La touche Amara
Nommé entraîneur de l'As Kaloum de Conakry fin février dernier, Amara Traoré fait renaître l'espoir auprès du club, avec notamment une méthode bien appréciée.
En Guinée, le foot, ça se vit au quotidien. À Conakry, les jeunes ne parlent que de ce sport. La passion est papable. Ce samedi 23 mars 2013, ils étaient des centaines, voire même milliers, à prendre d'assaut le stade d'entraînement de l'As Kaloum, situé presque au centre-ville de la capitale. Ce jour, en fin de matinée, l'équipe locale accueille l'Association sportive des forces armées guinéennes (Asfag) en amical. ''Le Guinéen aime le foot, dit Ibrahima Sadio Bâ, journaliste sportif de la radio Liberté FM. Personne n'a annoncé le match dans aucun média, pourtant vous voyez bien que le stade est quasiment plein. Le public est collé à son équipe''. ''Le public a commencé à venir en masse avec le retour des anciens du club qui étaient en Europe.
Mais l'arrivée d'Amara Traoré a apporté plus d'engouement aujourd'hui. Avec sa venue conjuguée à celle des internationaux Kémoko Camara, Kanfory Sylla, Ibrahima Camara, le public a compris que c'est du sérieux maintenant'', poursuit Aboubacar Bangoura, un juriste de 39 ans et fan du club. À l'As Kaloum, l'ancien sélectionneur des Lions du Sénégal est considéré comme l'homme providentiel de ce club mythique de Conakry qui veut conquérir l'Afrique. ''Les populations ont bien accueilli la nouvelle, tout le monde était content. On espère qu'il va apporter son expertise parce que l'homme n'est pas à présenter. Les gens connaissent les résultats qu'il a eus au Sénégal avec l'équipe nationale'', raconte Ibrahima Sadio Bâ. ''C'est une fierté d'avoir un tel entraîneur, c'est un grand technicien'', s'émeut Issiaga Soumah, supporter du club.
''Le club est devenu plus professionnel''
À Kaloum, Amara Traoré a bousculé la vie du club en un laps de temps. Arrivée il y a environ un mois à la tête de l'équipe, l'ex-capitaine de Gueugnon (France) a déjà imprimé ses marques. ''Amara a apporté sa touche personnelle, il a redynamisé l'équipe, a restauré l'autorité des dirigeants. Il sait motiver un groupe'', apprécie le journaliste de radio Liberté. Même les anciens du club ont commencé à tomber sous le charme d'Amara. ''Avant, c'était la pagaille. L'équipe n'était pas comme elle est devenue aujourd'hui.
Les anciens expatriés ne se donnaient pas à fond, ils ne s'entraînaient que 30 minutes. Quand il est arrivé, il a tout changé. Les horaires d'entraînements sont passés de 7 heures à 10 heures du matin, il a dégraissé tous les joueurs. Il a apporté de la discipline tactique'', admire Moussa Abdine Keita dit Jonathan, ex-joueur de Kaloum (1998). ''C'est vrai qu'il y a une meilleure organisation. Sa venue au club a motivé la mienne'', avoue Kanfory Sylla. Et avec Amara, l'effort est collectif. ''Il n'aime pas qu'un joueur joue en marchant'', explique Ibrahima Sadio Bâ. ''Il nous met la pression à chaque fois'', raconte Ibrahima Camara, ancien joueur du Mans (France).
''Maintenant, on parle de titre''
L'équipe commence déjà à récolter les fruits du travail d'Amara Traoré. L'ancien attaquant international sénégalais, quart de finaliste de la Coupe du monde 2002, a gagné son premier match, son seul d'ailleurs en championnat contre l'As Baté (1-0). ''On a vu que l'équipe a plus de rythme maintenant, les joueurs sont physiquement aptes. Avant, la faiblesse de l'équipe, c'était la récupération. Mais contre l'As Baté, on vu un visage plus conquérant'', fait observer Ibrahima Sadio Bâ.
