Publié le 29 Apr 2020 - 23:36
REOUVERTURE DES CLASSES

Les enseignants écartent une reprise, ce 4 mai

 

L’Etat a émis le souhait de rouvrir les classes ce 4 mai et est en train d’étudier les voies et moyens d’y parvenir. La tutelle a, dans cette optique, sondé les syndicats qui, eux, écartent une reprise au début du mois prochain. Ils s’en expliquent et donne les scénarii qu’ils envisagent pour sauver l’année.

 

L’Etat a fixé l’échéance du 4 mai pour une reprise des cours dans l’enseignement. De ce fait, les services du ministère de l’Education nationale étudient les modalités de cette reprise. Mais les syndicats d’enseignants du G7 ne l’entendent pas de cette oreille. ‘’Ce n’est pas possible. Le ministère nous a interpellés, suite au Conseil des ministres du 15 avril, demandant aux parties prenantes, dans le secteur de l’éducation, de faire des propositions pour l’année scolaire. Dans les scénarii que nous avons tracés, la reprise pour le 4 mai est impossible’’, déclare Saourou Sène, Secrétaire général du Syndicat autonome des enseignants du moyen secondaire du Sénégal.

Il s’explique : ‘’La raison est que nous n’avons aucune garantie, en termes de sécurité, lorsque les enfants devront reprendre les cours. D’autant plus qu’aujourd’hui, avec la multiplication des cas communautaires, la situation est plus préoccupante que par le passé. Il y en a même qui ont pensé que l’on peut faire reprendre les classes de terminale et de 3, bref, les classes d’examen, en faisant respecter les distances. Mais cela n’est pas possible, pour la bonne et simple raison que les enseignants sont rentrés. Ils ont regagné leurs localités d’origine. Maintenant, ils vont sans doute dire : si les cours vont reprendre le 4, cela veut dire que le transport inter-région, qui est fermé, serait obligé de rouvrir pour les enseignants. Parmi ces enseignants, qui sait celui qui a développé les symptômes ? C’est un problème.’’

Egalement, poursuit-il, même si les autorités réussissent à faire respecter la distance pour les élèves en classes d’examen, ils seront difficiles à contrôler, quand ils sortiront de cours. Bon nombre d’entre eux prennent les bus ou les cars pour aller à l’école. ‘’Vraiment, pour moi, les conditions ne sont pas réunies pour une reprise le 4 mai’’, indique Saourou Sène. Pour qui la solution, pour le moment, est de maintenir la dynamique des cours en ligne. Beaucoup de professeurs, annonce-t-il, ont créé un groupe WhatsApp avec leurs élèves.

A côté de ce qui se fait, Saourou appelle à la responsabilité des parents qui ont le devoir d’encadrer leurs enfants, même s’ils ne vont pas à l’école.

Selon lui, si la pandémie se termine en fin mai, par exemple, ils auront toujours l’occasion de se retrouver et de décider de ce qui peut être fait de façon objective et réaliste. ‘’Le Sénégal ne doit pas oublier qu’il n’est pas seul dans cette affaire. Tous les pays du monde sont traversés par cette crise et, par conséquent, nous verrons, d’un pays à un autre, qu’est-ce qui est plus adapté. Je considère, pour le moment, qu’il n’est pas possible d’envisager l’enseignement-apprentissage ; les examens, n’en parlons pas. Quand il n’y a pas cours, on ne peut pas parler d’examen’’, constate le syndicaliste.

Toutefois, il souligne que, dès que les opportunités se présenteront, ils apprécieront tous les cas de figure et appliqueront la meilleure des solutions. Même s’il écarte le scénario de reprendre les cours au mois de mai, il liste les scénarii que son syndicat a proposés, vendredi dernier, au ministre de l’Education nationale, en cas de reprise à la date indiquée par le chef de l’Etat. ‘’A l’époque, nous pensions, au cas où nous pouvions faire les cours au mois de mai, décaler d’un mois et faire des cours de renforcement pour tenir les examens en juillet’’.

Saourou Sène poursuit : ‘’Au cas où les cours ne reprennent pas en mai et que les cours reprennent au mois de juillet, il va falloir envisager les examens au mois d’octobre et, entre les mois de juillet, août, septembre, essayer de voir dans quelles conditions nous pourrons faire des cours de renforcement et de rattrapage. Pour les autres classes intermédiaires, on peut se baser sur les contrôles continus et le premier semestre, et voir avec quels moyens on peut permettre aux enfants de passer en classe supérieure. Le troisième scénario, c’est au cas où les cours pourraient s’organiser à partir du mois d’août. Là aussi, nous avons pensé au mois de décembre pour les examens et ça va empiéter sur l’année scolaire 2020-2021. Le ministère étudie toutes propositions faites.’’

‘’En l’état actuel, c’est pédaler dans l’air que de faire des propositions‘’

Le secrétaire général du Syndicat des enseignants libres du Sénégal/Authentique avoue que son syndicat n’a rien proposé à la tutelle, parce que ce n’est pas possible de redémarrer les cours le 4 mai. Abdou Faty : ‘’Nous avons été catégoriques, parce que lorsque nous avions trois cas, le président de la République Macky Sall a fermé les écoles. Aujourd’hui, nous tendons vers les mille cas. Alors, il n’y aucune raison que l’on rouvre les écoles. L’école, c’est un facteur extraordinaire de contamination, car il y a trois millions cinq cent mille élèves, cent mille enseignants, vingt-six mille établissements et écoles. C’est une bombe’’.

Par conséquent, ce qu’ils peuvent faire, dit-il, c’est de les encourager dans le e-learning, leur demander de mettre la connexion partout au Sénégal, commencer la formation pour le digital des enseignants pour que, demain, si cette situation se pose de nouveau, de pouvoir prendre des dispositions.

