‘’J’ai bénéficié de l’expertise de Niasse, Tanor, Dansokho…, je suis chanceuse’’
Elle est belle, s’habille bien et a de l’allure. De femme cheffe de parti, Zahra Iyane Thiam est passée à membre du Secrétariat exécutif national de l’Alliance pour la République (APR), membre du Secrétariat exécutif permanent de Benno Bokk Yaakaar (BBY) et membre de la Conférence des leaders de BBY. Elle est également la ministre de la Microfinance et de l'Economie sociale. En ce 8 mars, elle est l’invitée de notre rubrique ‘’Grand’Place’’. Elle retrace son parcours, parle de son amour pour le zouk, son film préféré, ses lectures. Sans chichi, elle s’est livrée, même si, sur le débat sur l’éventuel 3e mandat du président Sall, elle fait un peu de langue de bois et botte en touche avec talent.
Vous appelez-vous vraiment Zahra Iyane Thiam à l’état civil ou vous avez décidé de glisser le prénom de votre père dans le vôtre ?
(Elle sourit) Non, non ! C’est mon nom à l’état civil. Je m’appelle Zahra Iyane Thiam. Je ne suis pas la seule, dans la famille, à porter le prénom du papa. Tous mes frères et sœurs ont le Iyane dans leurs prénoms.
Est-il facile de porter ce prénom ?
Les gens y sont maintenant habitués. Au début, les gens faisaient la relation, mais ce n’est plus le cas. Nous considérons notre père comme un patrimoine commun. Il appartient à tous les Sénégalais. Avant, on disait : ‘’C’est la fille de Iyane Thiam.’’ Maintenant, c’est le contraire, je crois (rire). Lui-même me le dit d’ailleurs. Il me dit : on dit : ‘’C’est le papa de Zahra.’’
Parlez-nous de votre parcours académique.
J’ai fait tout mon cursus primaire à l’école Al Zara. Elle était sur la rue Amadou Assane Ndoye. Elle se trouve présentement vers la gare routière. D’ailleurs, j’étais la première élève de toute l’école, à son ouverture. Ensuite, comme mon père est diplomate, j’ai eu à beaucoup voyager avec lui. Ce qui fait qu’on était tout le temps en déplacement. J’ai étudié au Maroc, au Caire. J’ai eu mon baccalauréat en 1992, à Madièye Sall, après avoir passé une année au lycée mixte Delafosse où j’ai fait la première B. Après cela, je suis allée à l’université. Ensuite, je suis repartie au Maroc pour poursuivre mes études supérieures. Je suis partie également aux États-Unis. Je suis revenue ici, j'ai fait l’ENEA, le Centre des études diplomatiques. C’est mon cursus. J’ai travaillé dans plusieurs structures, notamment à Air Afrique.
Quand vous avez décidé de faire de la diplomatie, était-ce pour suivre les pas du papa ?
Non, non ! C’était plutôt par rapport à mes ambitions. Une passion, on la vit. Je me suis dit qu’on était dans un monde où il fallait également formaliser les ambitions et passions qu’on avait. On peut avoir des prédispositions, des prérequis, mais il est toujours bon d’acquérir l’expérience, l’expertise par la formation. C’est pourquoi, lorsque j’ai vu que j’étais très portée sur tout ce qui est développement local, être à la base, accompagner la population, j’ai suivi des études en décentralisation, aménagement du territoire et développement local. C’était une passion chez moi. Je me suis dit également que dans le monde où nous sommes, il faudrait intégrer tout ce qui est géopolitique dans ce que nous faisons. C’est important, d’autant plus que j’ai eu, quand même, la chance de faire plusieurs pays, de découvrir d’autres cultures, d’autres personnes, d’autres visions du monde. Il fallait également que je puisse favoriser toutes ces dispositions que j’avais déjà.
Donc, ce n’est pas l’influence du papa qui m’a poussée à suivre des études en diplomatie. C’est plutôt sur la base de ce que je voyais à l’époque. Je me disais qu’il me fallait renforcer mes ambitions, mes désirs.
On vous présente comme celle qui vient des mouvements associatifs pour intégrer la politique. Vous vous identifiez à cette présentation ?
