L’indignation des syndicats d’enseignants
La recrudescence des cas de la pandémie du coronavirus ne sera sûrement pas sans effet dans les établissements scolaires. L’Etat n’a pas mis en place un dispositif sanitaire suffisant pour protéger les élèves de la maladie, alors que certaines classes ont des nombres pléthoriques.
Paradoxal ! Depuis une semaine, le gouvernement demande le respect des mesures barrières. Au même moment, dans les établissements scolaires, il n’y a aucun dispositif sanitaire établi. Une situation qui énerve des syndicalistes dont le secrétaire général du Syndicat autonome des enseignants du moyen secondaire (Saems), Saourou Sène. Il est désolé que ce qui a été retenu à Saly, lors d’un séminaire de rentrée, ne soit pas appliqué. Selon le syndicaliste, cette rencontre, qui s’est tenue avant la rentrée avec tous les acteurs, a permis de discuter des stratégies à adopter à l’école pour faire face cette pandémie.
Il a ainsi été retenu de donner aux élèves et aux enseignants des masques en nombre suffisant, mais également de mettre dans les établissements des lavoirs et des gels hydrologiques. Mais rien de tout cela n’a été fait, s’indigne le syndicaliste. Il souligne que, dimanche dernier, en assemblée générale à Kaolack, certains de leurs camarades ont relevé ce manque de matériel sanitaire, alors que la Covid est présente.
‘’Si on ne mesure pas le danger, si on ne prend pas toutes les bonnes mesures qui permettent de réduire ou d’amoindrir le risque en milieu scolaire, ça sera très dommage’’, alerte M. Sène. A son avis, l’Etat doit veiller à ce que tout le matériel nécessaire en termes de lave-mains, de masques soit disponible dans les écoles et qu’on oblige les élèves et les enseignants à les utiliser. ‘’L’usage du masque n’est pas généralisé dans nos écoles. Contrairement à ce qui s’était passé durant la première vague de la pandémie. Tout le monde avait pris peur et le dispositif était en place’’, rappelle-t-il.
Le secrétaire général du Cadre unitaire syndical de l’enseignement moyen secondaire (Cusems), Abdoulaye Ndoye, va plus loin. A son avis, qui parle du respect du protocole sanitaire fait référence aux mesures d’hygiène. ‘’Ce qui veut dire qu’il faut un nettoyage systématique des toilettes, des salles de classe, avoir de l’eau courante et se laver constamment les mains. Surtout les toilettes ; il faut veiller à leur propreté. L’école est un lieu de forte concentration humaine. Il faut donc doter de suffisamment de masques les établissements et mettre à contribution les collectivités locales. Si on ne prend pas les dispositions idoines, on va vers la catastrophe’’, prévient M. Ndoye.
Ainsi, ils lancent un appel à l’endroit aussi bien du gouvernement que des collectivités locales. Parce que, soulignent les syndicalistes, l’éducation est une compétence partagée entre l’Etat et ses collectivités locales. ‘’Nous devons mettre tous nos efforts ensemble, en synergie, pour mettre l’école dans une parabole de sécurité. Aujourd’hui, tout le monde sait que les conditions sont réunies pour que la situation soit très compliquée au niveau de l’école’’, conseillent-ils.
L’autre aspect dénoncé par Saourou Sène est l’effectif exponentiel dans les écoles. Selon lui, cette année, les classes sont bondées de monde. Il y a une insuffisance de tables-bancs et d’enseignants. La conséquence est qu’on va mettre deux classes dans une seule salle, histoire de réduire ce déficit d’enseignants. ‘’On a trois à quatre élèves par table-banc dans certaines localités. Donc, le minimum de distanciation physique dans les classes n’est pas possible. A la reprise du 25 octobre, nous étions avec 551 mille élèves à reprendre. Dans les établissements, on avait un élève par table banc et 20 par classe. Mais pour la reprise, le nombre c’est 4 millions d’élèves. Dans certaines localités, c’est 120 élèves dans une classe’’, précise M. Sène.
‘’On est en période de froid et cela milite en faveur de la propagation du virus’’
Pour lui, la seule option possible, c’est d’obliger les enfants à porter correctement leur masque, d’avoir des lavoirs au niveau des établissements et également mettre un dispositif de personnel ménager pour qu’à chaque fois que les enfants quittent les classes qu’on puisse nettoyer et désinfecter les salles. ‘’Il nous faut cette rigueur durant cette période’’, dit-il.
Il s’y ajoute le fait que les élèves vont à l’école à pied, même si la plupart d’entre eux ont des bus. Si les gens ne respectent pas ces mesures barrières en termes de port du masque et autres, le risque est très grand pour l’école. ‘’Le plus grave est qu’on ne peut pas éclater les nombres, parce que nous sommes en déficit de tables-bancs et d’enseignants. C’est la grande difficulté que nous rencontrons’’, confie M. Sène.
Dans le même sens, Abdoulaye Ndoye suggère à l’Etat de trouver des stratégies pour casser le mode de contamination dans la cour de l’école, pendant les heures de pause. ‘’Les effectifs ont augmenté, beaucoup d’élèves sont admis en classe supérieure. On a eu de bons résultats aux examens. Mais, malheureusement, les capacités d’accueil n’ont pas augmenté. En plus de cette situation, souligne le syndicaliste, on est en période de froid et cela milite en faveur de la propagation du virus. ‘’Les élèves qui quittent l’école rentrent chez eux. S’ils contaminent les parents, c’est un autre problème et la maladie va se répandre très vite, parce que les gens s’enferment’’.
VIVIANE DIATTA