La mer des trafics
Drogue, faux médicaments, marchandises frauduleuses… La mer devient de plus en plus une voie privilégiée pour les trafiquants et fraudeurs. L’Institut de sécurité maritime interrégional (ISMI) arme les administrations de l’Afrique de l’Ouest et du Centre pour barrer la route à ces trafics dans le Golfe de Guinée.
Le ciblage et le contrôle des conteneurs sont devenus un enjeu vital de sécurité et de développement dans les différents pays du Golfe de Guinée. Afin de lutter contre les trafics en tout genre, l’Institut de sécurité maritime interrégional (ISMI) d’Abidjan a entrepris un vaste programme de formation sur cette thématique à l’intention d’agents venus des différents pays de la CEDEAO et de la CEEAC, dont le Sénégal.
Selon le directeur de la structure, l’efficacité d’une stratégie globale de sécurisation repose non seulement sur les moyens opérationnels et l’adoption d’un cadre juridique adéquat, mais également sur la capacité des différents acteurs à collecter, analyser et diffuser l’information, afin de cibler les risques, définir des stratégies de lutte et orienter les interventions. ‘’C’est fort de cette perception que les résolutions du sommet de Yaoundé ont mis l’accent, certes sur la formation, la coordination des interventions, mais aussi sur le partage des informations et le renseignement’’, a-t-il insisté lors de la cérémonie d’ouverture de cette session de formation qui s’est tenue du 13 au 16 février à l’Académie régionale des sciences et techniques de la mer d’Abidjan.
De l’avis du Colonel Hervé Moussaron, chef de projet, ce thème sur le ciblage et le contrôle des conteneurs n’a pas été choisi par hasard. ‘’Aujourd’hui, indique-t-il, 80 % du transport de marchandises dans le monde passe par la voie des conteneurs… L’actualité vient nous rappeler que les trafics frauduleux en tout genre s’adaptent à une vitesse impressionnante à la conteneurisation des flux de marchandises, à commencer par le trafic de faux médicaments. Ce trafic de faux médicaments est la cause de plus de 100 000 morts par an en Afrique, selon l’OMS’’.
Citant le président du Togo, il ajoute dans sa déclaration lue par ‘’EnQuête’’ : ‘’L’ampleur du trafic est telle que, selon l’OMS, la proportion de faux médicaments représenterait sur notre continent 60 % des produits médicaux en circulation.’’ L’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime, dans un rapport publié le 31 janvier dernier, expliquait que ‘’jusqu’à 50 % des médicaments dans des pays du Sahel sont de qualité inférieure à la norme ou falsifiés.’’
Pour lutter contre le fléau et tous les autres trafics, il urge, selon le spécialiste, d’approfondir les connaissances des agents chargés du contrôle dans les différentes administrations des États partenaires.
Au-delà de cet aspect, cette session doit également servir de plateforme d’échanges entre les stagiaires des différents États, sur le plan des bonnes pratiques en matière de contrôle et de ciblage des conteneurs. ‘’De façon plus générale, ce stage vise à identifier les menaces et risques de criminalité portuaire spécifiques du Golfe de Guinée, à renforcer les capacités des équipes dédiées au ciblage des opérations à risque sur les conteneurs et aux équipes dédiées au contrôle et à la fouille des conteneurs. La session permet également de faire le point sur les dispositifs de contrôle existants, sur le cadre juridique en place, sur les structures existantes en matière de partage et de l’information, et de coordination de l’action des services, avec un focus particulier sur le trafic de faux médicaments’’.
Pour sa part, le directeur de l’ISMI a insisté sur le caractère stratégique de cette formation, car, indique-t-il, en Afrique de l’Ouest et du Centre, les ports sont le principal point d’entrée et de sortie des flux de marchandises.
Mor AMAR