Le FMI annonce une hausse prochaine des taux d’intérêt
Emprunter deviendra ‘’plus cher’’, surtout pour les pays qui empruntent en devises et sur des durées courtes, compte tenu de la hausse des taux d’intérêt. L’alerte a été donnée par le Fonds monétaire international (FMI), dans son dernier rapport sur les perspectives économiques mondiales rendu public avant-hier.
Les finances publiques seront mises à rude épreuve, au cours des prochains mois et années. En effet, dans son dernier rapport sur les perspectives économiques mondiales, le Fonds monétaire international (FMI) rendu public avant-hier, il est relevé que la dette publique mondiale a atteint des niveaux records afin de couvrir les dépenses liées à la pandémie, alors même que les recettes fiscales se sont effondrées.
‘’Compte tenu de la hausse des taux d’intérêt, emprunter deviendra aussi plus cher, surtout pour les pays qui empruntent en devises et sur des durées courtes. Par conséquent, les déficits budgétaires dans la plupart des pays devront diminuer ces prochaines années, même si l’ampleur du rééquilibrage devrait dépendre du rythme de la reprise. En cas d’aggravation de la pandémie, le rééquilibrage pourra être freiné lorsque l’espace budgétaire le permet. Dans les pays où des restrictions de déplacement sont à nouveau imposées, les autorités devraient relancer des programmes comme les dispositifs de secours destinés aux ménages et aux entreprises les plus durement touchés, si besoin est, et renforcer le soutien aux catégories de la population les plus vulnérables’’, lit-on dans le document.
Sachant que cette année donnera lieu à un ‘’resserrement plus généralisé de la politique monétaire’’, les pays devront, selon la directrice générale adjointe du FMI, s’adapter à un contexte de taux d’intérêt plus élevés. ‘’Les pays émergents et les pays en développement qui présentent des niveaux d’emprunts en devises élevés et d’importants besoins de financement extérieur, doivent se préparer à d’éventuelles turbulences sur les marchés financiers, en prolongeant, si possible, les échéances de leur dette et en limitant les déséquilibres entre les monnaies. La flexibilité des régimes de change peut aussi contribuer à l’ajustement macroéconomique nécessaire. Dans certaines circonstances, une intervention sur le marché des changes et des mesures temporaires de gestion des flux de capitaux pourraient s’avérer nécessaires afin de donner suffisamment de marge de manœuvre à la politique monétaire pour se concentrer sur les enjeux nationaux’’, explique Gita Gopinath.
Le FMI indique qu’une politique monétaire ‘’moins accommodante’’ dans les pays avancés se révélera ‘’problématique’’ pour les banques centrales et les autorités des pays émergents et des pays en développement. L’institution de Bretton Woods note que les rendements plus élevés ailleurs stimuleront les flux de capitaux vers l’étranger, ce qui exercera des pressions à la baisse sur les monnaies des pays émergents et des pays en développement, et provoquera une hausse de l’inflation. En l’absence d’un durcissement proportionné, cela augmentera, d’après la même source, le coût pour les emprunteurs en devises, publics comme privés.
Repenser le cadre commun du G20
Ainsi, pour le FMI, une coopération internationale sera aussi ‘’indispensable’’ pour réduire au maximum les tensions durant le prochain cycle de resserrement. Un accès immédiat aux liquidités en monnaie de réserve, souligne le rapport, constitue une ‘’protection importante’’ contre l’accroissement de ces risques à l’échelle mondiale. Il est soutenu dans le document que les accords de prêt du FMI (de précaution ou de décaissement) peuvent être une ‘’solution provisoire très utile’’ pour atténuer l’impact des chocs.
Pour les pays qui ont de gros besoins de financement et une dette non viable, le Fonds monétaire international reconnait que l’allégement des liquidités peut ‘’ne pas être suffisant’’. Dans ces cas, il est recommandé une mise en œuvre rapide du cadre commun du G20 pour les traitements de dette. Ce qui est considéré comme un mécanisme ‘’efficace’’ pour restructurer les dettes en temps utile et de manière méthodique. L’institution monétaire admet aussi que les progrès accomplis dans les premiers cas de pays ont été ‘’trop lents’’.
