Publié le 7 Apr 2018 - 02:42
RUPTURES FREQUENTES DE MEDICAMENTS AU SENEGAL

Explications de la Pna, réserves du ministre

 

Les ruptures de médicaments sont récurrentes au Sénégal. Hier, la directrice de la Pharmacie nationale d’approvisionnement a expliqué les raisons, au cours d’une rencontre entre le ministre de la Santé et l’Association des journalistes en santé population et développement. Mais Abdoulaye Diouf Sarr ne semble pas trop convaincu des arguments avancés.

 

La rupture des médicaments a été hier au cœur de la rencontre entre le ministre de la Santé et l’Association des journalistes en santé, population et développement (Ajspd). Interpellée par le ministre Abdoulaye Diouf Sarr, la directrice de la Pharmacie nationale d’approvisionnement (Pna) a soutenu que le Sénégal est un pays où le secteur pharmaceutique est un des plus organisés. Toutefois, a reconnu Docteur Annette Seck Ndiaye, il peut y avoir des contraintes. ‘’Nous avons, d’abord pour le secteur public, des contraintes d’ordre réglementaire. La pharmacie est chargée de l’approvisionnement en médicaments essentiels. Elle les acquiert par appel d’offres à 90% sur le marché international.

Et il y a des procédures réglementaires que doit suivre la commande publique’’, a-t-elle expliqué. A titre d’exemple, il faut en moyenne 265 à 300 jours, c’est-à-dire presque un an, pour préparer un appel d’offres en médicaments. Elle en veut pour preuve l’appel entamé en octobre 2017 et qui, jusqu’à ce mois d’avril, n’a pas encore fait l’objet d’attribution provisoire de médicaments. ‘’C’était un appel d’offres sur 400 produits ; nous avons eu 235 offres. Pour le reste, nous avons des incisures. Il va falloir reprendre la procédure. Nous sommes presque à 6 mois de procédures’’, a soutenu Dr. Ndiaye.

A cette problématique s’ajoutent des contraintes d’ordre technique. Selon la directrice de la Pna, lorsque vous faites un appel d’offres sur le marché international, la procédure se fait pendant un an. C’est seulement à la signature du marché que vous passez la commande. A ce moment-là, dit-elle, vous avez entre 90 et 120 jours pour avoir les médicaments fabriqués et livrés au Sénégal, soit par avion soit par bateau. Et compte tenu du fait que les médicaments ont une durée de vie, il est impossible de tout commander à la fois, il faut donc le faire de manière séquentielle. Or, ajoute-t-elle, entre l’attribution définitive du marché et son exécution, tout peut arriver. ‘’Avec un planning de livraison en pleine exécution, le fournisseur devient défaillant.  Cela veut dire qu’il vous dit que le prix des matières premières a augmenté. Il ne pourra plus vous livrer dans les délais. A ce moment, vous entamez votre stock de sécurité et cela pour 6 mois’’, a souligné Dr. Ndiaye.

Le système d’information, la grande faille

Ce stock de sécurité va pallier les défaillances du fournisseur jusqu’à ce que l’approvisionnement se fasse dans les délais. Seulement, il arrive que le fournisseur soit défaillant plus de six mois ou de manière définitive. Alors qu’il s’agit parfois de contrats d’un an renouvelable qu’une ou deux fois. ‘’Le fournisseur peut dire qu’il ne fabrique plus ces produits. Dans ce cas, il faut résilier le marché, faire un nouvel appel d’offres et octroyer à un nouveau fournisseur le marché et lui demander de refaire ce produit. C’est la raison pour laquelle vous trouvez des produits qui disparaissent pendant 6 mois ou pendant un an parce qu’il faut reprendre la procédure. Et notre statut ne nous permet pas de faire des demandes tous azimuts’’, a-t-elle fait savoir. En plus, ajoute Dr Annette Seck Ndiaye, il est important de savoir que si on achète sur le marché international, il y a un transfert de devises à faire. Il faut donc demander à la banque de votre choix de faire le transfert de devises pour payer à la banque correspondant les montants des commandes. ‘’Rien que ce transfert de devises peut prendre 1 à 2 mois.’’

