Publié le 3 Jan 2023 - 20:07
RAPPORT ÉCONOMIQUE FINANCIER 2023

Le gouvernement affiche un optimisme débordant

 

Les députés ont adopté en fin d’année  2022, le budget 2023 arrêté à 6 400 milliards de francs CFA. Un niveau jamais atteint de prévisions budgétaires dont le gouvernement promet d’affecter la majorité (47%) aux actions aux finalités sociales. A côté du projet de loi de finances initiale (LFI) soumis à l’Assemblée nationale, le Rapport économique et financier (REF) publié par la Direction de la prévision des études économiques (DPEE) vient apporter plus de précisions sur les objectifs d’une année projetée comme celle du décollage de l’économie sénégalaise.

 

En 2023, le pétrole et le gaz vont enfin couler dans les pipelines. Et avec eux, les prémices de lendemains meilleurs pour le Sénégal. C’est en tout cas ce qui ressort des prévisions du Rapport économique et financier (REF) 2023 du ministère de l’Economie, du Plan et de la Coopération. Les avantages liés à l’exploitation des hydrocarbures ‘’locaux’’ devraient se ressentir dans tous les secteurs. Malgré ‘’les prévisions peu reluisantes de la conjoncture internationale par le FMI (fonds monétaire international),’’ l’économie nationale ‘’devrait être principalement soutenue au plan interne par la production de pétrole et de gaz ainsi que ses effets induits sur l’économie’’, assure le document. Combinés aux programmes mis en place dans le cadre de la dernière année de mise en œuvre du plan d’action prioritaires ajusté et accéléré (PAP2A) 2019-2023, les autorités projettent de faire passer à l’économie un cap.  

Cette ambition sera naturellement portée par le secteur secondaire. Si le taux de croissance du PIB réel est projeté à 10,1% en 2023 contre une prévision de 4,8% en 2022, le document fait savoir que ‘’cette croissance serait essentiellement tirée par le secondaire (+22,4%) et, dans une moindre mesure, par les secteurs primaire (+4,9%) et tertiaire (+6,7%).’’ Pour se faire une idée, le secondaire n’a connu qu’une croissance de 1,1% en 2022. Selon les économistes, ‘’la branche « pétrole et gaz » afficherait une contribution de 13,3% par rapport à la valeur ajoutée du secteur secondaire’’.

Une progression du secondaire jamais atteinte par le passé

L’environnement international est même projeté favorable avec la baisse attendue des cours du baril de 12,9% en 2023. Les sous-secteurs du raffinage et de la fabrication de matériaux de construction devraient en bénéficier, en sus du redimensionnement de la Société africaine de raffinage (SAR) pour le traitement du pétrole brut de Sangomar pour mieux répondre au besoin du marché en carburant. L’activité de raffinage est projetée en hausse de 11,5% après une contraction de plus de 65% prévue en 2022. Cette reprise devrait également se poursuivre en phase avec la maturité des projets de structuration de la SAR pour une meilleure exploitation du pétrole brut de Sangomar.

Quant à la fabrication des matériaux de construction, l’activité devrait se conforter de 5,3%, à la faveur des baisses attendues sur les cours des matières premières et de l’augmentation de la demande tirée par l’effet de reprise globale de l’économie et de la finalisation de projets structurants du PAP2A, notamment, le BRT, le renforcement du programme Promo-ville et l’avancement des travaux des 100 mille logements, assure le rapport du ministère de l’Economie.

Au-delà des hydrocarbures, les activités extractives devraient bénéficier du développement du hub minier régional du Sénégal. Elles sont globalement projetées en hausse de 158,7 % au total au titre de l’année 2023 contre un repli de 3,1% prévu en 2022. Dans le cadre du hub minier, les autorités espèrent l’amélioration du cadre réglementaire devant faciliter la mise en œuvre de la stratégie de relance du sous-secteur articulée autour de l’accélération, entre autres, de l’exploitation aurifère, du zircon et des phosphates, en sus de la relance du fer de la Falémé dont les négociations sont en cours avec de potentiels partenaires.