En un match, Amara a donc tout changé, même les ambitions. ''Avant, on visait le maintien, maintenant on parle du titre'', remarque le journaliste. Un constat confirmé par l'adjoint du coach. ''Notre objectif, c'est le championnat, voire la coupe aussi. Et avec Amara, on va y arriver Incha Allah'', affirme Momo Wandel Soumah, ancien joueur de la Jeanne de Dakar de 2000 à 2002. Le chemin est encore long. À l'issue de la 9e journée, l'As Kaloum pointe à la 3e place, à quatre longueurs du leader, Satellite FC (20 points). Tous les espoirs reposent désormais sur Amara Traoré pour gagner le championnat qui fuit le club depuis 2007. Toutefois, les supporters veulent lui donner le temps. ''Avec lui, on veut que l'As Kaloum retrouve ses qualités d'antan, on veut qu'il nous ramène en Afrique. Mais on ne l'étouffe pas, on est patients, contrairement aux Sénégalais'', tempère Aboubacar Bangoura.
Après l'échec de la Coupe d'Afrique des Nations (CAN) 2012 où le Sénégal a terminé dernier de son groupe A avec trois défaites en autant de matches, Amara Taoré a été remercié par la Fédération sénégalaise de football (FSF). ''En tant que Sénégalais, c'est un honneur pour moi de voir un compatriote à l'As Kaloum. Je l'ai toujours suivi. Partout où il est passé, il y a laissé ses traces. Il a gagné la Coupe du Sénégal avec la Linguère de Saint-Louis et a fait remonter le club en première division'', souligne El Hadji Touré, un retraité de la Banque centrale de Guinée et originaire de Rufisque, quartier Dangou Kao. C'est tout le mal qu'on lui souhaite.
Ibrahima Camara, latéral de l'As Kaloum et du Syli
''Il a changé beaucoup de choses''
''Tout le monde sait que c'est un bon coach, d'un grand niveau. Il a bien intégré le groupe. Je pense que l'As Kaloum est une autre équipe aujourd'hui. Elle est différente des autres. Avec lui, on joue dans différents systèmes. Depuis son arrivée, on est en train de bien bosser, on évolue toujours. Pour nous les joueurs, c'est un bon choix. Il a changé beaucoup choses, notamment sur le plan tactique et l'ambiance au sein du groupe. Si on continue comme ça, je ne peux pas dire qu'on va gagner le championnat, mais on peut aller loin. Nous qui sommes des internationaux, on se comprend bien même s'il met beaucoup de pressions sur nous. Il nous pousse à donner plus que les autres qu'on a trouvés ici.''
Momo Wandel Soumah, adjoint d'Amara
''Il est très rigoureux''
''J'ai eu la chance de rencontrer un grand homme. Là, c'est une bonne occasion de travailler avec de grands techniciens comme lui. Donc, je vais profiter de son expérience. C'est un entraîneur parfait et il a montré qu'il est bon. Tout ce que les gens disent est vrai. Quand il est venu, l'équipe n'était pas au top, ils ne savaient pas comment jouer sur le terrain. Mais il a réussi à mettre en place une bonne équipe. Vous avez vu vous-même qu'elle parvient à faire dix passes de suite. Avant, on ne pouvait même pas faire cinq passes. Aujourd'hui, ils ont commencé à jouer au foot. Quand il est arrivé, il m'a demandé des renseignements sur l'équipe et a travaillé en fonction de ce que je lui ai dit. Le président de l'As Kaloum, Boubacar Sampil, aime faire de grandes choses, il a fait la différence. Avant, on ne parlait que du Horaya. Les soirs, à l'heure de l'entraînement, le terrain est rempli comme s'il s'agit d'un match de championnat. Il est très rigoureux et très gentil. Il prépare le joueur moralement et mentalement.'' |
ADAMA COLY
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