Publié le 5 Jun 2019 - 03:06
SOUDAN

Les militaires utilisent la force pour disperser le «sit-in»

 

Ce lundi 3 juin, le bras de fer entre les généraux au pouvoir au Soudan et la contestation a pris une tournure sanglante avec la dispersion dans la violence du « sit-in » des manifestants à Khartoum. Une opération qui a fait plus de 30 morts, selon un comité de médecins.

 

Khartoum est devenue une ville fantôme ce lundi. Quelques heures après l’attaque contre le sit-in, on entendait encore de temps en temps des coups de feu. Mais désormais, c’est le silence. Énormément de magasins sont fermés et quelques rares passants s’aventurent dans la rue, mais très peu. Des manifestants ont monté parfois des barricades, notamment à Omdurman où un habitant dit que les protestataires demandent aux gens de s’éloigner de leurs barrages au cas où l’armée attaquerait de nouveau. L’opération a été menée principalement par les RPF (Regional protection force), la milice paramilitaire de Mohammed Hamdan Dagalo, surnommé Hemetti, le numéro 2 de la junte.

C’est très compliqué de s’approcher du sit-in, les patrouilles militaires sont nombreuses. Selon des témoins, c’est là-bas un paysage de destruction avec beaucoup de tentes en feu, dans lesquelles les gens du sit-in vivaient 24 heures sur 24 et qui sont aussi pour certaines réduites en cendres désormais. Les soldats ont tiré à balles réelles sur les manifestants, les ont frappés à coup de bâtons provoquant la panique. Des flaques de sang jonchent le sol. Selon la contestation, les lieux ont été totalement évacués. Les victimes ont été transportées dans les hôpitaux de campagne ouverts depuis plusieurs semaines.

À l’intérieur du site, il y aurait des dizaines de blessés dans ces hôpitaux. Le bilan risque de s’alourdir au fil des heures. L’Association des professionnels soudanais (APS) a demandé à plusieurs ONG comme Médecins sans frontières (MSF), le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) de venir en aide aux médecins du sit-in submergés. Le Comité des médecins fait état de plus de 30 morts. Les soldats ont également, selon des sources médicales, tiré à l’intérieur d’au moins un établissement de santé.

Le dialogue rompu

Les relations entre les deux camps étaient crispées depuis l'échec des négociations sur les contours de la transition sur l'après-Omar el-Béchir. Et donc ce matin, l'armée est passée à la vitesse supérieure.

L’armée avait lancé trois attaques cette semaine contre une autre zone de Khartoum baptisée Columbia, faisant des morts et des blessés, ce qui avait déjà tendu l’atmosphère. Et aujourd’hui, l’opération est d’une tout autre ampleur. Elle a lieu dans un contexte de négociations déjà assombries : il n’y avait plus de dialogue direct autour d’une table entre militaires et civils depuis de précédentes violences de l’armée.

Néanmoins, les contacts avaient été maintenus encore, mais cette fois, l’Association des professionnels soudanais a évidemment annoncé que les pourparlers étaient rompus, que les militaires portaient l’entière responsabilité de la situation, que les coupables seraient traînés en justice. L’APS a également demandé aux Soudanais de sortir, de manifester pacifiquement, de faire grève et enfin de lancer une campagne de désobéissance civile jusqu’à ce que le régime tombe. L’aviation civile a été une des premières corporations à suivre le mouvement. Le trafic aérien est donc très perturbé à l’aéroport.

Curieusement dans la matinée, le porte-parole du Conseil militaire a fait une courte déclaration disant que les forces soudanaises n’avaient pas dispersé le sit-in, mais avaient visé une zone voisine devenue une menace pour les citoyens. Ce qui est faux, c’est clairement le sit-in, le cœur de la révolution, qui a été massivement attaqué.

Par RFI

 

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