Donc, elle trouve urgent d’apporter des améliorations pour faire avancer le processus et élargir le périmètre des pays couverts. ‘’Avec la hausse des taux d’intérêt, les pays à faible revenu, dont 60 % présentent un risque élevé de surendettement ou sont déjà en situation de surendettement, éprouveront de plus en plus de difficultés à assurer le service de leur dette. Le cadre commun du G20 doit être repensé afin d’obtenir des résultats plus rapides sur le plan de la restructuration de la dette, et les créanciers du G20 et du secteur privé doivent suspendre les remboursements pendant les négociations de restructuration’’, renchérit la DG adjointe dans son communiqué.
Néanmoins, il est signalé, dans le texte, qu’un resserrement de la politique transfère aussi les coûts dans le pays, sachant que les emprunteurs nationaux ‘’peineront davantage’’ à obtenir des crédits. ‘’Dans l’ensemble, le durcissement des politiques sera probablement adapté dans de nombreux pays émergents et pays en développement pour écarter le danger d’une hausse persistante de l’inflation.
En outre, les pays émergents sont en général plus résilients : ils possèdent des réserves plus abondantes et de meilleurs soldes courants que lors du précédent cycle de resserrement, y compris en 2013, lors de l’accès de volatilité provoqué sur les marchés par l’annonce du retrait des mesures monétaires non-conventionnelles de la Réserve fédérale américaine.
Les risques financiers subsistent toutefois et de nombreux pays ont un endettement public et privé plus élevé.
Par conséquent, le service de la dette pourrait s’alourdir fortement avec le relèvement des taux d’intérêt’’, lit-on dans le rapport.
La flexibilité du taux de change, une alternative pour amortir les chocs
Le FMI précise que les pays qui ont une position budgétaire ‘’plus solide’’ et des cadres d’action ‘’plus transparents’’ seront ‘’mieux placés’’ pour faire face au durcissement des conditions financières mondiales. Plus généralement, l’institution monétaire notifie que les emprunteurs des pays émergents devraient prolonger l’échéance de leurs dettes lorsque cela est possible, tout en empêchant une nouvelle accentuation des déséquilibres entre les monnaies de libellé des actifs et passifs. ‘’La flexibilité du taux de change peut aussi contribuer à amortir les chocs. Cependant, dans les pays où les distorsions de marché ou les facteurs de vulnérabilité des bilans limitent l’accès aux marchés, l’impact du retournement des flux de capitaux, peut mettre en péril la stabilité financière. Dans ces pays, une intervention sur le marché des changes peut s’avérer nécessaire pour atténuer le désordre sur ce dernier. En outre, des mesures temporaires de gestion des flux de capitaux peuvent se justifier, mais ne devraient pas se substituer à l’ajustement de la politique macroéconomique qui s’impose. Plus généralement, les dirigeants devraient renforcer les dispositifs de résolution le cas échéant, afin de faciliter un désendettement et une restructuration ordonnés’’, poursuit notre source.
Toutefois, comme l’espace budgétaire est nettement plus restreint, selon le FMI, un ‘’meilleur ciblage’’ de ces aides sera capital afin de préserver la viabilité des finances publiques. ‘’Les initiatives devraient s’inscrire dans des projets de budget à moyen terme crédibles et viables. L’appui décisif de la communauté internationale aux pays à faible revenu ayant un endettement élevé sera indispensable, afin qu’ils puissent apporter ce soutien budgétaire. En revanche, dans les pays où la croissance est supérieure aux prévisions et la reprise continue à s’installer (par exemple, le Chili, la Colombie, le Pérou) il est possible de mettre fin aux dépenses exceptionnelles de crise et d’accroître les recettes.
À terme, une croissance plus soutenue et des recettes fiscales plus élevées seront nécessaires pour que de nombreux pays évitent le risque de surendettement. Face à ces défis, des réformes structurelles et une amélioration des cadres budgétaires apparaissent d’autant plus essentielles’’, avertit le Fonds monétaire international.
MARIAMA DIEME