Oui, j’ai commencé dans les associations de quartier, parce que j'ai grandi à Liberté 2, au niveau des Sicap. Il y avait un fort mouvement de ‘’navétanes’’, de ‘’set-setal’’ surtout qui a un peu pris naissance là-bas. Nous étions des jeunes qui nous retrouvions dans notre quartier, soit pour organiser des fêtes, soit pour embellir un peu le quartier, au cours des navétanes, surtout. Chemin faisant, avec les leaders qu'on avait sur place, dont feu Kalidou Dieng, nous l’avons accompagné. C'est un peu cela qui a créé la transition. J’étais plus dans le mouvement associatif.
Au-delà du quartier également, j’étais dans d’autres mouvements qui m’ont conduite au niveau du Conseil national de la jeunesse. C’était un engagement, une passion qui m’a un peu poursuivie. Des mouvements associatifs aux partis politiques, je pense qu’il n’y a qu’un seul pas à franchir.
Quand avez-vous décidé de franchir le pas ?
C’est feu Kalidou Dieng qui m’a un peu poussée à l’accompagner politiquement. Il cherchait à être maire et nous, au niveau de notre quartier, puisqu’il était toujours auprès des populations, surtout des jeunes, il nous avait beaucoup accompagnés. On avait espoir qu'il pouvait changer les choses au niveau des Sicap, parce que c’est une commune où notre principal problème était la délinquance juvénile. Ce que nous ne constations pas dans d’autres communes. On avait fondé beaucoup d’espoir sur lui. Nous l’avons accompagné afin qu’il réalise son ambition pour les Sicap. Je pense que c’était les élections municipales de 2002 ou 2004. Je ne me souviens plus très bien de la date. On l’a accompagné, mais au finish également, on a ressenti une certaine frustration. On s’est dit qu’on a fait en sorte qu’il puisse gagner, puisqu’il était parti sous la bannière de la 5e coordination, mais au final, on ne l’avait pas choisi comme maire. On avait ressenti une certaine frustration. J’ai personnellement décidé d’abandonner, parce que, pour moi, un engagement, une fois qu’il est pris, il doit être respecté. Ce sont les premières frustrations que j’ai connues en politique.
Après je me suis dit, tant qu'à faire, nous avons une vision, une claire idée de ce que nous voulons que la politique soit, je ne vois pas pourquoi il faut l'imposer aux autres. Je pensais qu’il fallait plutôt se battre et être en face des autres pour imposer sa vision et ses principes. Plusieurs personnes m’ont approchée dont même le Rewmi, durant, je crois, les élections législatives de 2007, qui ont été après boycottées. Mais je n’ai voulu soutenir personne, parce que, pour moi, eux étaient là depuis longtemps, bien ancrés et moi je venais d’arriver avec ma propre ligne. J’ai partagé cette dernière avec plusieurs autres de mes camarades du mouvement associatif et ensemble nous avons décidé de créer notre parti politique et de défendre cette ligne. Lorsque nous avons créé le parti, j’ai été démocratiquement élue à sa tête.
Après tous ces refus, vous faites fondre votre parti dans l’APR/Yakaar. Cela signifie-t-il que votre ligne est celle du président Sall ?
Je n’avais jamais eu en perspective de fusionner le parti. Ce n’est pas une décision individuelle. C’est celle des instances qui se sont réunies. Je me souviens, à l'époque, on avait mis en place un comité technique dont je n’étais pas membre et qui travaillait cette question-là. Ils ont réfléchi autour du bien-fondé de cette fusion. Ils se sont retrouvés en un séminaire pour discuter de cette question. Cela a été, d'abord, une décision responsable, mais cohérente de notre part, puisque, lorsque nous nous sommes retrouvés au niveau de Benno Siggil Senegaal avec les autres leaders en 2009 déjà, nous avons eu à nous fréquenter. Donc, j’ai pu avoir une vue d’ensemble plus large, plus approfondie de ce que chaque parti politique pouvait réellement apporter au pays. C’était une nouvelle expérience, un autre niveau.
