Ces écueils qui retardent l’éveil de la filière en Casamance
Inorganisation des producteurs, quasi inexistence d’équipements et de matériels, insuffisance de semences améliorées et adaptées, accès difficile au crédit, ouvrages hydro-agricoles non valorisés et/ou obsolètes …. Ainsi se présente le secteur de la riziculture en Casamance. Une filière qui, si elle est soutenue, peut valoir bien des points au pays notamment dans le cadre de la mise en œuvre du Plan Sénégal Emergent (PSE).
La ‘’vallée de Tenghory’’ dans la Commune du même nom polarise les villages de Tenghory et Djiwa ainsi qu’une partie de la ville de Bignona, le quartier Bassène en l’occurrence. Elle couvre une superficie de 120 hectares de terres cultivables affectées en aval par le sel et soumises à un déficit hydrique en amont.
C’est pour corriger ces disparités qu’une intervention du Projet d’Appui au Développement Rurale en Casamance (PADERCA) a permis, ensemble avec les bénéficiaires, d’établir un schéma d’aménagement hydro agricole de la vallée. Selon Abel Kader Coly, jadis ingénieur en charge des travaux, aujourd’hui coordonnateur du Paderca, la première campagne agricole consécutive à l’aménagement a permis d’obtenir une production agricole de 290,64 tonnes de riz avec un rendement moyen de 2 422 kg/hectare.
Par ailleurs, une action de lutte contre l’ensablement de la vallée a également été entreprise par le PADERCA à travers des actions de lutte anti érosive au niveau du bassin versant de cette vallée. Tout comme dans ‘’la vallée de Tenghory’’ (département de Bignona), nombreux sont les périmètres rizicoles qui, dans la région de Ziguinchor, ont fait l’objet d’un programme d’ancrage, d’aménagement confortatif et/ou complémentaire ainsi que d’aménagement nouveau par les Programmes et/ou Projets installés dans la région. A date, renseigne M. Coly, 14 OOO hectares de vallées aménagées sont disponibles dans les régions de Sédhiou et Ziguinchor. A l’évidence, l’impact sur la production devient réel. Celle-ci, qui était de 1,5 tonne, est passée à 2 voire 2, 5 tonnes. ‘’Les populations peuvent désormais, en certains endroits, se nourrir pendant 8 à 9 mois’’, souligne M. Coly.
Toutefois, la mise en valeur effective des vallées dans la région de Ziguinchor fait face à de nombreuses contraintes. En effet, les techniques et méthodes culturales utilisées dans la riziculture en Casamance n’ont pas évolué depuis la nuit des temps. Pis, la consolidation et la valorisation ainsi que la maintenance des nombreuses vallées et plateaux que compte la région demeurent un casse-tête des Programmes et Projets. Ailleurs, c’est l’insuffisance de semences améliorées et adaptées, l’accès au crédit agricole, l’inexistence d’équipements et matériels agricoles qui sont décriés. Il se trouve également que les ouvrages hydro-agricoles, ceux d’Affigniam et de Guidel notamment, conçus pour booster la production rizicole, n’existent que de nom. Que dire de la recherche-développement qui, véritablement, bat de l’aile….
Le remembrement en question
S’y ajoute la parcellisation en outrance des rizières qui ne permettent pas aux tracteurs et autres engins agricoles de labourer sans contraintes. ‘’Les parcelles telles que conçues ne sont pas adaptées à la mécanisation. Il faut aller dans le sens de leur remembrement. Pour cela, il faut informer, sensibiliser les paysans sur les enjeux et les innovations liées à la mécanisation de l’agriculture’’, estime le Coordonnateur du PADERCA.
‘’ Les mentalités ont changé. Ils (les paysans) vont accepter de remembrer leurs parcelles lorsqu’ils verront l’intérêt. Pour l’heure, ils ne sont pas rassurés. Ils jouent la carte de la prudence. C’est pourquoi ils semblent hostiles à toute autre méthode et technique culturale nouvelle. Cependant, le jour où ils auront accès au matériel agricole moderne, ils le feront’’, soutient pour sa part Ibrahima Badiane, le chef de service départemental du Développement Rural de Ziguinchor. Aux yeux de ce dernier, le remembrement, qui est simplement un redimensionnement des petites parcelles de riz en une grande parcelle d’un seul tenant, permet d’emblaver plus et de produire mieux. Le paysan, de l’avis de M. Badiane, a l’avantage d’utiliser le matériel agricole et du coup, intensifier sa production.
HUBERT SAGNA (CORRESPONDANT, ZIGUINCHOR)