Ensuite, il y a les procédures administratives. Quand les produits arrivent au Sénégal, ils passent par plusieurs étapes. D’abord, il leur faut l’Autorisation de mise sur le marché (Amm) ; sinon une autorisation d’importation des médicaments délivrés par la Direction de la pharmacie et du médicament (Dpm). Ce n’est qu’à ce moment qu’il y a l’autorisation d’importation. Pour la directrice de la Pna, la solution dans ces cas de figure, c’est de stocker de manière importante, et là aussi, c’est un couteau à double tranchant. Car, même si on prend une garantie sécuritaire de 6 à 12 mois, on court en même temps le risque d’enregistrer des pertes importantes.

En effet, explique-t-elle, les médicaments arrivés au Sénégal doivent avoir 4/5ème de leur durée de vie  maximum.  Cette durée de vie porte au maximum sur 36 mois, en plus de demander une trésorerie importante pour stocker les médicaments. Mais pour Dr Ndiaye, la grande faille dans la chaîne, c’est le système d’information. ‘’Si l’organe qui commande (Pna) ne connaît pas avec exactitude les besoins réels en termes de morbidité mais surtout de consommation du pays, toutes les commandes se fondent sur la base d’un historique de distribution. Dès qu’il y a un  petit dysfonctionnement, on puise sur les stocks. Par conséquent, il faudrait que nous ayons les informations à temps réel des  besoins exprimés. Non pas des besoins historiques, mais des besoins de consommation réels des populations’’, souhaite-t-elle.

Aucune procédure ne justifie une rupture

Mais apparemment, ces explications n’ont pas trop convaincu le ministre de tutelle. Abdoulaye Diouf Sarr estime qu’aucune procédure ne justifie une rupture. ‘’La rupture a été ma préoccupation. J’estime qu’entre la Dpm, la Pna, les établissements publics de santé, les districts et l’ensemble des acteurs, il doit y avoir une coordination telle qu’on doit avoir de manière permanente  des médicaments disponibles. La question de la disponibilité du médicament est une obligation de résultat. De ce point de vue, tout ce qui peut être fait doit l’être pour qu’il n’y ait pas rupture. Quitte à revoir les procédures’’, a-t-il rétorqué. Selon lui, il faut tout faire pour qu’il n’y ait pas de rupture en matière de médicaments. Car il n’y a pas de santé sans bons médicaments disponibles et accessibles financièrement. ‘’Il faut rassurer les populations pour dire que dans les politiques publiques en matière de santé, l’accessibilité du médicament est une préoccupation essentielle du système de santé. C’est pourquoi dans le cadre des maladies transmissibles, un effort extrêmement important est fait dans le paludisme, la tuberculose et d’autres’’, énumère-t-il.

Répression contre les faux médicaments

La problématique des maladies non transmissibles, notamment certaines pathologies chroniques (le diabète, l’hypertension artérielle et autres) a été évoquée. Abdoulaye Diouf Sarr estime que l’Etat a fait un effort à ce niveau pour que les Sénégalais puissent se soigner dans les meilleures conditions financières. ‘’La maîtrise ou la baisse des prix des anticancéreux est consolidée. Le diabète par exemple, au Sénégal, on a le prix le plus faible de l’insuline’’, se félicite-t-il.  Docteur Annette Seck Ndiaye souligne à son tour la modestie des moyens face aux obligations. ‘’Il faut comprendre qu’un antidiabétique oral coûte 500 francs la plaquette. Pour les médicaments essentiels, génériques, de gros efforts sont faits. Rien que le sérum antivenimeux pour les morsures de serpents coûtait 75 000 F dans le privé, il coûte aujourd’hui 15 000. Le sérum antirabique coûtait 25 000 francs la dose, à Pasteur. Aujourd’hui vous avez les 5 doses pour 32 000 francs. De gros efforts ont été faits pour avoir des médicaments de qualité accessibles’’, a-t-elle défendu.

Par ailleurs, le ministre a précisé qu’ils vont combattre le trafic des faux médicaments. ‘’Nous ne faisons pas de discriminations. La dernière saisie qu’on a faite à Touba a fait l’objet de répression très sévère. Les deux concernés sont dans les liens de la détention, la cargaison est actuellement bien sécurisée au niveau du juge d’instruction qui est en train de faire son travail. Après cela, nous devons détruire. Il y a la répression, il y aura d’ailleurs de plus en plus la répression pour éradiquer de manière définitive ce fléau qui préoccupe les populations’’, prévient-il.

