Publié le 4 Mar 2020 - 23:46
ASER, SAMU, ACBEP…

L’Ofnac épingle plusieurs agents de l’Etat

 

Les structures publiques figurent en ligne de mire, parmi les cas avérés de fraude, corruption et détournement de deniers publics. Le rapport de l’Ofnac de 2018 est sans appel.

 

L’année 2018 a été ‘’fructueuse’’ pour l’Office national de lutte contre la fraude et la corruption (Ofnac). Son rapport d’activité en est la preuve, vu les multiples cas avérés de détournement de deniers publics. Parmi les 11 dossiers bouclés au terme d’investigations, figure celui du Service d’assistance médicale d’urgences Samu municipal de Dakar.

En effet, les faits remontent à avril et septembre 2016. Deux correspondances adressées à l’Ofnac par le Samu de Grand-Yoff dénonçaient les agissements du président du comité de santé et du trésorier. Des faits de détournement de deniers publics et d’enrichissement illicite commis par le biais d’achats de matériels médicaux, de prestations de services et d’attribution de marchés sans appel d’offres leur ont été reprochés.

‘’Les mis en cause ont profité de leurs positions respectives pour détourner des sommes d’argent dont ils étaient chargés de la gestion. Le trésorier a encaissé indûment des chèques établis pour le compte de prestataires de services au niveau du Samu. Le préjudice est estimé à 10 683 375 F CFA’’, détaille l’Ofnac, suite à son enquête, non sans ajouter que le président du comité aurait soustrait des caisses de la structure sanitaire 17 880 800 F CFA.

Au-delà du domaine de la santé, celui de la culture n’est pas épargné. A la Chambre des métiers de Dakar, l’enquête a relevé une augmentation des frais d’immatriculation pour les entreprises artisanales. Une hausse établie en violation de l’arrêté ministériel du 19 mai 1988 fixant le montant de la carte d’artisan à 3 500 F CFA. Pourtant, suite à une assemblée générale du 15 septembre 2009, le prix a été porté à 10 000 F CFA, sans l’aval du ministère de tutelle.

En outre, le président de la Chambre des métiers de Dakar est accusé par le coordonnateur du Collectif des artisans de Dakar, de manipulation du fichier pour établissement de cartes d’artisan attribuées à une clientèle électorale, l’envoi à l’étranger, sous couvert des foires et expositions, de candidats à l’émigration. A ce sujet, les investigations se poursuivent.

Ces agents de l’Etat qui font la loi…

L’ancien directeur de l’Agence sénégalaise d’électrification rurale (Aser) est, pour sa part, accusé de violation des procédures prévues dans le cadre de passation de marchés à l’entreprise Myna Distribution. Selon les investigations de l’Ofnac, ce dernier a ordonné le paiement d’une troisième avance de 3 228 544 568 F CFA, dépassant le plafond des 40 % d’avance autorisée sur le montant initial du marché.

Par ailleurs, le ministre du budget a autorisé, le 31 décembre 2015, le paiement simultané d’une avance de démarrage de 12 milliards et d’une avance sur approvisionnement, également de 12 milliards de francs CFA. Des décisions contradictoires aux dispositions de clauses administratives et générales relatives à la méthode et aux conditions de règlement du titulaire du marché. Pis, les travaux prévus pour une durée de 16 mois n’ont pas été réalisés à la date du 31 décembre 2016. L’office a été saisi, en février 2017, par le président du mouvement citoyen Jubanti Sénégal.

Décidément, aucun secteur n’est épargné. Deux anciens directeurs de l’école publique élémentaire Issa Kane de Grand Dakar n’ont pu justifier le gap financier entre les recettes et subventions reçues de l’Etat et de la mairie de Dakar, et les dépenses effectuées.