Démarrage de l’exploitation du Zircon

Ainsi, annonce le gouvernement, ‘’l’exploitation de l’or se renforcerait à la faveur de l’augmentation des réserves de Sabodala Gold Operation (SGO), de l’entrée en production de Sored Mines et de la mise en œuvre du projet d’encadrement et de promotion de l’exploitation minière artisanale et à petite échelle de l’or. Par ailleurs, l’aboutissement des négociations pour le démarrage effectif de l’exploitation du gisement de zircon de Niafarang d’une capacité de production annuelle de 54 000 tonnes de minéraux lourds renforcerait davantage les activités extractives’’. De même, le développement de la filière phosphate /fertilisant reste aussi un enjeu majeur des Industries chimiques du Sénégal (ICS) pour améliorer l’offre aussi bien sur le marché local avec le développement du PASAD que sur le marché international avec les prévisions de prix qui demeurent favorables.

S’il en avait besoin, la conjoncture internationale défavorable entre la Covid-19 et la guerre en Ukraine a rappelé les dangers d’une économie extravertie. Devant les échecs du programme d’autosuffisance en riz et les difficultés de celui d’autosuffisance en moutons de Tabaski, l’Etat a opté, pour l’année à venir, pour le Programme pour une autosuffisance alimentaire et une souveraineté alimentaire durable (PASAD). Le gouvernement ‘’entrevoie des mesures relatives, notamment, à l’augmentation de la production et de la productivité alimentaire ; la diversification des spéculations et du système de production agricole ; le renforcement des services agricoles et l'amélioration de la gouvernance du secteur agricole’’.

Pour le renforcement de la production des principales spéculations telles que le riz, l’oignon, la pomme de terre, l’arachide, le mil-sorgho et les produits horticoles, les autorités ont décidé d’y ajouter la mise en œuvre du projet d’appui au programme national d’autosuffisance en riz (PNAR 2023) ; du programme national de l’horticulture et du projet de valorisation des eaux pour le développement des chaînes de valeur (PROVALE/CV).

Un nouveau programme d’autosuffisance alimentaire

Selon le gouvernement, l’année 2023 devrait inscrire le Sénégal dans une nouvelle ère de pays producteur de pétrole et gaz. Et au plan macro-budgétaire, la mise en œuvre des projets structurants et des réformes clés, permettra de stimuler davantage l’investissement privé national et étranger, de soutenir la diversification des moteurs de la croissance et de renforcer la résilience de l’économie. Aussi, la mise en œuvre des réformes de troisième génération inscrites dans PREAC III ainsi que l’exécution de la seconde phase du compact MCA-Sénégal ‘’Power to compact’’ seraient d’un apport considérable dans le cadre de la relance de l’économie.

Le résultat devrait être exceptionnel pour le Sénégal. Pour la première fois, ‘’le solde global de la balance des paiements afficherait un excédent de 185,7 milliards en 2023 contre un déficit 88,5 milliards attendu en 2022.’’  En effet, les prévisions tablent, en 2023, sur une atténuation du déficit du compte des transactions courantes ‘’qui s’établirait à 2 195,4 milliards de FCFA (11,5% du PIB) contre 2 649,8 milliards de FCFA en 2022 (15,7% du PIB). Le déficit courant s’améliorerait grâce au solde commercial (+413,3 milliards), à la balance du revenu secondaire (+118,8 milliards), des services (+221,5 milliards) en liaison avec la baisse du poste relatif au fret et assurance.’’

Une balance des paiements enfin positive

L’amélioration du déficit commercial devrait s’expliquer par une hausse des exportations (+264,2 milliards) plus importante que celle des importations (+72,2 milliards). Les importations se renforceraient principalement grâce aux achats de biens intermédiaires (+117,1 milliards), de biens d’équipement (+81,3 milliards) et de produits alimentaires (+57,0 milliards). Par contre, cette orientation des importations serait atténuée par un fort repli des achats à l’étrangers de produits pétroliers (-282,2 milliards) en liaison avec le démarrage de l’exploitation du pétrole et du gaz mais aussi de la détente des cours des matières premières de base.

S’agissant des exportations, la hausse projetée serait imputable aux ventes à l’extérieur de produits arachidiers (+37,0 milliards), de produits pétroliers (+30,1 milliards), du titane et du zircon (+22,4 milliards), d’acide phosphorique (+21,7 milliards) et des produits divers (+181,7 milliards). En revanche, cette augmentation serait freinée par le repli des expéditions d’or (-32,7 milliards) et de produits halieutiques (-19,9 milliards). Le compte du revenu secondaire s’améliorerait en rapport avec les envois de fonds des migrants qui ressortiraient avec une hausse de 6,3% (+109,7 milliards) comparativement à 2022.

Lamine Diouf

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