Les députés plaident pour une souveraineté industrielle
Le ministre du Développement industriel et des Petites et moyennes industries, Moustapha Diop, s’est présenté devant la représentation nationale pour défendre le projet de budget 2021 du département qu’il dirige. La relance des industries sénégalaises a fortement préoccupé les députés, lors du débat général.
Les députés ont rappelé l’importance du secteur industriel dans la croissance économique, à travers la création de richesses et d’emplois au Sénégal. A cet égard, ils ont invité le ministre à faire l’état des lieux du secteur industriel, en rétablissant sa part dans le PIB national et la valeur globale des exportations en zone UEMOA. De plus, ils lui ont demandé de décliner la nouvelle politique industrielle du pays que son département envisage de mettre en place. Dans la même veine, des parlementaires ont jugé nécessaire de mettre en place une industrie forte et durable, capable d’assurer une souveraineté alimentaire et pharmaceutique au pays. En ce sens, ils lui ont suggéré d’œuvrer à capitaliser le talent des jeunes, étudiants comme artisans, qui ont montré leur génie créatif pendant la pandémie de la Covid-19, à travers la fabrication de dispositifs automatiques de lavage des mains, de respirateurs artificiels, de gels hydro-alcooliques, de masques artisanaux ou chirurgicaux, entre autres.
‘’Nous avons besoin d’une grande industrialisation de notre économie pour sortir le pays de la pauvreté. La pandémie de la Covi-19 nous a permis de mesurer nos faiblesses et d’en tirer les conséquences’’, a souligné Toussaint Manga. Selon lui, la tension dans le monde, sur l’acquisition de médicaments, d’appareils médicaux, de masques, de gels désinfectants et d’antiseptiques doit pousser les autorités à penser à l’industrie pharmaceutique nationale. ‘’Nous devons travailler à mettre en place une industrie pharmaceutique forte avec notre secteur privé national. Nos facultés de Médecine et de Pharmacie ont formé plusieurs générations de pharmaciens en industrie. Donc, les compétences et le personnel existent. Ainsi, la relance de l’industrie pharmaceutique doit être une priorité’’, a-t-il défendu. Il a indiqué que le gouvernement doit faire en sorte qu’au moins 50 à 70 % des besoins en médicaments soient produits au Sénégal.
‘’Pour la lutte contre la Covid-19, les scientifiques n’ont trouvé ni vaccin ni médicament. La seule solution reste les mesures barrières, parmi lesquelles l’utilisation des masques et des gels hydro-alcooliques. Vous devez mesurer l’importance et le rôle de votre ministère pour garantir leur disponibilité’’, a poursuivi le député.
En outre, compte tenu de la transversalité du secteur, Moustapha Diop est convié à travailler en parfaite synergie avec les autres ministères sectoriels concernés, pour porter conjointement le développement stratégique du pays.
S’agissant des petites et moyennes industries (PMI) et des petites et moyennes entreprises (PME), les députés ont appelé à une réflexion concertée sur une stratégie d’industrialisation endogène, destinée à booster la mise en place de petites unités industrielles compétitives et susceptibles de pallier l’importation de produits primaires.
Mesurant à juste titre le rôle important que joue le textile dans la promotion de l’industrie sénégalaise, des élus comme Samba Demba Ndiaye et Oulimata Guiro ont fait un fort plaidoyer pour que ce secteur soit redynamisé. A ce propos, ils ont souhaité la réouverture de la Sotexka, de la Société de teinture impression et blanchiment africaine (Sotiba) et de la NSTS, ainsi que la réhabilitation du Domaine industriel et textile de Kaolack (Domitexka).
S’agissant de la NSTS, ils ont interpellé le ministre sur les contraintes qui bloquent la reprise de ses activités. En outre, il a été invité à développer l’industrie sidérurgique, notamment la fabrication de fer FE500 et à mettre en place une industrie de digitalisation. Les députés ont également salué la relance des ICS. A ce titre, ils ont plaidé l’augmentation des crédits alloués à cette structure et l’accroissement de la quantité de production d’engrais chimiques et de phosphates, pour assurer l’autosuffisance dans ce domaine et approvisionner les pays de la sous-région.