En effet, en l’absence de documents comptables, le département d’investigations de l’Ofnac a dû procéder à une reconstitution des chiffres sur la base d’audition des occupants des cantines et des réquisitions à la mairie. Ce qui a permis de révéler que les ressources reçues par le premier directeur, de 2011 à 2013, sont estimées à 9 399 000 F CFA. Grâce aux factures et au cumul des dépenses dues aux charges récurrentes (dont les pièces n’ont pas été fournies par les accusés), le total des dépenses est estimé à 4 839 598 F CFA. Un gap de 4 559 402 qui ne trouve point d’explication. 

Le second directeur (2013-2017) aurait, quant à lui, encaissé des ressources de 10 917 000 F CFA et fait des dépenses de 5 080 255 F CFA. ‘’Les mis en cause ont reconnu avoir utilisé à des fins personnelles les montants collectés. Le dossier a été transmis au procureur de la République’’, lit-on dans le rapport de l’Ofnac.

Les libéralités de la directrice de l’Agence de la construction des bâtiments et édifices publics

Le train de vie ‘’dispendieux’’ de la directrice de l’Agence de la construction des bâtiments et édifices publics (ACBEP) n’est pas passé inaperçu. Au point de susciter deux plaintes datant du 30 mai 2016 et du 24 octobre 2017. Elle a été dénoncée pour recours abusif à la procédure de gré à gré dans l’attribution des marchés publics, et de népotisme dans le recrutement du personnel. Les résultats de l’investigation font état de ‘’recrutements en violation des procédures normales, de l’application d’une échelle de rémunération en faveur de certains agents (membres de sa famille), de l’établissement de faux ordres de mission pour elle-même et ses agents’’. Et le directeur technique de l’ACBEP a reconnu avoir établi les ordres de mission en les faisant viser auprès du contrôleur régional des finances. La directrice est poursuivie pour escroquerie et complicité d’escroquerie.

Les litiges fonciers font également partie des plaintes parvenues à l’Office national de lutte contre la fraude et la corruption. Pour preuve, l’entreprise Sope Serigne Babacar Sy est citée dans une affaire avérée de minoration de prix de vente de terrain. Celle-ci a, en effet, déclaré à la Direction des domaines la somme de 150 000 000 F CFA, au lieu de 400 000 000, au cours d’une transaction foncière sur un terrain de 10 ha à Bambilor. L’Ofnac retient contre ses propriétaires plusieurs délits. ‘’Complicité dans la dissimulation du prix de vente d’un immeuble, faux et usage de faux, complicité de délit de faux sur des documents privés, violation de l’article 3 de la déontologie des notaires du Sénégal’’.

Tout est parti d’une plainte déposée en novembre 2015.

73 plaintes et dénonciations reçues durant l’année 2018

Dans le cadre de la lutte contre la corruption, le Bureau des plaintes et dénonciations a recensé 73 plaintes et dénonciations, durant l’année 2018. Parmi celles-ci, 44 viennent de la région de Dakar, 14 de Thiès. Toutes les régions ont enregistré des cas de corruption et de fraude, à l’exception de Tambacounda, Kédougou et Matam (24 pour fraude et corruption, 14 litiges fonciers, 14 faux et usage de faux). Le nombre de plaintes est passé de 614 en 2015 à 73 en 2018. Aucune plainte venant de l’extérieur n’a été enregistrée et 50 nouveaux dossiers d’enquête ont été ouverts, la même année, dont 39 sont en cours de finalisation.

Face à ces multiples cas, l’Ofnac demande une opérationnalisation de la stratégie nationale de lutte contre la corruption par un plan d’action 2020-2024, évalué à 10,172 milliards de F CFA. Entre autres recommandations, le ministère de l’Education nationale est invité à veiller au contrôle régulier, par les inspections d’académie, de la gestion des ressources des établissements scolaires.  Le ministère des Finances gagnerait, selon l’institution, à promouvoir la dématérialisation complète de ses procédures et de mettre en œuvre un système d’information intégré des différents services d’Etat.

EMMANUELLA MARAME FAYE

 

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