Publié le 13 Jun 2023 - 21:23
LIVRE BLANC DU GOUVERNEMENT, FERMETURE DES CONSULATS

L’opposition solde ses comptes avec Aïssata Tall Sall

 

Les débats avant le vote de quatre projets de loi, hier, à l’Assemblée nationale, ont permis aux députés de l’opposition de dire ce qu’ils pensent du livre blanc conçu par l’État sur les événements notés depuis le 1er juin.

 

Hier, les députés de l’opposition n’ont pas raté la ministre des Affaires étrangères et des Sénégalais de l’extérieur. Les députés s’en sont également donné à cœur joie  par rapport au livre blanc écrit par le gouvernement pour expliquer aux représentations diplomatiques les derniers violents événements survenus au Sénégal, suite au verdict du procès opposant Adji Sarr à l’homme politique et leader du Pastef Ousmane Sonko.   

Pour Guy Marius Sagna, l’ouvrage aurait dû être intitulé ‘’Livre d’un tyran’’. ‘’Vous n’avez pas parlé de la séquestration d’Ousmane Sonko ? Vous auriez dû en parler dans ce livre ainsi que ce qu’on lui fait vivre depuis 15 jours. Même les prisonniers ont droit à des visites. J’ai été arrêté six fois par le régime de Macky et pourtant, je recevais des visites’’, leur reproche-t-il.

Mais ce n’est pas tout. ‘’Avez-vous parlé, dans ce livre, de recrutement de nervis par le fils du président de la République ? Des menaces de viol par des femmes qui s’opposent à une troisième candidature ? Avez-vous parlé d’achat d’armes par le palais et le ministre de l’Environnement ? Ces armes qui sont des machettes, des armes à feu utilisées par des nervis ? Macky Sall crée des emplois de nervis. Vous auriez dû parler de la corruption. Des dizaines de corps rejetés par la mer, alors qu’au préalable aucun corps n'était visible. Avez-vous parlé du régime de Macky Sall dont le bilan se résume à tuer, tirer, torturer ?’’, a demandé le parlementaire.

Par ailleurs, des députés ont dénoncé la décision inopportune prise et concernant la fermeture des consulats étrangers. Aujourd’hui, une dizaine de corps attendent d’être rapatriés au Sénégal. 

La ministre des Affaires étrangères et des Sénégalais de l’extérieur a rassuré ses hôtes du jour quant à la prise en charge des rapatriements.  Ainsi, elle a rappelé que chaque année, 500 millions F CFA, inclus dans le budget annuel du ministère et voté à l’Assemblée nationale, sont consacrés au rapatriement des corps de Sénégalais décédés à l’étranger. Ce budget, d’après Aissata Tall Sall, a été bouclé au mois de mars.

Selon elle, ce budget, au début, était destiné à des gens aux revenus modestes. Ce qui n’est plus le cas. 

Pour les députés de la mouvance présidentielle, il faut dénoncer les saccages notés avant d’exiger quoi que ce soit. Aida Sougou est de ceux-là. La ministre des Affaires étrangères et des Sénégalais de l’extérieur est, naturellement, du même avis. ‘’Je suis choquée de voir des députés s’indigner de la fermeture des consulats et non des saccages. C’est des actes de vandalisme qui ont été notés. En prenant cette mesure radicale de fermer les consulats, on a voulu attirer l’attention des Sénégalais sur ce qui s’est réellement passé.  J’ai reçu beaucoup de messages de soutien. On a voulu créer un effet de choc. Cela s’imposait. J’aurais aimé qu’on fasse une motion pour déplorer ce qui s’est passé à Milan où des listes d’électeurs inscrits à la Présidentielle ont été détruites. Ce qu’il faut dire aujourd’hui, c’est qu’on laisse les consulats ; ils n’ont rien à voir avec la politique. Ils ont d’autres missions qui sont très loin de la politique. On ne peut pas ne pas avoir de consulats’’, a dit Mme Sall. Le Sénégal, s’est-elle désolée, est le seul pays dont les manifestants s’en sont pris aux locaux abritant ses consulats étrangers. ‘’Ce que ces gens-là ont fait, nul ne l’a jamais fait’’, a-t-elle tonné.

