L’Assemblée nationale entre enterrement et déterrement
Ce week-end, à l’occasion du vote du projet de loi portant révision de la Constitution, certains députés de la 15e législature ont interpellé le garde des Sceaux sur plusieurs questions, notamment les événements de mars 2021 à février 2024 ainsi que l’affaire des deux gendarmes. D’autres se sont intéressés à la suppression du HCCT et du Cese, tout en espérant que d’autres institutions ne seront pas mises en place. Le ministre de la Justice, Ousmane Diagne, a apporté des réponses.
Les députés de la 15e législature ont été convoqués en séance plénière ce samedi pour adopter le projet de loi portant révision de la Constitution. Lors des discussions générales, certains parlementaires ont demandé au garde des Sceaux de faire la lumière sur certains sujets qui préoccupent les Sénégalais. Prenant la parole en premier, Guy Marius Sagna a souligné devant le ministre de la Justice la nécessité de clarifier l’affaire de la disparition des deux gendarmes Fulbert Sambou et Didier Badji. "Monsieur le Ministre de la Justice, où en êtes-vous avec le dossier de Fulbert Sambou et de Didier Badji", s'est-il interrogé.
Répondant à cette question, le ministre de la Justice, Ousmane Diagne, a rassuré les parlementaires : "L’affaire des deux gendarmes disparus est en cours d’instruction. Cela signifie qu'elle a été ouverte à des fins de recherche, mais c'est aussi une affaire publique. Elle déterminera les conditions dans lesquelles ces honorables gendarmes ont disparu. Les commanditaires et auteurs de tout délit ou crime répondront de leurs actes de la manière la plus rigoureuse possible", a promis le garde des Sceaux.
Dans le même ordre d’idées, d’autres parlementaires l’ont également interpellé sur les "douloureux événements" qui ont secoué le pays entre mars 2021 et février 2024. Pour le ministre, ne pas punir les actes qui ont eu lieu durant cette période serait un mauvais signal. "Je pense que pour des faits aussi graves, qui ont ému tout le monde, dont certains ont été diffusés en direct sous l'œil des caméras, laisser ces gens impunis serait un mauvais signal. Car, dit-il, cela établirait un climat d’insécurité que rien ne saurait justifier. Je vous rassure que nous allons nous efforcer de faire toute la lumière sur cette affaire. Le travail est déjà entamé. Toute la lumière sera faite et toutes les responsabilités seront établies. Les commanditaires répondront de leurs actes".
L’adoption, par l’Assemblée nationale, de la loi portant suppression du HCCT et du Cese
Lors de la séance plénière, des députés de l’opposition ont évoqué l’impertinence de la suppression du Haut conseil des collectivités territoriales (HCCT) et du Conseil économique, social et environnemental (Cese). Ils espèrent que cette suppression ne sera pas suivie de la création d'autres institutions.
"Je suis d’accord pour la rationalisation des dépenses en supprimant le HCCT, à condition de ne pas envisager la création d’autres institutions", a lancé le député Maguette Sène. Pour Mbaye Dione, la suppression de ces deux institutions permettra de rationaliser les dépenses, mais il insiste sur le fait qu'il n’y a pas que des politiques dans ces instances.
Aïssata Tall Sall a demandé au gouvernement de prendre un engagement solennel et d’assurer au peuple sénégalais qu'il ne reviendra pas à l’Assemblée nationale pour demander l’instauration d’autres institutions.
Se prononçant sur cette question, le ministre de la Justice a souligné que la création d’autres institutions n’est pas à l’ordre du jour. Ousmane Diagne a aussi précisé que le CESE a coûté 65 milliards de FCFA entre 2012 et 2024 et que le HCCT en a coûté 138 milliards de FCFA entre 2016 et 2024. Au total, déplore-t-il, 203 milliards de FCFA ont été dépensés pour ces deux institutions.