En l’état actuel, à son avis, ‘’c’est vraiment pédaler dans l’air que de faire des propositions, parce que le Sénégal n’a pas atteint son pic et l’école est une victime collatérale de la pandémie’’. ‘’Au Sels/A, on dit que ce n’est pas réaliste, ni réalisable. On n’a qu’à se battre tous ensemble pour que la pandémie s’estompe. Certains parlent de réduire les effectifs ; cela n’est pas possible’’, dit-il.

Abdou Faty souligne que les gens vont refuser que les enseignants entrent dans les régions, sans compter le manque de masques, de gels antiseptiques. La solution, selon lui, est de freiner la pandémie pour pouvoir retourner dans les salles de classe.

Faire le dépistage du personnel enseignant

Le secrétaire général du Cadre unitaire syndical des enseignants du moyen secondaire, Abdoulaye Ndoye, partage le même avis, quant à la reprise des cours le 4 mai. ‘’Il faut d’emblée l’écarter, martèle-t-il, en raison de l’évolution de la maladie, car le risque existe. Le Sénégal a enregistré 9 cas de décès ; la psychose est là. On ne peut pas reprendre les cours au mois de mai’’. Le syndicaliste ajoute que la première chose à faire est de prendre en compte l’avis déterminant du Comité national de gestion des épidémies, voir est-ce que les conditions sont réunies pour une reprise sans risque. Ainsi, s’ils doivent retourner dans les salles de classe, il faudra, pour tous les acteurs, des moyens de protection. Il ajoute que la clé de la reprise doit reposer sur le transport : assurer la garantie de la mobilité du personnel enseignant, des élèves et du personnel administratif. Il demande de faire le dépistage du personnel enseignant.

Par une correspondance en date du 17 avril 2020, le ministre de l’Education nationale, Mamadou Talla, les a invités à faire des propositions pour une éventuelle validation de l’année scolaire 2019-2020, pour un agenda des examens et un parachèvement des cours.

Sur le premier point, le Cusems considère que tous les scénarii doivent être envisagés, eu égard à la complexité de la question. Parce que, déclare Abdoulaye Ndoye, sur la base du quantum horaire effectué, il faudra déterminer, de manière rigoureuse, si on doit valider l’année en cours. ‘’Si toutes les conditions sont réunies, on peut envisager la reprise des cours et les poursuivre jusqu’en mi-août 2020. Les évaluations du second semestre peuvent se faire sous forme de contrôle continu. Enfin, les examens, dans la première quinzaine du mois d’octobre 2020 et la réouverture des classes, en novembre 2020. D’où la nécessité d’impliquer les collectivités territoriales. Mais le mois de mai est exclu’’.

Le syndicaliste de conclure que l’après coronavirus doit être une période riche en enseignements, car l’éducation et la santé sont des facteurs stratégiques, importants, non négligeables.

TROIS QUESTIONS A DAME MBODJ, COORDONNATEUR DU G20

‘’Nous attendons que le ministre nous dise ce qu’il a décidé de faire’’

Le secrétaire général national du Cusems/Authentique trouve extrêmement grave qu’à moins d’une semaine de la date annoncée de réouverture des écoles et universités (4 mai 2020) au Sénégal, que parents et enseignants ignorent toujours à quoi s’en tenir.

A quel moment vous attendez-vous à la réouverture des écoles et universités au Sénégal ?

Dans tous les pays, on connait, deux semaines à l’avance, si les écoles vont rouvrir ou pas. C’est pour permettre aux parents de se préparer à cela. On est à 5 jours de la date que le gouvernement avait annoncée pour la réouverture des écoles et universités, et personne ne peut dire si elle sera effective ou pas. C’est extrêmement grave ! Cela montre que la décision ne provient pas du Sénégal.

Il y a un lobby français installé au Sénégal et qui contrôle notre système éducatif. Dans notre pays, il y a des écoles arrimées au programme français. Pour preuve, lorsque la France a fermé ses écoles pour trois semaines, nous les avons imités. Quand elle a rallongé d'un mois, nous en avons fait de même. Et nous dénonçons cela avec la dernière énergie. Nous n’attendons pas du ministre qu’il démente une information, mais qu’il nous dise ce qu’il a décidé de faire. Les parents et enseignants n’attendent que cela. Est-ce qu’il confirme que les écoles vont rouvrir le 4 mai ou va-t-il prolonger la fermeture ?

Cela suppose que vous n’avez pas été consulté pour une réouverture…

Depuis le début de cette crise, si le président de la République nous avait consultés, il n’aurait pas fermé totalement les écoles et universités. Nous lui aurions conseillé une fermeture ciblée. Quand cette mesure avait été décidée, 9 régions n’avaient pas encore été touchées par la pandémie de coronavirus. A l’époque, on aurait pu fermer dans les zones touchées. Mais il a pris sa décision sans consulter les acteurs de l’éducation. Cela a été une très grande erreur. Et c’est ce qui les rattrape maintenant.

Quelle est votre proposition pour sortir de cette situation ?

Dans ma proposition que j’avais soumise depuis le 12 avril, on devait redémarrer à partir du 21 avril avec les classes d’examen. Comme ça, ce serait plus facile de respecter les consignes de sécurité et les mesures barrières préconisées par les médecins. Si les élèves de CM2, de 3e et de terminale occupent seuls les classes, on pourra les distancier les uns des autres. Si on ne privilégie pas ces élèves-là, ils seront sacrifiés. Les classes intermédiaires pourront attendre. Pour certains élèves en classes d’examen, il ne reste que 2 mois avant la date prévue pour les épreuves.

Lamine Diouf

AIDA DIÈNE

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