Publié le 18 Feb 2014 - 13:16
LIMITATION D'ÂGE, INTERDICTION DU CUMUL DE FONCTIONS DE PRÉSIDENT ET DE CHEF DE PARTI

Pommes de la discorde entre le parti présidentiel, ses alliés et le Pds

 

Les préconisations du rapport Mbow et de l'avant-projet de constitution ne suivent pas forcément les lignes de fracture entre pouvoir et opposition. Elles pourraient également déstabiliser la coalition présidentielle sur plusieurs points. 

 

Le rapport de la Commission nationale de réforme des institutions (CNRI) déposé la semaine passée par l'équipe du Pr Amadou Makhtar Mbow sur la table du président de la République est diversement apprécié au sein de la classe politique sénégalaise. Du parti présidentiel à ses alliés, en passant par l'opposition, chacun y va de sa propre analyse. 

«Destin collectif»

L'alliance pour la République, elle, s'est déjà fait une religion : le coup du chef de l'Etat estampillé non-chef de parti ne passera pas. Moustapha Diakhaté, président du groupe parlementaire Benno Bokk Yaakaar, l'a re-confirmé à EnQuête hier, même si c'est Macky Sall qui décidera en dernier lieu. Mais le Parti de l'indépendance et du travail (PIT) met déjà la pression sur son allié. «Quand on a en charge le destin collectif, on doit se décharger de tout ce qui est obligation relativement privée», affirme Samba Sy, son porte-parole. 

Adversaire du pouvoir, le Parti démocratique sénégalais (PDS) a comme du pain béni sur la question. «Ramer à contre-courant de ce projet est en porte-à-faux avec les orientations que le candidat Macky Sall avait données dans sa chevauchée vers le Palais de la République qu'il considérait comme la permanence du PDS'', rappelle opportunément Babacar Gaye. Pour le porte-parole du Pds, «aucune quête d'un second mandat ne pourrait justifier un tel reniement».

Puis, plus incisif, le président du Conseil régional de Kaffrine largue ses missiles sur le parti présidentiel. «Même si je comprends les responsables de l'Apr qui défendent leur fromage et qui n'ont d'épaisseur politique que leur proximité avec le président, aucun juriste sérieux ne devrait s'impliquer dans une question qui renvoie à l'éthique politique ; à moins qu'ils ne soient des «juristes tailleurs», comme aimait à les qualifier Me Wade».

«Reniement»

Dans la foulée, le porte-parole du Pit soutient que «les recommandations de la Cnri sont des mutations qui commandent une révolution d'ordre mentale». Dans ce sens, «il faut que notre pays se prépare à entrer courageusement dans l'ère des réformes qui sont dans le temps car on ne peut pas au 21e siècle faire comme si nous sommes un peuple d'exception». 

Les deux alliés de Bby, en revanche, émettent sur la même fréquence en ce qui concerne les limites d'âge, 35 ans et 70 ans, pour être ou ne pas être candidat à une élection présidentielle. Moustapha Diakhaté y adhère «entièrement» et Samba Sy explique : «S'il y a un âge précoce pour prétendre aux affaires, il faut forcément une limite.»

Toutefois, leur répond Babacar Gaye, «l'idée de fixer un plancher et un plafond pour l'âge du candidat à l'élection du président de la République constitue une entorse à l'égalité des citoyens en compétition pour l'accès aux charges publiques, et une entrave à la libre expression démocratique du suffrage universel».

Sans doute, «c'est une question qui mérite d'être approfondie», consent-il, car «il ne serait pas mauvais de juguler les risques liés à l'exercice du pouvoir par un homme inexpérimenté ou par une personne ne jouissant plus de toutes ses capacités morales, intellectuelles et physiques». 

ASSANE MBAYE

 

 

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