Les personnes à mobilité réduite largement investies
Les élections législatives de novembre prochain sont marquées par l’investiture de plusieurs personnes en situation de handicap. De nombreuses listes et coalitions, petites soient-elles, ont mis cette tranche de la population au cœur de leurs activités politiques. Le président de la Fédération ouest-africaine des personnes handicapées, Yatma Fall, se réjouit de cette inclusion et soutient que tous les hommes politiques ont intérêt à mener des actions allant dans ce sens, car, selon la Banque mondiale, ces personnes constituent 15,5 % de la population sénégalaise.
Peut-on s’attendre à un nombre important de députés en situation de handicap à la 15e législature ? En tout cas, beaucoup de coalitions ont investi des personnes en situation de handicap, que ce soit sur leur liste nationale ou départementale. Même si un parlementaire en situation de handicap a siégé lors de la 13e législature, le député-maire Santi Sène Agne, on espère en avoir davantage cette année à l’Assemblée nationale. Parmi les coalitions interpellées, Defar Sa Gokh reste celle qui a investi le plus de personnes en situation de handicap.
D’après El Hadj Mapate Diouf, le coordinateur de l'Initiative pour un Parlement inclusif et membre de cette coalition, Defar Sa Gokh a investi 30 personnes en situation de handicap, dont 25 titulaires et cinq suppléants. Au niveau départemental, cette coalition, dont la tête de liste nationale est Adama Faye, a cinq têtes de liste départementales en situation de handicap, dans les départements de Kaolack, Goudomp, Bignona, Oussouye et Ziguinchor. Concernant la liste nationale, les personnes handicapées occupent les deuxième, troisième, sixième, neuvième, douzième, quatorzième, dix-huitième, vingtième, vingt-troisième et quarante-quatrième places.
De son côté, la coalition Actions, dont la tête de liste nationale est le professeur Daouda Ndiaye, a également investi des personnes en situation de handicap. Selon son mandataire national Bara Lo, dans le département de Pikine, sur les cinq personnes investies, l’une est en situation de handicap. Pour le département de Keur Massar, il précise que parmi les deux personnes investies, l’une est aussi en situation de handicap. "Au niveau national, à la septième position, il y a aussi une personne handicapée, qui occupe non seulement une place stratégique, mais qui joue un rôle important dans la stratégie que nous développons. C’est un informaticien de haut niveau, mais c’est lui qui porte aujourd'hui toute la stratégie de communication que nous mettons en place", explique-t-il. Malheureusement, regrette-t-il, ils n’ont pas investi de personnes en situation de handicap pour le département de Dakar. "Nous savons qu’il y a des difficultés dans la mise en œuvre des décrets d’application de la loi d’orientation sociale, qui occupe une place importante dans notre programme. Nous portons les personnes handicapées et si nous sommes majoritaires à l’Assemblée nationale, elles seront prises en compte. Les questions de mobilité seront réglées et nous allons intégrer la dimension handicap dans la réalisation des infrastructures publiques", a-t-il ajouté.
Pour sa part, la coalition Senegaal Kese a investi au niveau national des personnes en situation de handicap. "Nous avons investi un handicapé à Bambey, du nom d’Alioune Ngom, à la 45e place. Nous avons aussi un autre à Sédhiou, dans la commune de Ouadoucar, qui s’appelle Kéba Demba. Ils sont tous des titulaires sur la liste nationale. Il y a deux autres, mais je n’arrive pas à les joindre au téléphone pour vérifier leur position et s’ils sont titulaires ou suppléants", a expliqué le mandataire national de la coalition Senegaal Kese, Makhète Niang, avant de souligner qu’ils n’ont pas investi de personnes en situation de handicap sur la liste départementale de Dakar.
La coalition Dekkal Teranga, dirigée par Abdoulaye Niane, a aussi investi à Dakar, à la cinquième position, Khadim Talla, un informaticien en situation de handicap. Nous n’avons pas d’informations sur les autres départements ainsi que sur la liste nationale. Il faut également souligner que les grandes coalitions comme Pastef et Takku Wallu ont aussi investi des personnes en situation de handicap sur leurs listes. ‘’EnQuête’’ a tenté de joindre la coalition Diam Ak Njariñ, mais toutes les tentatives sont restées vaines.
"Les personnes en situation de handicap constituent 15,5 % de la population sénégalaise"
Le président de la Fédération ouest-africaine des personnes handicapées, Yatma Fall, se réjouit fortement de l’investiture des personnes en situation de handicap pour les élections législatives.
En effet, il se réjouit de cette inclusion pour trois raisons. D’abord, dit-il, les personnes à mobilité réduite, selon un rapport mondial publié par l’OMS et la Banque mondiale, constituent 15,5 % de la population sénégalaise. "Quand on projette cela sur les 18 millions d’habitants du Sénégal, cela représente environ trois millions de personnes. On ne peut pas faire une Assemblée nationale en mettant entre parenthèses les représentants de ces trois millions de personnes handicapées", a-t-il insisté.
L’autre raison, poursuit-il, est que depuis longtemps, les politiques publiques n’ont pas été inclusives. "Le handicap n’est pas toujours pris en compte dans l’élaboration, la mise en œuvre et l’évaluation des politiques publiques. Le rôle de l’Assemblée nationale est de voter les lois, de contrôler l’action du gouvernement et d’évaluer les politiques publiques. Si les personnes à mobilité réduite sont présentes à l’Assemblée, elles pourront mesurer le degré d’inclusivité des différentes politiques publiques dans tous les secteurs de développement", explique-t-il. Avoir des députés en situation de handicap permettra, lors de l’évaluation des politiques, de "mesurer le degré d’inclusivité ou de non-inclusivité et, le cas échéant, d’apporter les correctifs nécessaires pour que nous puissions avoir des politiques inclusives".
La dernière raison, souligne Yatma Fall, est que "le Sénégal a ratifié la Convention internationale sur les droits des personnes handicapées, qui impose aux États signataires, comme le Sénégal, de prendre en compte les personnes handicapées dans la vie publique et politique. Nous sommes très contents de l’investiture de ces personnes handicapées, même si nous n’avons pas encore atteint tous nos objectifs. C’est déjà un pas important".
FATIMA ZAHRA DIALLO