J’ai l’habitude de dire que la chance que j’ai eue, il est rare de voir un acteur politique qui l’a eu. J’ai pu bénéficier de l’expertise, de l’expérience des autres. Que ce soit le président Moustapha Niasse, le président feu Ousmane Tanor Dieng, le président feu Amath Dansokho, le président Landing Savané, le président Robert Sagna, le Pr. Abdoulaye Bathily. Je me suis retrouvée avec toutes ces personnes-là dans Benno Siggil Senegaal, chaque jeudi, pendant plus de trois ans. C’est toute une vie pour vous permettre de connaître la personne, surtout quand il s’agit de regroupements politiques où ce sont des ambitions qui s’entrechoquent. En étant dans l’opposition, tout le monde est quasiment à visage découvert. Ce que je peux dire, c’est que nous avons une classe politique qui a de l’expérience, qui sait prendre les bonnes décisions, quand c’est vraiment vital. Lorsque nous n’avons pas pu aller vers la candidature unique au sein de Benno Siggil Senegaal, naturellement, chacun a regardé en fonction de ses principes, ses ambitions politiques, le bord où il devait être.
Nous, nous avions, en ce moment-là, la même ligne d’action que le président de l’Alliance pour la République et nous nous sommes alliés à lui. En 2009, lors des élections, nous sommes allés ensemble, dans certaines localités, sous la bannière de ‘’Dekkal ngor’’. Chemin faisant, dans l’exercice du pouvoir, nous avons eu une convergence de vues. Il ne me paraissait plus indiqué d’être des partis individuellement pris. Il y avait, au même moment, le débat sur la prolifération des partis politiques. Le Secrétariat exécutif d’alors avait décidé de la fusion. Tous nos membres, au fil du temps, ont été bien intégrés dans les différentes structures de l’APR.
Aujourd’hui, nous nous considérons à part entière comme membres de l’APR. L’histoire, c’est vrai, il faut se la rappeler, mais le présent est plus important. Et c’est de consolider l’APR, le renforcer et en faire un parti aussi robuste qu’un parti politique peut l’être.
On vous définit comme la femme qui se bat pour avoir une place au soleil dans la politique. Est-ce une bonne idée de passer de chef de parti à membre d’un autre ?
Ce n’est pas cela le plus important. Ce n’est pas d'arriver juste à une station, mais c'est ce que vous amenez qui l’est. Etre militant d’un parti, c'est être à la disposition de ses concitoyens, bâtir, construire pour ses concitoyens. Donc, si c'est cela, la station importe peu tout comme l'outil. Dès lors qu’on arrive à être efficace dans le résultat. Oui, je me bats pour avoir des positions qui peuvent aider à développer le Sénégal, mais ce n'est pas une fin en soi. La fin en soi, chez moi, c'est de participer au même titre que tous les citoyens, les Sénégalais et les Sénégalaises, à l’effort de construction de notre pays. Vraiment, la station m'importe peu, parce que si tel était le cas, en 2012, j'étais dans la majorité, vous avez vu le débat qu'il y avait autour de ma personne. Mes partisans sortaient régulièrement pour demander ma promotion. Mais moi, cela n’a jamais été une finalité chez moi. Ma préoccupation, c’est de servir. Tant que je peux le faire, quel que soit, par ailleurs, le manteau que j’ai, je sers.
Mais quand les femmes n’occupent pas les postes de décisions, quand l’on se contente d’être juste derrière les autres, comment changer les choses ?
Ce que vous dites là est différent de ce que vous insinuiez tout à l’heure. Je suis tout à fait d’accord avec ça. Si on ne se bat pas, on n’a rien. C’est parce que nous nous battons, nous défendons nos idées, nous sommes robustes, résistantes, qu’on peut avancer. Ce que je dis, c’est qu’il ne faut pas se dire juste parce que je suis une femme, il faut me promouvoir ; je dois être à des stations de prises de décisions. Je ne suis pas dans ça. Avant tout, avant d’être des hommes ou des femmes, nous demeurons des personnes. Nous sommes des personnes avec grand P, pour ne pas dire homme avec grand H.
