Publié le 22 Sep 2017 - 10:16
NOTE DE LECTURE : LA REVOLTE DES INFORTUNES D’AMETH GUISSE

Editions : L’Harmattan Sénégal – Septembre  2017

 

Toutes les rencontres que nous faisons dans notre vie sont voulues par Dieu, de la plus anodine à la plus importante dans notre échelle de valeurs. Partir à la rencontre d’Ameth Guisse, c’est se réveiller à la Mort magnifique, rendre grâce aux Femmes dévouées, femmes aimantes, se lier d’amitié au 42, Rue Augustin Moreau. Autant de livres qui à travers les notions d’Amitié, d’Egalite, de Justice, de Plaisir et surtout d’Amour décrivent L’Ethique à la Amath qui trouve toute sa cohérence dans La révolte des infortunés.

Cette œuvre est un manifeste. Cette œuvre est un roman d’amour. Cette œuvre est un hymne à l’amitié.

La révolte des infortunés est une lutte obstinée contre la damnation sociale où la seule caste qui saurait prévaloir et qui mérite d’être décrite comme telle est celle de ceux qui se croient au-dessus des lois et qui piétinent le peuple. Bien sûr toute coïncidence ou ressemblance avec un pays réel n'est ni fortuite ni involontaire. Nous rajouterons que par conséquent toute ressemblance avec des situations réelles ou avec des personnes existantes ou ayant existé ne saurait être que fortuite. Monpayis nous parle et ses évènements resonnent dans notre esprit. Ce pays est à un tournant de son histoire et un homme de son temps a su en capter la quintessence. Une fenêtre d’opportunité s’ouvre pour ce pays notamment sa jeunesse en âge de travailler qui ne demandent qu’à participer à la croissance économique. A l’Etat de saisir cette chance en mettant en place les politiques économique et sociale adaptées pour lui ouvrir grandes les portes.

Dans cette belle œuvre, le corps de la femme devient le langage des langages et associé à celui de l’homme donne un corps à corps d’accords qui donnent le La et dont la clé de Sol,  mène aux cieux en Re majeur. Oui, cette œuvre est également une aventure musicale. De Beethoven à Daara J, la symphonie et le beat du destin ne font plus qu’un tout comme entre Brel et Cabrel il n’y a qu’un Ka réunissant les énergies vitales animant les dieux et les hommes.

Cette dernière œuvre d’Amath est également Amour. La lettre de Flaubert à Louise Colet trouve son écho dans celle de Jean Fara à Saly. En effet, Aimer, c'est avoir une préoccupation exclusive de l'être aimé, ne vivre que par lui, ne voir que lui au monde, être plein de son idée, en avoir le cœur comblé, sentir enfin que votre vie est liée à la vie de l'être aimé. Oui, avec Amath tout comme avec Hugo, l’amour c’est l’absolu, c’est l’infini et la vie n’est pas assez grande pour le contenir.

En lisant La révolte des infortunés, l’expression devient Vois Paris et meurs. Nous pourrions nous promener en pirogue sur la Seine et nous balader en bateau-mouche sur le Sine que le cours de l’Amour nous semblerait toujours intemporel et universel. Les Mamelles symbolisées à Dakar par le phare et le monument, s’éclairent et renaissent 4 500 km plus loin, à Paris, sous la forme de la Tour Eiffel et celle de Montparnasse pour donner place à l’un des plus beaux textes de la littérature amoureuse de ces derniers siècles.

Et comme toujours avec Amath, l’amour n’est jamais très loin de l’amitié tout comme l’amitié n’est jamais très loin de l’amour. Cette fidélité de l’auteur en amitié et en amour se manifeste jusqu’à ses personnages qui ne s’éteignent jamais à travers ses œuvres. Ainsi, Jean Fara n’est autre que le fils de Rabissatou Adelaïde et de Sandiery, héros de son deuxième roman Mort magnifique, grand prix Cheikh Hamidou Kane. Jean  aurait su porter bravement, dignement et sobrement le nom de son grand père Fara Demba.

Par cette foi inébranlable en la liberté et l’amour, Jean est resté Pape dans la perception de ses amis… Son amour, Saly, belle de nuit, belle de jour, belle tout court, est une de ces Femmes dévouées, Femmes aimantes, titre du premier roman d’Ameth Guisse. Cette Saly, fragile comme une fleur de cristal, qui de par sa grandeur d’âme s’opposa à Meïssa Bigué, l’infortuné qu’elle croise dans sa révolte, pour le mettre face à sa conscience passée. Ces personnages toujours aussi poignants permettent à Amath d’illustrer le fragile équilibre de la vie si bien philosophé par le chanteur Souleymane Faye. Il s’aligne sur cette règle Soufi qui dit que « Le destin ne signifie pas que ta vie a été strictement prédéterminée…Le destin n’est pas un livre qui a été écrit une fois pour toutes. C’est une histoire dont la fin n’est pas décidée, qui peut prendre beaucoup de voies différentes ».

A nous autres lecteurs qui demandions les suites des deux premiers romans, il nous en offre subtilement ici, sous une forme apparente pour l'un et sous une forme ésotérique pour l'autre.

A ces deux personnages, Sakhéwar, Max et Imam Daouda complètent ce quintet pour une quinte flush et rappelle si besoin est que la plus belle harmonie ne sort que des contrastes et des différences.

Pour Amath, l’amitié n’a pas d’âge, n’a pas de religion, n’a pas de couleurs. A l’instar d’Aristote, Amath théorise la notion d’amitié comme une sorte de vertu et renforce sa dimension de philanthrope autrement dit d’ami des hommes.

Ainsi, Hugo, Camus, Gide, Jean d’Ormesson, Tolstoï, la Bible, le Coran…ne sont jamais très loin de notre auteur multidimensionnel comme pour dire que nous pouvons étudier Dieu à travers toute chose et toute personne dans l’univers parce que Dieu n’est pas confiné dans une mosquée, une synagogue ou une église…mais dans le cœur d’un amoureux sincère.

De même sa fille Marième Soda qui à chaque œuvre, illustre parfaitement les écrits de son père pour magnifier leur grande complicité….

A l’aurore grelottante en robe rose et verte, se lèvera un peuple jaune doré marqué au fer rouge. « Refaites la Route Royale et méditez ce chemin de croix et de gloire » entre Chants d’Ombre et Marche des Lumières en espérant que les fruits sauront respecter la promesse des fleurs…

Cheikh Oumar DIA

Economiste-Poète

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