La fin du désordre

Surfacturations dans les marchés publics, défaut de maitrise des coûts dans les révisions, l'ANSD et l'Arcop ont présenté, hier, l'IBTP (Indice des coûts des bâtiments et travaux publics), qui va permettre de mieux maitriser les prix.
Mettre un terme au désordre dans les marchés publics. C'est l'une des ambitions de l'Autorité de régulation de la commande publique (Arcop) qui a co-organisé hier, avec l'Agence nationale de la statistique et de la démographie (ANSD), un atelier pour lancer l'IBTP (l'Indice des coûts des BTP). “Une avancée remarquable”, s'est réjoui le directeur général de l'Arcop, Moustapha Djitté. Avant l'indice, soutient-il, chacun y allait de sa compréhension et de ses libertés, en cas de nécessité de révision, ce qui entrainait parfois des conflits inextricables. “À partir de maintenant, on a un indice qui permet, s’il faut actualiser ou réviser, de le faire dans les justes proportions. C’est tout le sens de l’indice développé par l’ANSD. Pour nous, c’est une avancée remarquable dans la maitrise des coûts qui sont appliqués à l’Administration”, s'est félicité le directeur général de l'Arcop.
Avec ce nouvel indice, s'accordent à dire les experts de l'ANSD et de l'Arcop, l'Administration dispose d'un moyen efficace pour lutter contre la bamboula dans les révisions de contrats impliquant ses entités, limiter les nombreux dégâts financiers causés par les aléas. “Au moment de paramétrer le dossier d’appel d’offres, c’est l’Administration qui va prendre le soin de mettre dans le dossier une disposition qui oblige tout le monde à respecter l’indice mis en place ; cela va faciliter la tâche à toutes les parties. En tant que régulateur, on était régulièrement saisi parce que les parties n’arrivaient pas à s’entendre”.
Une meilleure maitrise des prix
Cette absence de baromètre était aussi une niche potentielle de surfacturation. D'après le DG, l'IBTP peut aussi aider à lutter contre ce fléau qui gangrène la gouvernance publique. “C’est donc un pas qui a été franchi dans cette perspective de maitrise de ces errements qui entourent l’application des prix dans les marchés publics. Ça nous permet, lorsque les circonstances ont évolué, que l’opérateur ne puisse appliquer à l’Administration des coûts qui ne correspondent pas à la réalité économique”, soutient M. Djitté, qui explique : “Dans le cadre de la commande publique, entre la conclusion et le lancement d'un marché, il peut se passer un temps. Cela peut entrainer le fait que le prix qui a été souscrit ne soit plus adapté au moment de l’exécution. Dans d’autres hypothèses, c'est pendant l’exécution que le prix doit évoluer. Dans ces deux hypothèses, il était fort probable que les parties se retrouvent en conflit, parce que n’arrivant pas à tomber d’accord sur l’ajustement à apporter.”
Grâce à l'indice, les acteurs peuvent désormais avoir une visibilité sur toutes les composantes qui interviennent dans le coût de la construction. L'indice inclut notamment le suivi de la main-d’œuvre, des matériels et des matériaux de construction, des prix de l’énergie ainsi que des frais de transport.
Au-delà d'être un excellent levier pour les autorités publiques, l'indice est aussi un outil au service des opérateurs économiques. “Le secteur privé a une idée précise de l’évolution du coût des différentes composantes ; ce qui pourrait les aider dans l'établissement des offres”, a précisé le DG de l'ANSD. Cet indice, selon lui, donne une situation de référence de l’ensemble des produits entrant dans les coûts de construction des BTP. “Ils sont collectés sur l’ensemble du territoire national. L’indice est suivi et traité tous les trois mois. Ce suivi permet d’avoir une idée assez claire de l’évolution du marché. En cas de révision, il va permettre de faciliter les discussions entre les acteurs”, a renchéri le patron de l'ANSD.
Un outil de lutte contre les errements
L'objectif des autorités, selon le directeur de l'Arcop, c'est d'aller vers un référentiel des prix dans tous les secteurs concernant les marchés publics. “Cela permettrait de mieux cerner les conditions dans lesquelles les prix sont déterminés dans le cadre des procédures relatives aux marchés publics. Avec le référentiel, l’Administration aura la possibilité de vérifier si les prix proposés sont conformes ou non aux standards”, a expliqué le directeur général de l'Autorité de régulation de la commande publique.
Ce qui permettra, selon lui, de mieux ajuster les prix, lorsque les situations économiques changent.
Pour sa part, Al Assane Diop, chargé des partenariats public-privé à l'Arcop, a trouvé que l'indice vient à son heure. “L'indice est utile, en ce sens qu'il nous permet de bien planifier les marchés. Le budget de l'État souffre à cause des formules de révision et d'actualisation des marchés. Parce que tout simplement, elles apportent des surcoûts que l'État n'avait pas prévus. L'État dépense beaucoup d'argent dans ces révisions, parfois même autant que ce qui a été budgétisé”, constate M. Diop. Il estime que l'État doit penser à une stratégie pour une meilleure maitrise des prix dans tous les marchés. “L'importance, c'est de permettre à l'État de maitriser son budget ; ça permet aussi d'éviter les contentieux”, souligne le chargé des PPP et des achats pub durables.