Publié le 4 Nov 2012 - 23:45
PROGRAMME DES VISAS DE DIVERSITÉ

Une foire d'escrocs

Image, Goole

 

 

L'inscription au programme des visas de diversité, lancée par le département d'État américain le 02 octobre dernier, prend fin ce 03 novembre. Pendant un mois, des Sénégalais ont pu tenter leur chance «d’entrer dans l’histoire» et les agents recruteurs ont pu se frotter les mains.

 

''Le visa pour les États-Unis est gratuit. Immigrez et obtenez la nationalité américaine''. Une affiche qui a eu à plonger, pendant presque un mois, dans une rêverie, des candidats au voyage. Ils ont fini par être sous l'emprise d'une excitation d'adolescent. «Trop beau pour être vrai», pour ceux qui venaient de découvrir ce programme qui permet à 50 000 Africains d'obtenir la nationalité américaine.

 

Des visages se dilatent de joie. L’œil est fureteur chez certains qui semblent, de prime abord, douter de la véracité d’un tel «cadeau du ciel». Au finish, élèves, étudiants, ouvriers et personnes âgées se jettent à l'eau en déboursant 3 000 francs pour postuler à ce programme à même de concrétiser un rêve qui leur tient à cœur.

 

3000 F, au lieu d'une inscription gratuite !

 

Sous une tente à l’effigie du drapeau américain, les différents «agents recruteurs» ou «consultants de visas», dispersés un peu partout à Dakar, entretiennent, avec des mots accrocheurs, le mythe américain susceptible de se réaliser ''grâce à leurs services''. Les tarifs sont les mêmes d'une «structure» à une autre. Il suffit de débourser 3000 F par personne, 2000 F pour le conjoint et 1000 F pour chaque enfant. Et les quelques minutes d’inscription peuvent s’avérer magiques et bouleverser positivement toute une vie faite de désillusions.

 

Marie Gomis et Rama Diop, des responsables désignées par la structure  copy.com, sont établies sous une tente installée à la place de l'obélisque. Elles jugent que «la caution» fixée est dans les limites du raisonnable. Même si elles reconnaissent que l’inscription à la loterie visa doit, dans les normes, se faire gratuitement.

 

Les précisions du site de l'ambassade des États-Unis

 

D'ailleurs, sur le site de l'ambassade des États-Unis à Dakar, il est précisé qu'il n'y a pas de coûts ou frais pour s’inscrire au programme DV. ''Le département d’État encourage vivement les candidats à remplir le formulaire d’inscription sans l’aide de ''Consultants pour les visas'', ''Agents pour les visas'' ou d'autres personnes qui proposent de soumettre une inscription au nom des candidats'', peut-on y lire.

 

Mais pour les représentantes de copy.com, une structure spécialisée en informatique, c'est grâce à ces services que les candidats peuvent s’assurer qu’ils seront réellement inscrits. ''On leur remet toujours un récépissé avec un mot de passe qui leur permet de consulter leur dossier sur le site officiel. On utilise notre appareil photo et notre imprimante. Le papier aussi n’est pas gratuit. Nous remettons aux personnes inscrites leur numéro de confirmation authentique'', dit-on. Les mêmes mots, les mêmes ''litanies'' sont débités par les agents recruteurs rencontrés dans différentes artères de la capitale sénégalaise. Ils justifient aussi leurs actions par la ''complexité'' de la photo d’identité qui accompagne le formulaire d'inscription. ''Des dossiers sont toujours rejetés si la photo ne respecte pas les dimensions requises''. Tous consentent à dire qu'ils permettent aux Sénégalais de franchir les barrières linguistiques et technologiques qui interviennent lors de l'inscription à ce programme. Une thèse confortée par des candidats qui ont fini par se décourager.

 

Une foire d'escrocs

Si Marie Gomis et ses collègues jugent que leur structure contribue, depuis des années, à rendre visible un programme qui peut paraître élitiste, elles ne manquent pas de pointer du doigt des ''escrocs'' qui ont investi ce secteur ''juteux'' pour s'enrichir illicitement. Au niveau des différents ''centres d'inscription'' visités, ce sont au moins une cinquantaine de personnes qui sont enregistrés par jour. Une aubaine qui ne manque pas de susciter la méfiance de quelques-uns de nos compatriotes. Explications de Rama Diop, une des responsables, ''les ressortissants de la sous-région sont les plus enclins à s'inscrire chez nous. Les Sénégalais sont réticents. Ils pensent que l'on cherche à s'enrichir sur leur dos, alors que nous sommes fiables''.

 

Pour autant, le programme de loterie des visas de diversités a créé des rivalités entre ces agents qui se regardent en chiens de faïence, selon qu'ils soient sous une tente blanche, bleue ou rouge. On n'hésite pas à taxer l'autre de spécialiste de l'arnaque. «Nos concurrents d'en face (copycom) se plaisent à nous dénigrer devant leurs clients, alors que nous sommes plus crédibles qu'eux. Au moins, nous remettons aux inscrits un récépissé automatiquement, alors que leurs clients doivent attendre deux jours pour disposer de ce document. Il est fort probable qu'ils profitent de ce délai pour travestir les données et établir de faux récépissés». Des propos du jeune Ibrahima Mor Sow, responsable des inscriptions au niveau de la société «immigrer autrement» installée également sur la place de l'obélisque, illustrent à bien des égards l'état d'esprit de ces agents.

 

Interrogations sur les motivations réelles

 

Une concurrence déloyale pressentie par des candidats qui s'interrogent sur les réelles motivations de ces agents qui disent converger dans le même sens avec des méthodes d'approche différentes dans les procédures d’inscription pour ce programme. Chacun soupçonne son concurrent de chercher à alimenter de «façon malhonnête» une base de données qui va leur permettre de déplumer plus tard ceux qui seront tombés dans le piège des arnaqueurs qui disposent aussi de sites d'inscription.

 

Magloire Assy, responsable de l'association Osi

 

Et c'est le ressortissant béninois Magloire Assy, responsable de l'association Osi, qui en a le plus pris pour son grade. A cause de sa mobilité et du fait qu'il propose des inscriptions gratuites, il est étiqueté comme le plus grand arnaqueur qui change constamment d'emplacement, à chaque fois que son jeu est découvert. Signalé en premier à l'Obélisque, puis sur l'avenue Blaise Diagne, l'homme s'est finalement installé en face de l'Université Cheikh Anta Diop et enregistre au quotidien une forte affluence. Interpellé, l'homme qui a sillonné plusieurs pays de la sous-région avant de s'établir à Dakar, souligne que des contrevérités sont distillées sur sa personne, par pure jalousie. ''Je ne me rabaisserai pas à leur niveau. Je permets aux étudiants de s'inscrire gratuitement. Je n'y gagne rien du tout et j'ai la conscience tranquille'', indique celui qui se targue d'être le pionner dans ce domaine.

Toujours est-il que la mise en garde du gouvernement américain est très explicite. ''Des intermédiaires peuvent essayer de garder les numéros de confirmation pour demander illégalement de l’argent en échange d’informations relatives à l’inscription et qui auraient dû être directement en votre possession.''

 

Matel BOCOUM

 

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