Dès lors, nous devons nous battre pour mériter ce que nous voulons avoir. Maintenant, il faut prendre en compte la spécificité. C'est à la femme qu’est donné l'honneur, le privilège de donner vie. C’est à la femme de supporter plus de douleur que les hommes. On le voit avec la naissance. Il paraît que c’était aux hommes qu’était dédiée cette tâche, mais ils n’ont pas pu supporter. Quand vous portez votre enfant pendant plus de neuf mois, avec tout ce que cela fait, vous ne dormez pas la nuit après l’accouchement. Vous avez cette sensation, cette fibre qui vous fait sentir tout ce qui se passe avec votre enfant. Ce sont des prérequis, c’est inné chez nous. Cette spécificité-là, il faut qu’on la prenne en charge. Ce sont des atouts, des forces que nous avons. Nous devons nous prévaloir de tous nos atouts pour nous imposer. La quasi moitié de la population est composée de femmes. Il est important de prendre conscience des faiblesses de cette frange. Il faut pouvoir contribuer comme il se doit. C’est de cela qu’il s’agit. Pour cela, nous qui avons la chance d’être à certaines stations, devrons nous battre pour que beaucoup plus viennent nous retrouver, afin que nous nous battions ensemble.
Je reste quand même convaincue que, qu’importe la station, seule la volonté et l’engagement comptent.
En politique, qu’est-ce qui explique que les femmes sont presque, tout le temps, reléguées au second plan ? Or, elles assurent, en amont, le gros du boulot, comme la mobilisation des militants ?
Cette situation que vous décrivez a beaucoup évolué, aujourd’hui, et le niveau ira crescendo. L’organisation des partis politiques justifie que les femmes ne puissent pas atteindre ou dépasser un certain niveau. Si, dans un parti politique, vous avez le directoire et à côté un mouvement des femmes, cela signifie qu’elles y sont toutes confinées. Cet état de fait peut l’expliquer. L’autre chose est que, malheureusement, pour la majorité de nos concitoyens, la politique, c’est d’abord les moyens. Malheureusement ! Si vous avez des responsables à la base qui viennent avec les moyens et sont le plus souvent des hommes, forcément, lorsqu’il s’agira de prendre ou de choisir des représentants de ces localités-là, vous aurez plus d’hommes que de femmes. Il faut travailler à changer cela, parce que, justement, pour que ces responsables-là puissent avoir la force qu’il faut, il faut des femmes et des jeunes derrière. C’est là où nous-mêmes devons réclamer plus.
La loi sur la parité vient en appoint. Pour les élections ou semi élections, il faut alternativement un homme et une femme. Les responsables politiques se plaignent souvent en disant qu’il est difficile pour eux de faire les listes. C’est difficile, parce qu’il faut mettre des femmes, donc, diminuer le quota des hommes. Ce qui revient à revoir à la baisse le quota des responsables qui, à la base, investissent plus. Souvent également, les profils ne correspondent pas totalement par rapport à ce qui est attendu.
Donc, nous avons des efforts à faire à ce niveau-là, en renforcement de capacités et à donner plus d’assurance à nos sœurs, pour qu’elles se disent également qu’elles peuvent et doivent être au front pour les autres. Il est heureux de voir que c’est une idée qui est de plus en présente. Allez à l’Assemblée nationale, vous y retrouverez des femmes qui représentent leurs départements au niveau des coins les plus reculés, mais qui défendent extrêmement bien les droits des femmes.
Si cette dynamique se poursuit, d’ici une décennie, forcément, cette tendance va inéluctablement encore prendre plus d’ampleur. Il est avéré que rien ne peut se faire sans les femmes.
Parlant de droits des femmes, que pensez-vous de la loi criminalisant le viol ?
Je pense que c’est une bonne chose. Cela renforce la protection des femmes. J’espère que cela va diminuer drastiquement tout ce qu'on a connu, surtout récemment, comme violences faites aux femmes, comme cas de viol où ce sont des meurtres qui s’ensuivent. Cette loi renforce également la protection des enfants. Ce sont nos premières richesses. Notre pays a changé de statut. Nous allons bientôt être un pays pétrolier, gazier. C'est très bien, parce que ce sont des richesses additionnelles qui sont attendues. Mais la première richesse qu’on doit exploiter, c'est la population et notamment la couche la plus vulnérable, en l'occurrence les femmes et les enfants. Avoir un cadre réglementaire qui assure encore plus leur protection est une bonne chose. Ce dernier doit être dynamique et suivre l'évolution de la situation actuelle.