De même, ils ont exhorté le ministre à apporter des solutions au barème d’indemnisation qui crée un malentendu entre les ICS et les populations et bloque, par la même occasion, les activités de l’entreprise. De plus, une meilleure prise en compte des jeunes de Tivaouane dans les politiques et recrutement de ladite entreprise a été souhaitée.
Par ailleurs, certains représentants du peuple se sont félicités du programme des agropoles qui traduit, selon eux, le redéploiement industriel répondant ‘’au maillage, à l’équité territoriale ainsi qu’à la cohésion sociale’’.
Prenant la parole, le ministre Moustapha Diop a, sur la question de la souveraineté pharmaceutique, fait part de l’ambition du chef de l’Etat de faire du Sénégal un hub industriel et biomédical. Dans cette optique, il a informé de la mise en place du projet de réhabilitation d’un parc industriel pharmaceutique Pharmapolis à Tivaouane, en partenariat avec la société Inova. En ce qui concerne l’état des lieux du tissu industriel, le ministre du Développement industriel, des Petites et moyennes entreprises soutient que ‘’le secteur est dominé par les PME qui représentent 92,5 % ; Thiès 5 %, Saint-Louis 1 %, Ziguinchor 1 %.
Il a précisé, en outre, que le secteur de l’agro-alimentaire reste prédominant, représentant 62 %, suivi du secteur mécanique et métallurgique qui représente 10 %. Et le ministre a informé des 1 162 entreprises créées dans le secteur’’. En outre, Moustapha Diop a affirmé que son département s’évertue à la relance de la filière textile, avec le concours de la Sotexka et de la NSTS, société dans laquelle ‘’l’Etat avait injecté 594 millions de francs CFA et 350 t ont été traitées sur un objectif de 200 t’’, dit-il.
Quant à la Sotexka, il a rassuré de sa réouverture imminente, en accord avec des repreneurs italiens qui ont décidé d’y injecter 11 milliards de francs CFA. A cet, effet, il a rappelé que le contrat de location-gérance est déjà signé et enregistré aux Impôts et domaines.
Abordant la question des industries chimiques du Sénégal, M. Diop a indiqué ‘’qu’elles ont pris un envol avec les Indiens de l’Indoroman qui avaient décidé d’injecter 220 millions de dollars, dont les 100 millions ont été déjà décaissés’’. A ce titre, poursuit-il, les lignes de fer et les wagons sont installés. ‘’Elles disposent actuellement d’une centrale à charbon de 20 MW qui dépasse largement leur besoin en énergies, qui est à hauteur de 1, 784 milliards de tonnes de phosphates et de 594 000 tonnes d’acide phosphorique. En 2015, elle fait un bénéfice de 3,5 milliards de F CFA et le résultat s’est amélioré en 2016. En 2017, il s’est consolidé avec un montant de 7,3 milliards de F CFA et 42 milliards de F CFA en 2018’’, a- t-il indiqué.
À son tour, le ministre des Finances et du Budget, Samba Sy, a reconnu la faiblesse des crédits alloués au ministère, qui ont toutefois connu une légère hausse d’un milliard de francs CFA en valeur relative.
Tout de même, il a tenu à rappeler que la mission du ministère ne consiste pas à créer des industries, mais plutôt à créer les conditions d’un environnement propice au développement de l’industrie au Sénégal. A titre d’exemple, il a cité les agropoles, les plateformes industrielles et les domaines industriels ‘’dont les crédits destinés à la mise en œuvre dépassent trente fois ce que laisse transparaitre le budget du ministère’’.
A cet effet, il a annoncé que le financement de l’agropole Sud s’élève à 57,6 milliards de francs CFA. ‘’L’accord de financement est signé et le gouvernement est en train de satisfaire les conditions de leur mise en œuvre’’, a ajouté M. Sy.
BABACAR SY SEYE