Des députés, inspirés par l’actualité, ont demandé l'ouverture d’autres consulats pour faciliter aux Sénégalais l’obtention de papiers en cas de besoin. Mais aussi de choisir des administrateurs civils pour diriger les consulats, en lieu et place de politiciens qui transforment les lieux en des permanences de l’APR. 

Des parlementaires se sont demandé, sur un autre registre, pourquoi la compagnie aérienne nationale n’a pas pu convoyer les pèlerins sénégalais à La Mecque. ‘’Air Sénégal n’a pas amené nos pèlerins, car l’Arabie saoudite impose à chaque État de faire transporter la moitié des voyageurs par sa propre compagnie et le reste par d’autres de son pays. Mais le chef de l'État a demandé qu’on négocie pour que l’année prochaine, notre compagnie puisse transporter l’ensemble des pèlerins’’, a expliqué la patronne de la diplomatie sénégalaise.

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ASSEMBLÉE NATIONALE

Quatre projets de loi votés

CHEIKH THIAM

Les députés ont voté, hier, divers projets de loi, dont celui autorisant le président de la République à ratifier la Charte africaine des statistiques adoptée à Addis-Abeba, le 24 février 2009. La ministre des Affaires étrangères et des Sénégalais de l’extérieur a rappelé que les États membres de l'Union africaine, conscients du besoin de renforcement de la coordination des activités statistiques sur le continent et considérant que l'information statistique est nécessaire à la prise de décision des différents acteurs politiques, économiques et sociaux, ont décidé d'élaborer une Charte africaine des statistiques.

La charte, selon Aissata Tall Sall, sert de cadre d'orientation pour le développement de la statistique africaine, notamment par la production, la gestion et la diffusion des données et de l'information statistique aux niveaux régional et continental.

Aïssata Tall Sall a également indiqué que cet instrument contribue à améliorer la qualité et la comparabilité des données statistiques nécessaires au suivi du processus d'intégration économique et sociale de l'Afrique. Ainsi, la ratification de cette charte selon elle permettra au Sénégal de disposer d'un instrument juridique efficace pour réguler l'activité statistique en Afrique. Corrélativement, elle servira de base à l'élaboration d'un Code d'éthique et de déontologie pour le métier de statisticien africain, a ajouté la ministre.

En outre, un texte, n°07/2023, autorisant le président de la République à ratifier la Charte africaine sur la sécurité routière adoptée par les États membres de l'UA, le 31 janvier 2016, à Addis-Abeba. La cheffe de la diplomatie sénégalaise a soutenu que l'adoption de cet instrument juridique, le 31 janvier 2016 à Addis-Abeba, par les États membres de l'Union africaine, répond à un souci d'améliorer la gestion des questions liées à la circulation routière en Afrique et de réduire sensiblement les accidents mortels sur les routes.

Selon elle, l'objectif de cette charte est de servir de cadre stratégique pour l'amélioration de la sécurité routière en Afrique. Elle se veut également un outil de sensibilisation visant, d'une part, à faciliter la création d'un environnement permettant de diminuer considérablement les accidents de la route et, d'autre part, à promouvoir l'harmonisation de la collecte, du traitement et de la diffusion des données sur la sécurité routière, entre autres objectifs.

En outre, elle a précisé que l'article 4 de cet instrument juridique fait obligation aux États membres de créer des agences chefs de file de la sécurité routière, ayant pour rôle de déterminer les grandes orientations en matière de promotion de la sécurité et d'amélioration des conditions d'exploitation du réseau routier, ainsi que de fluidité du trafic routier.