Malheureusement, nous nous rendons compte que, de plus en plus, le monde devient violent. Les femmes deviennent de plus en plus exposées. Il faut avoir des Etats prévenants qui sont à l’écoute de leurs populations. Toute la population s’est émue de ce qui est arrivé à toutes ces jeunes filles, de Tamba à la banlieue dakaroise. Il est bien que, chaque femme, là où elle est, puisse sentir la protection de l’Etat à ses côtés.
C’est ainsi que je vois la loi criminalisant le viol et la pédophilie qui a été, il faut le rappeler, votée à l’unanimité par l’Assemblée nationale.
C’est une belle avancée, mais il y a des choses à faire encore, surtout en termes de droits parentaux des femmes. Quelle va être votre part dans ce combat que mènent des femmes pour plus de droits sur leurs enfants ?
Chaque chose en son temps. Il y a quelques années, on se battait pour la loi criminalisant le viol. Quand c’est le moment, les choses se font. Rappelez-vous, il y a quelques années, nous ne pouvions même pas donner notre nationalité à notre conjoint, s’il était de nationalité étrangère. Nous avons dépassé cette situation-là. C'est dire que les luttes se mènent. A chaque fois que le moment vient, quand les choses mûrissent, il n’y a rien à faire. L’essentiel, c’est de porter les combats. Nous jugeons que c'est un droit qu'il nous faut avoir, parce que c'est la réalité d'aujourd'hui. Avant, le chef de la maison, c'était le mari qui était chargé d'assurer, par ailleurs, la prise en charge de la famille. Mais aujourd'hui, nous nous rendons compte que, de plus en plus, les femmes doivent avoir leur mot à dire dans la gestion même de la famille. Mais est-ce qu'il faut le faire de force ? Faut-il trouver le juste milieu ? Tout cela doit être pris en charge.
Mais, d'ores et déjà, ce sont des réflexions qui sont enclenchées. C’est très bien et il faudra laisser le temps au temps, pour bien mûrir ces questions. Je pense qu’il n’y a pas de questions taboues ou de revendications illégitimes. Toutes les revendications sont bonnes, mais il faut juste les mettre à l’aune de ce que la réalité économique, sociale, traditionnelle nous impose. On va y aller petit à petit. Je pense qu’il est déjà bien que les questions soient posées. Nous devons continuer à nous battre pour avoir gain de cause.
Des femmes se battent contre le harcèlement sexuel ou moral. Personnellement, avez-vous été victime de harcèlement ?
Non, non ! Je le dis très sincèrement. Je n’ai jamais été victime de harcèlement, peut-être parce que je parle trop. D’habitude, on dit aussi que le harcèlement, c’est des deux côtés. Les hommes harcèlent, mais des femmes, également, le font. Pour moi, ce sont des questions sociétales de vie qu’il faut gérer par la réglementation d’abord, en mettant des mesures coercitives, mais également par le bon sens, la raison. Ce que j’ai aimé dans le vote de la loi criminalisant le viol et la pédophilie, c’est qu’il y a eu des femmes députés qui ont fait un plaidoyer à l’endroit des femmes, en leur disant que : dorénavant, cette loi est votée, elle renforce l’arsenal juridique de protection que nous avons.
Mais, en contrepartie, nous devons nous-mêmes veiller à nos comportements, en commençant par notre habillement. Il faut, des fois, revoir les comportements, nos habitudes à l’aune du monde d’aujourd’hui. C’est toutes ces considérations qu’il faut prendre. L’Etat doit jouer son rôle, d’abord, mais les parents, également, doivent jouer leur rôle. Des fois, on voit des victimes de viol dont les cas sont gérés par leur famille. Donc, cette responsabilité est individuelle avant d’être collective, encadrée par la réglementation. Je crois qu’il faut beaucoup de communication, de sensibilisation. Il faut des journées comme le 8 mars où l’on se retrouve pour échanger autour de ces questions, afin de trouver des solutions dynamiques.
