Le marché du bétail en crise dans les zones centre et nord du pays

À un peu moins d'un mois de la fête de Tabaski, les foirails sont peu approvisionnés en bétail, du fait notamment de la crise au Mali et du phénomène de vol de bétail qui affectent. Dans la zone Kaolack, Kaffrine et Linguère, le constat est presque identique.
La situation est très tendue sur le marché du mouton. D’après Aliou Sow, secrétaire général de l’association d'éleveurs Hoderé Aynabé, il y a de réelles inquiétudes sur l'approvisionnement en moutons du marché, cette année.
Selon M. Sow, il n'y a pas à se leurrer. Le constat sur le terrain donne plutôt l'impression qu'on est encore bien loin de la Tabaski. “À pareille période de l'année dernière, les troupeaux de moutons et de chèvres avaient envahi les quartiers et les grands marchés de vente de bétail”, témoigne-t-il.
Mais qu'est-ce qui explique donc cet approvisionnement timide du marché ? À entendre Aliou Sow, il y aurait plusieurs raisons. L'une d'elles, c'est la dégradation de la situation sécuritaire au Mali qui fait partie des principales sources d'approvisionnement. “D'abord, les bergers maliens n’ont plus suffisamment de bêtes à cause de cette crise qui perdure depuis des années. Aussi, les opérateurs sénégalais qui partaient au Mali pour s'approvisionner ont maintenant peur de s'y rendre. Cela impacte globalement le marché du mouton au Sénégal, même en dehors de cette période de Tabaski" renseigne le SG de cette organisation basée au Saloum. Il cite le foirail de Missirah Wadène qui, à pareille date, recevait des milliers de bêtes.
Pertes d’affluence des troupeaux à Dahra Djoloff, Missirah Wadène…
Cette crise dans les foirails s’étend au-delà de la zone centre. Réputé pour son marché généralement bien ravitaillé en moutons, avec des prix assez accessibles pour le Sénégalais moyen, le nord du pays n'est pas épargné par les tensions. Nous avons pu échanger avec Ali Kobar, secrétaire général de la Fédération nationale pour le développement de l'élevage. Il revient sur la situation dans le Djoloff connu comme un bastion de l'élevage sénégalais. “La situation est si tendue. À Linguère, par exemple, à pareille heure, on pouvait se payer un bon bélier avec 70 000 F CFA. Là, il en faut bien plus. La même situation est vécue à Missirah (frontière Kaffrine-Tambacounda) qui est un autre grand marché", a-t-il justifié.
Il se réjouit toutefois de l'arrivée de quelques vagues en provenance de la Mauritanie.
Le même constat a aussi été fait, selon lui, au niveau du grand marché de Dahra Djoloff, qui est comme une capitale de l'élevage au Sénégal. Ici, la principale raison invoquée pour expliquer la rareté, c'est le phénomène du vol de bétail. “Chaque année, le marché hebdomadaire de Dahra Djoloff débordait de bêtes et d'acheteurs. Les véhicules en provenance de Dakar et d’autres grands centres urbains envahissaient les lieux. Mais là, l'activité tourne au ralenti. Les opérateurs et les acheteurs sont aux abonnés absents”, constate M. Kobar pour le regretter. Une situation qui s'explique essentiellement par le vol de bétail. “Beaucoup d'éleveurs ont peur d'élever une grande quantité de bêtes, par crainte de ce fléau”, souligne le responsable.
Il faut noter que ce marché et celui de Missirah Waden font partie des plus importants, pour ne pas dire les plus importants où allaient se ravitaillaient beaucoup d'opérateurs. Monsieur Kobar plaide pour une prise en main de la situation par les autorités, afin de soustraire le marché sénégalais de la dépendance des autres pays. Mais cela passera par la lutte contre le fléau “dévastateur” du vol de bétail.
Alioune Badara Diallo Kane