Par ailleurs, d’après elle, la charte prévoit que les États parties doivent élaborer des stratégies de sécurité routière inclusive, coopérative et consultative avec des priorités, des responsabilités claires, ainsi que des objectifs ambitieux réalisables. À cette fin, elles créent un environnement donnant la possibilité au secteur privé, à la société civile, aux organisations non gouvernementales, ainsi qu'aux institutions universitaires et de recherche de prendre part aux activités de sécurité routière. Dans le cadre de la mise en œuvre de cet accord, une conférence des États parties est créée en tant qu'organe délibérant suprême composé des ministres chargés de la Sécurité routière.

Sur ce point, elle a informé que la charte entrera en vigueur trente jours après le dépôt du quinzième instrument de ratification, en précisant qu'à ce jour, dix États ont accompli cette formalité. De même, elle a soutenu qu'en ratifiant cette charte, le Sénégal s'engage à renforcer et à mettre en œuvre, avec plus de rigueur et de suivi, des stratégies efficaces en matière de sécurité routière. Elle lui assurera également l'appui des organisations institutionnelles opérant dans ce domaine.

À cet égard, le consentement, selon elle, du Sénégal à être lié par cet accord permettra de réduire substantiellement l'insécurité routière dont les conséquences sont de réels freins à la croissance économique et au développement.

Entraide judiciaire entre le Sénégal et la Mauritanie

En outre, Aissata Tall Sall a également indiqué que le Sénégal et la Mauritanie ont signé à Nouakchott, le 12 juillet 2021, la convention relative à l'entraide judiciaire en matière civile et commerciale, dans le souci de renforcer les relations d'amitié entre les deux États, tout en reconnaissant l'importance de développer la coopération bilatérale dans le domaine civil et commercial sur la base du respect mutuel, de la souveraineté et de la légalité.

L’Assemblée nationale a voté hier le texte de loi matérialisant cela.

D’ailleurs, a fait savoir Mme Sall, cette convention d'entraide vise, principalement, à protéger les droits de ressortissants de chacune des parties contractantes sur le territoire de l'autre partie, sans discrimination.

En outre, l'exécution des commissions rogatoires s'impose à toutes les parties, selon elle. Elles sont adressées par l'autorité centrale de la partie requérante à l'autorité centrale de la partie requise.

La ministre a précisé qu'en vertu de l'article 10 alinéa 1, chaque partie notifie à l'autre, par voie diplomatique, l'accomplissement des procédures requises par son droit interne pour la mise en œuvre de la présente convention. ‘’Conformément à l'alinéa 2 de l'article précité, la présente convention entre en vigueur le premier jour du deuxième mois suivant la date de réception de la dernière notification de ratification, pour une durée de cinq ans, renouvelable par tacite reconduction, sauf si l'une des deux parties la dénonce, avant la fin de la période quinquennale.

Sur ce même registre de l'entraide judiciaire, le gouvernement de la République du Sénégal et celui des Émirats arabes unis, désireux de renforcer la coopération bilatérale, ont signé à Abu Dhabi, le 14 octobre 2021, la convention relative à l'entraide judiciaire en matière pénale, a expliqué Aissata Tall Sall.

Ainsi, selon elle, cette entraide judiciaire entre les parties concerne les enquêtes, les poursuites pénales, ainsi que la confiscation des produits du crime et les procédures en résultant. Elle peut également être accordée dans le cadre d'infraction en matière de taxes, d'impôts de douane, de change et d'autres questions fiscales, comme le stipule l'article 1er alinéa 3.

Dans la même dynamique, la ministre a annoncé les points sur lesquels coopèrent les deux parties, notamment, le recueil de preuves, de témoignages des victimes, des accusés et des personnes mises en cause, l'échange d'information sur les lois en vigueur, ainsi que sur les procédures judiciaires utilisées dans leurs pays respectifs, le partage de documents, d'enregistrements et tout autre élément de preuve, la recherche et l'identification de personnes ou de biens, la recherche, la restriction, la perquisition, la saisie, la confiscation et la restitution de produits d'une infraction pénale.