A vous entendre, vous donnez l’impression d’être de ceux qui pensent qu’un homme a le droit de violer une fille qui s’habille sexy ou que cette dernière a une part de responsabilité dans son viol. Est-ce le cas ?
C'est une question piège, mais ce qui est également constant, c’est que certains peuvent retenir leurs pulsions. Qu’est-ce qui est l’élément déclencheur d’une pulsion ? C’est une question à prendre en compte. D’ailleurs, il y a l’adage wolof qui résume bien la situation et qui est une réponse à votre question : ‘’Day maaté wala dou maaté, bul dugaal sa lokho’’ (NDLR : Qu’il morde ou pas, n’introduit pas ta main).
Revenons à la politique. Quel est votre avis sur le débat autour du 3e mandat de Macky Sall ?
On avait un premier mandat PSE avec un PAP1. Aujourd'hui, nous sommes à un 2e mandat avec un PAP1. Quand on me demande mon avis sur le 3e mandat, je réponds que je règle les préoccupations de la population. Comme j’ai dit tantôt, la station importe peu. Ce qui importe, c’est de se battre pour son pays, de s’engager. Il y a le coronavirus, le terrorisme dans les pays frontaliers, la question de l’employabilité des jeunes, les grands chantiers que nous avons pour notre pays, et plein d’autres chantiers. Ajouter une question de mandat qui n’interviendra que dans quelques années, nous parait être une position puérile. Une fois que l’heure d’en parler arrivera, on en parlera.
Vous disiez tout à l’heure que, pour vous, quand un engagement est pris, il doit être respecté. Le président Sall a déjà pris l’engagement de ne pas briguer plus de deux mandats. Donc, en principe, pour vous, il ne devrait pas y avoir de débat ?
Je dis encore une fois que quand ce sera le moment de débattre de cette question, on en débattra. Dès lors que vous me posez des questions et que j’y réponde, on est dans le débat. Aujourd’hui, mon débat, c’est l’application, l’exécution, la mise en œuvre des politiques publiques. Vous savez que nous savons débattre et défendre nos positions. Le moment venu, on le fera.
Le débat du moment, sous d’autres chaumières, c’est votre côté ‘’swagg’’, fashion. Qui vous habille ?
(Elle rit) Ça, c’est vous qui me l’apprenez. Je n’ai pas un procédé particulier dans le choix des couleurs ou encore des vêtements. Là, je ne peux répondre (elle sourit). Je suis comme je suis. Je n’ai jamais changé. Je reste naturelle. Ce sont les couturiers qui me faisaient mes tenues avant qui me les font. Le plus souvent, c’est Sam Couture qui me fait mes tenues. J’en ai d’autres, mais je ne peux vous donner tous mes secrets.
Qui est votre chanteur préféré ?
J’étais très zouk avant. C’est commun à tous les enfants de la Sicap. Jusqu’à présent, j’écoute la musique zouk. J’écoute également Youssou Ndour, Pape Diouf, Wally, Pape Thiopet. J’écoute tout le monde. Dès lors que la mélodie est assez douce, j’écoute. Je suis Bideew Bu Bess, Carlou D. En musique, je n’ai pas de choix particuliers. J’écoute également beaucoup de musique arabe.
Quel est votre film culte ?
‘’Malcom X’’ avec Denzel Washington, j’ai beaucoup aimé ce film.
Vous avez un livre de chevet ?
Oui, mais je ne vais vous donner le titre (rire). Il est plus qu’un livre de chevet. Je le consulte très souvent. Avant, je lisais beaucoup. Je dois avouer que je lis moins, maintenant. Je ne vous dirai pas ce que je lisais, parce que je risque de trop me dévoiler. Quand je prends un livre, maintenant, c’est pour y chercher des solutions, soit à une situation donnée, soit pour découvrir des pensées de jadis. C’est plus de la recherche que je faisais. Le dernier livre que j’ai lu est celui du président de la République. J’ai aussi lu l’essai d’El Hadj Kassé.
BIGUE BOB