Mais de l’avis de Me Aïssata Tall Sall, pour des raisons symboliques et formelles, ils auraient pu inaugurer leur législature par des actes positifs, plutôt que par des mesures négatives. Au moment où ils procèdent à la suppression de ces deux institutions, déplore la présidente du groupe parlementaire Takku-Wallu, la loi de finances initiale leur attend.
"Les Sénégalais attendent leur budget. Ils veulent savoir comment ils vont être gouvernés et avec quels moyens. Une loi de finances rectificative nous attend également. Comment avez-vous financé les élections législatives qui n'étaient pas inscrites dans la loi de finances initiale de 2024 ? Voilà les urgences que notre législature devait régler plutôt que de s'engager dans des négociations. Cela était votre choix, nous le respectons et nous le déplorons", a dénoncé l’avocate députée.
D’après elle, si les autorités jugent nécessaire de supprimer ces deux institutions pour construire des écoles, des hôpitaux et d'autres infrastructures, "le gouvernement n'a qu'à démissionner ici et maintenant. Parce que le propre d'un gouvernement, c'est d'avoir ses institutions et de conduire la politique de développement au profit des Sénégalais".
L’indemnisation journalière des détenus va passer de 1 152 FCFA à 1 300 FCFA
Après avoir félicité les autorités pour la suppression de ces deux institutions jugées budgétivores, Guy Marius Sagna a, lui, demandé si le gouvernement ne pense pas à d'autres institutions, directions ou agences qui pourraient être dissoutes ou fusionnées pour rationaliser davantage les ressources de l’État.
Le garde des Sceaux a aussi été interpellé sur les conditions exécrables de détention des prisonniers. Ousmane Diagne a fait sur le sujet quelques annonces. Il informe de la construction de 9 prisons en cours dont le projet d’une prison de 2 500 places à Diamniadio et d’une autre 500 places à Fatick. Il a aussi informé les honorables député que l’indemnisation journalière des détenus va passer de 1 152 FCFA à 1 300 FCFA.
Après de longues discussions, l’Assemblée nationale a finalement adopté la loi portant suppression du Haut conseil des collectivités territoriales et du Conseil économique, social et environnemental.
ASSEMBLÉE NATIONALE Guy exige la démission de son collègue Mbaye Dione à la tête de la Bimao Lors du vote du projet de loi portant révision de la Constitution, Guy Sagna a interpellé le président de l’Assemblée nationale sur la démission du député Mbaye Dione de l’un de ses postes. Monsieur Dione est le directeur général de la Banque des institutions mutualistes de l'Afrique de l'Ouest (Bimao) et deuxième vice-président de l'Association des banques de l'Afrique de l'Ouest (Abao). Selon le parlementaire, ces fonctions sont incompatibles avec celle de député. L’honorable Guy a évoqué l’article 113 du règlement intérieur de cette institution. Cet article stipule que "sont incompatibles avec le mandat de député, les fonctions de chef d'entreprise, de président de conseil d'administration, d'administrateur délégué, de directeur général, de directeur adjoint ou de gérant exercées dans des sociétés, entreprises ou établissements jouissant, sous forme de garantie d'intérêts, de subventions ou sous une forme équivalente, d'avantages assurés par l'État ou par une collectivité publique, sauf dans le cas où ces avantages découlent de l'application automatique d'une législation générale ou d'une réglementation générale". Il précise également que "les sociétés ayant exclusivement un objet financier et faisant publiquement appel à l'épargne et au crédit, les sociétés et entreprises dont l'activité consiste principalement dans l'exécution de travaux, la prestation de fournitures ou de services pour le compte ou sous le contrôle de l'État, d'une collectivité ou d'un établissement dont plus de la moitié du capital social est constitué des participations de sociétés ou d'entreprises ayant ces mêmes activités" sont également concernées. Pour rappel, les députés ont huit jours pour démissionner après leur installation. |
FATIMA ZAHRA DIALLO