ABDOULAYE DIOUF SARR SUR LA TRANSPLANTATION RENALE

‘’Le comité de don sera mis en place dans trois semaines’’

Les malades souffrant d’insuffisance rénale vont bientôt pousser un ouf de soulagement. Après le vote de la loi n°2015-22 du 8 décembre 2015 relative au don, prélèvement et la transplantation d’organes et au greffe de tissus humains,  le décret d’application tarde toujours à être signé.  Mais hier, le ministre de la Santé et de l’Action sociale a annoncé la mise en place du comité de don. ‘’Nous savons aussi que le Sénégal s’achemine de manière résolue vers la transplantation rénale. La loi est déjà votée, le comité du don et de la transplantation va être mis en place dans trois semaines. Nous allons nous organiser pour aller vers la transplantation qui est la solution définitive’’, a annoncé Abdoulaye Diouf Sarr.

Selon le ministre, cette pathologie préoccupe beaucoup les Sénégalais et la liste d’attente en termes de dialyse est très longue. C’est pourquoi des efforts ont été menés ces derniers temps pour ouvrir quelques centres de dialyse. ‘’Thiès est ouvert il y a deux semaines. Dans moins de 10 jours, nous allons ouvrir le centre de dialyse de Roi Baudoin qui est déjà prêt. Celui de Diourbel aussi  sera ouvert, et dans trois semaines, celui de Pikine. Sans oublier les 6  centres qui sont en voie d’ouverture’’, énumère-t-il. Le ministre précise que l’Etat a l’ambition de continuer l’ensemble des gratuités, à savoir la césarienne, les enfants de 0 à 5 ans, entre autres.

 

VIVIANE DIATTA

Section: 
TIVAOUANE Le général Jean-Baptiste Tine en visite d'apaisement aux ICS
À QUELQUES SEMAINES DES EXAMENS DE FIN D'ANNÉE : Le CEM de Diouloulou mis à sac et incendié
POUR VOL D’UNE CHÈVRE : Deux jeunes condamnés à deux mois ferme
RAPPORT SUR L’ÉMIGRATION IRRÉGULIÈRE, ENTRE JANVIER ET MAI 2024 : Les terribles chiffres de l’hécatombe
Inhumation Mademba Sock
PRISE EN CHARGE DE LA DRÉPANOCYTOSE AU SÉNÉGAL : Le plaidoyer de Pre Fatou Samba Ndiaye
AGENCE D’ASSISTANCE A LA SECURITE DE PROXIMITE Oumar Touré acte la réintègration des ASP radiés entre 2021 et 2024
SAINT-LOUIS : MARCHÉS APRÈS TABASKI : Période de  galère des mères de famille
MUTINERIE AU CAMP PÉNAL LIBERTÉ 6 : Une fouille ''irrespectueuse'' de la chambre 8 à l'origine de la rixe
VOL AU PRÉJUDICE D’UN PROCHE : Alioune Badara Guèye dévalise la maison de son oncle
JOURNÉE MONDIALE DU RÉFUGIÉ : Le calvaire des demandeurs d’asile au Sénégal
VOILA LE NOUVEL ÉVEQUE DU DIOCESE DE ZIGUINCHOR : Mgr Jean-Baptiste Valter Manga
SOUS L’EMPRISE DE SON MARABOUT : Moussa Sadio vole 15 millions de francs CFA à son entreprise  
KOLDA – AFFRONTEMENTS À MÉDINA GOUNASS : Les dessous d’une vieille rivalité
RAPPORT MONDIAL 2024 D’INTERPOL SUR LES CYBERMENACES EN AFRIQUE : Le nouveau cancer du continent
NOUVELLE SAISIE DE DROGUE PAR LA DOUANE À KOLDA : 108,7 kg de cocaïne trouvés dans un pneu de secours
ROUND-UP GEOPOLITIQUE : Trois semaines de tensions intercoréennes
REMISE DE 450 TABLES-BANCS À L’IEF DE KOLDA : La mairie offre 450 tables-bancs aux écoles de la commune
VOL DE POULETS : Deux employés de la Sedima écopent d’un mois ferme
SOCIÉTÉ DAKAR DEM DIKK - DÉPART POUR LA TABASKI : Déficit de conducteurs, de bagagistes et rupture de tickets