Les recommandations de la société civile
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L’installation du Comité de suivi de la mise en œuvre des opérations du Force Covid-19 est en voie. Des questions se posent autour de ses prérogatives et des autres personnes qui vont en faire partie, maintenant que le Général François Ndiaye a été nommé Président.
Dans la lutte contre la pandémie Covid-19, le Président Macky Sall s’est inscrit dans une démarche inclusive qui jure avec le cavalier seul et les polémiques notées sur certains sujets majeurs dont le calendrier électoral. Ainsi, dès le début, il a entamé une série de concertations avec l’opposition et la société civile et d’autres acteurs pour mutualiser les efforts face à cette pandémie. Mieux, le leader de Bby a, dans son adresse à la nation du 03 Avril, promis la mise en place d’un comité de pilotage pour la gestion du fonds force Covid-19, afin d’alléger les impacts de la pandémie. Ce comité doit, entre-autres, regrouper des parlementaires et membres de la société civile. Déjà le Général François Ndiaye a été installé à la tête de ce comité de suivi de la mise en œuvre des opérations du Force Covid-19.
N’empêche que les acteurs s’impatientent. D’ailleurs, le coordonnateur national de la plateforme Avenir Senegaal Bi Nu Beug, est d’avis que rien ne justifie les lenteurs notées dans l’installation de ce comité. Dr Cheikh Dièye explique à ce propos qu’il s’agit d’une opération relativement simple, car le Sénégal a beaucoup d’expériences dans la mise en place de dispositif capable de gérer un certain nombre de chantiers urgents. Ce qui l’amène à s’interroger sur le rôle de ce comité attendu pour plus de transparence dans la gestion du fonds de solidarité. Sur cette question, Dr Dieye indique qu’il doit participer à l’analyse des motivations pour tout ce qui concerne les achats, l’évaluation des besoins et les conditions d’attribution des marchés.
‘’On ne devrait pas démarrer les échanges, avant l’installation de l’organe chargé justement de superviser d’analyser, de contrôler la qualité des dépenses, leurs motivations et le respect de tout ce qui porte sur les principes et les règles en matière de transparence. Il est impératif de mettre en place ce dispositif, avant d’aller plus loin’’, estime le coordonnateur.
Valdiodio Ndiaye de la société civile souligne, lui, que le comité pourra faire des suggestions pertinentes à l’Etat, notamment, au président de la République qui, avec la loi d’habilitation, doit prendre des mesures hardies en vue de faire face à cette pandémie. ‘’Ce comité va devoir aider l’Etat sur les questions d’orientation budgétaire, de logistique au plan global. Les dommages collatéraux dans le secteur privé, avec les pertes d’emploi, le redémarrage du système éducatif par rapport au contexte...’’
Ce comité doit rétroagir
A présent que l’achat des vivres a été effectué et que l’acheminement est en train d’être effectif, Cheikh Tidiane Dièye pense que le comité peut toujours intervenir. ‘’Il faudrait que toutes les dépenses déjà effectuées soient aussi auditées et contrôlées par ce comité. Il doit regarder les conditions d’attribution des marchés déjà donnés, notamment, en ce qui concerne l’achat du riz et d’autres types de denrées et aussi l’octroi des marchés pour le transport. Chaque dépense effectuée doit être justifiée, quels que soient les montants en jeu’’, détaille Dr Cheikh Tidiane Dièye. A ses yeux, une fois mis en place, ce comité devrait rétroagir pour évaluer toutes les dépenses, afin de donner aux citoyens la vérité sur les deniers publics qui ont été dépensés. ‘’Il ne faut pas oublier qu’on a connu, dans le pays, d’autres scandales que ce soit, après le Fesman ou l’Anoci. Il faut éviter un scandale lié à la gestion du coronavirus, après la pandémie’’, prévient-il.
Pour Valdiodio Ndiaye, les orientations du Chef de l’Etat dans la gestion de cette pandémie sont claires, seulement, regrette-t-il, c’est au niveau de l’opérationnalisation qu’on note des dysfonctionnements. ‘’Ce n’est pas une affaire de département ministériel. Quand nous sommes en guerre, l’image est importante, la nation doit être mobilisée autour de l’essentiel. Il est plus efficient de mettre en place ce dispositif inclusif. Ce n’est pas une bonne chose de laisser tout concentrer autour d’un ministère’’, fait savoir M. Ndiaye.
Toutefois, le membre de la société civile est d’avis que la distribution de riz sur le territoire national au plus nécessiteux ne peut pas être remise en question. Ce qui pose problème, d’après lui, c’est que le président ait des pouvoirs dont il n’a pas usé au maximum. ‘’Il était en mesure, compte tenu de la loi d’habilitation, de réquisitionner et des personnes et du matériel. C’est une contradiction de remarquer que des Sénégalais proposent leur service, parallèlement, et on donne le marché à un autre. Cela pose problème et c’est regrettable. Il faudrait rectifier le tir, très rapidement’’, préconise-t-il.
‘’Il faut surtout exclure les profils à connotation politique’’
La question des profils se pose aussi avec acuité. Dr Cheikh Tidiane Dieye invite à faire en sorte d’avoir des hommes et femmes consensuels, en ce qui concerne leur intégrité, leurs compétences et leurs capacités à gérer ce fonds. ‘’Il faudrait regarder autour de certaines personnalités qui ont été au cœur de la gestion de l’Etat, pendant des années. Pensez aussi à y inclure des représentants du secteur privé, des Inspecteurs Généraux d’Etat (IGE), pour faire en sorte que les conditions de contrôle et de gestion de ce fonds soient les plus rigoureuses et efficaces. Un comité multi-acteur, ouvert, très inclusif et efficace qui pourrait gérer ce fonds assez spécial’’, indique Cheikh Tidiane Dièye.
Sur ce sujet, Valdiodio Ndiaye estime que le président de la République peut reprendre le format des consultations avec les différents segments des catégories socio-professionnelles pour mettre sur pied un comité consensuel et crédible. ‘’S’il y a de la volonté à ce niveau, on n’a pas besoin de demander à chaque segment de choisir des membres, ça va nous retarder. Le président peut facilement déceler les bons profils et sous ce rapport le travail va démarrer. Il faut surtout exclure les profils à connotation politique’’, souligne Valdiodio Ndiaye.
HABIBATOU TRAORÉ