." Ici, les actions de campagne incluent le porte-à-porte et des interventions lors d'événements religieux, toujours accompagnées d’une présence significative sur les réseaux sociaux. Malgré quelques tensions, l’engagement reste fort.

En Espagne, Moustapha Guèye, qui vit à Lérida depuis 2006, évoque une campagne électorale qui rappelle celle des présidentielles, même si l’engouement est moindre. "Les militants organisent des marches les week-ends, mais les foules ne dépassent pas quelques centaines de personnes", explique-t-il. Cependant, il admet que la dynamique de Pastef reste plus vigoureuse que celle des autres coalitions, bien que les contributions financières aient diminué par rapport aux précédentes campagnes présidentielles. "Les cotisations sont en baisse, mais la ferveur reste palpable", précise-t-il.

La France, foyer de réunions intenses

En France, des réunions se tiennent régulièrement, notamment à Paris et à Lyon. Wande Tounkara, résidant en région parisienne, mentionne que les manifestations se déroulent principalement dans des salles. "Il y a quelques actions menées par les coalitions comme Jàmm ak Njaarin et Takku Wallu, mais elles n’ont pas la même ampleur que celles de Pastef", rapporte-t-il. Les militants parcourent les quartiers pour sensibiliser les Sénégalais aux enjeux des Législatives, souvent par le biais de réunions de proximité.

Le Maroc, une campagne discrète, mais engagée

Au Maroc, la campagne se concentre principalement à Casablanca, selon Abdou Welle. "Il n’y a quasiment pas d’activités dans d’autres régions comme Marrakech ou Fès", observe-t-il. Ici, les militants privilégient les réseaux sociaux pour mobiliser, faute de pouvoir organiser des événements de grande envergure. "La campagne est surtout virtuelle", ajoute-t-il, soulignant le manque de dynamisme comparé aux manifestations observées au Sénégal.

Dans le cadre de ces élections législatives, 112 sièges seront pourvus, dont 90 élus dans les départements sénégalais et 15 pour la diaspora. Ce découpage électoral depuis 2017 accorde une place stratégique à la communauté sénégalaise de l’étranger. Chaque zone électorale, de l’Afrique du Nord à l’Europe de l’Ouest, désignera ses représentants selon un scrutin majoritaire. Ce système favorise les listes qui obtiendront le plus de suffrages, un enjeu crucial pour des coalitions comme Pastef, qui mise sur sa mobilisation internationale.

À l’époque, le ministre de l’Intérieur, Abdoulaye Daouda Diallo, rappelait l’importance économique de la diaspora, qui injectait plus de 900 milliards de francs CFA (environ 1,38 milliard d’euros) dans l’économie sénégalaise, chaque année. Cela représente près du tiers du budget national. Ces quinze sièges pour la diaspora répondaient d’après lui, à une demande de reconnaissance accrue de la contribution des Sénégalais de l’étranger.

Toutefois, la Direction des Sénégalais de l’extérieur notait qu’il n’existait pas de recensement officiel des expatriés. "Les projections estiment leur nombre entre 2,5 et 3 millions", selon des sources officielles.

La campagne législative des Sénégalais de la diaspora est un phénomène inédit qui témoigne de l’engagement croissant de cette communauté. Si l’enthousiasme est débordant dans des villes comme Bergame et Bruxelles, la campagne reste plus modeste dans des régions comme le Maroc ou l’intérieur des États-Unis. Pourtant, l’influence de la diaspora pourrait se révéler déterminante pour le résultat final, en particulier pour des partis qui misent sur un engagement mondial.

La diaspora sénégalaise s’organise, débat et s’implique, témoignant d’un attachement profond aux enjeux politiques du pays d’origine. Que ce soit à travers des marches, des réunions, ou une campagne sur les réseaux sociaux, la communauté sénégalaise dans le monde entier joue un rôle clé dans ces élections législatives. Reste à savoir si cette mobilisation se traduira par un impact électoral significatif et si la voix de la diaspora résonnera avec force à l’Assemblée nationale.

Amadou Camara Gueye

Section: 
PACTE DE STABILITÉ ÉCONOMIQUE : La FGTS exige des modalités d'accord-parties de règlement du passif
GESTION DU REGIME DE PASTEF : Le Monjer en rajoute une couche
PORTRAITS CROISÉS: THIERNO ALASSANE SALL ET MIMI TOURÉ : Un amour-haine sur fond de vieilles rivalités
Lancement officiel du Mouvement des jeunes journalistes gabonais du Sénégal : Pour la promotion et la valorisation des métiers médiatiques
HOMMAGE À SAM NUJOMA, PÈRE FONDATEUR DE LA RÉPUBLIQUE NAMIBIENNE : L’appel du général Birame Diop à maintenir vive la flamme du panafricanisme
MACKY SALL, FARBA NGOM ET L'APR : Un silence coupable face aux accusations ?
L’APR sur l’affaire Farba
COUR DES COMPTES, SITUATION ÉCONOMIQUE DU PAYS… : La  coalition Sopi Sénégal sort du bois
THIÈS : RÉUNION CRD DE PARTAGE SUR LA RÉFORME DU CONSEIL NATIONAL DE LA JEUNESSE DU SÉNÉGAL (CNJS) : Vers un Conseil consultatif plus inclusif et dynamique
RAPPORT ACCABLANT DE LA COUR DES COMPTES : Macky Sall contre-attaque et dénonce une cabale politique
Loi d'amnistie
SAINT-LOUIS : MODERNISATION DE L'ADMINISTRATION : La zone Nord livre ses recommandations et attentes
AMADOU HOTT ET ME AUGUSTIN SENGHOR : Le Sénégal peut-il enfin briser la malédiction des candidatures internationales ?
SAINT-LOUIS : GRÈVES RÉPÉTITIVES DU SAES : Les étudiants de l’UGB craignent pour le respect du quantum horaire
ME MOUSSA BOCAR THIAM : ‘’Nous n’accepterons pas que Farba soit l’agneau du sacrifice’’
FACE À LA PRESSE HIER : TAS charge le Gouvernement
AVEC PLUS DE 4 000 PERSONNES AYANT UNE DÉFICIENCE MENTALE : Le plaidoyer de  Special Olympics Sénégal
DÉPARTEMENT DE MATAM : Le Pastef se structure
DIALOGUE DES ÉLUS : Des échanges sans heurts
NÉGOCIATIONS ENTRE LE MFDC ET L'ÉTAT DU SÉNÉGAL : Sonko a rendu visite au président Umaro Sissoco Embaló