Relativement à la Charte africaine des statistiques, la ministre Sall a souligné l'importance des statistiques pour tenir, définir et tracer de façon objective les politiques de développement.

À ce propos, elle a rappelé le démarrage du recensement général de la population qui a pour objectif de dénombrer la population résidant au Sénégal, afin de mieux connaître les besoins en matière de santé, de transport, d'éducation et l'appui à apporter au monde rural. Elle a soutenu que les statistiques sont la base de données qui permet à un gouvernement responsable de contrôler ses données et de tracer ses voies de développement.

Ainsi, autoriser la ratification de la Charte sur les statistiques revient à donner au gouvernement du Sénégal les moyens de s'y engager davantage, en raison du caractère contraignant de la loi supranationale, dit-elle. Elle a fait noter que si le Sénégal abroge une loi nationale, il sera lié par cet engagement international qu'il a signé et mettra en place un système statistique lui permettant de contrôler ses données.

À propos de l'adoption de la convention sur l'entraide judiciaire en matière pénale entre le Sénégal et les Émirats arabes unis, la ministre a précisé que nos compatriotes sont de plus en plus présents à Dubaï et commencent à y développer des affaires, à travers les centrales d'achats, les fournisseurs et les sociétés, d'où l'intérêt de ce texte.

Par ailleurs, elle a reconnu l'importance d'assurer la communication et la sensibilisation autour de ces instruments pour informer les Sénégalais de l'existence de ces textes et surtout de leur accessibilité, en invitant les représentations diplomatiques du Sénégal à le faire.

Quant aux conditions d'application des conventions, la ministre des Affaires étrangères a précisé que le service juridique de son département fera le suivi nécessaire, même si, très souvent, les conditions d'entrée en vigueur ou en application ne dépendent pas de notre pays.

Cependant, elle a soutenu que l'État, dépositaire des instruments de ratification, aura la responsabilité d'amener les autres pays à ratifier la convention pour qu'elle entre en vigueur. 

Les inquiétudes des députés

Sur ce point, des députés ont rappelé les difficultés de communication liées à la barrière linguistique dans les tribunaux mauritaniens que rencontrent les Sénégalais. Ils demandent, dans ce sens, au gouvernement de porter une attention particulière à ces difficultés, dans le cadre de cette convention. Ils se sont également interrogés sur l'établissement des actes d'état civil sur le territoire d'un État ou de l'autre, notamment sur la prise en compte de la convention Apostille.

Ils ont aussi déploré les nombreuses tracasseries routières, les prélèvements abusifs de taxes ainsi que les causes de ces accidents, qui sont généralement liés au comportement des usagers, à l'état des routes et des véhicules de transport, particulièrement sur l'axe Sénégal – Mali - Guinée. Il en est de même du décalage existant entre les textes et la pratique, en insistant sur les problèmes d'application des textes.

Ainsi, ils ont suggéré l'adoption de mesures adéquates dans le cadre de la mise en œuvre des dispositifs qui ont été pris à travers cette loi d'orientation votée par l'Assemblée nationale.

Des députés de la diaspora ont interpellé la ministre sur l'ouverture du consulat du Sénégal à Barcelone et sur les difficultés rencontrées par nos compatriotes au Mali et à Genève, pour le renouvellement de leur passeport.

Répondant à des interpellations, la ministre, relativement aux préoccupations des députés, sur l'ouverture d'un consulat à Barcelone, a informé que le président de la République a répondu favorablement à la demande de maintenir le consulat à Madrid et d'en ouvrir un nouveau à Barcelone.

À cet effet, elle a annoncé le lancement de la procédure ainsi que l'ouverture prochaine de ce consulat.

En outre, elle a évoqué les attaques terroristes dont ont été victimes des transporteurs sénégalais au Burkina Faso et les efforts consentis par le gouvernement pour les ramener au pays. À cet égard, elle a invité nos compatriotes à tenir nos représentations diplomatiques informées, afin qu'elles puissent prendre les précautions nécessaires.

 

 

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