‘’Si on m’avait suivi, tous les acteurs seraient candidats’’
Le président de la République espère passer le témoin à son successeur, avant son départ de la tête de l’Etat, ce 2 avril. Autrement, les Sénégalais n’auront pas droit à la scène du président élu recevant le témoin de la main de son prédécesseur. Dans un entretien avec BBC Afrique, il a réitéré son intention de quitter le pouvoir le 2 avril. Il est aussi largement revenu sur la crise préélectorale.
Lors d’un entretien avec BBC Afrique, le chef de l’Etat, Macky Sall, a été interrogé sur sa part de responsabilité dans la crise préélectorale qui a conduit, dernièrement, à des scènes de chaos et des morts d’homme. Il a dégagé toute responsabilité et a tenu à revenir sur la chronologie des faits qui l’ont fait abroger le premier décret convoquant le corps électoral pour le 25 février dernier. ‘’Non, je n’ai pas d’excuses à faire, puisque je n’ai commis aucune faute. En tant que président de la République, je suis responsable de ce pays jusqu’au 2 avril. Toutes les actions qui ont été posées l’ont été dans le cadre de la loi, des lois et règlements. Aucune institution juridique ni judiciaire de ce pays n’a remis en cause ou mis en doute la sincérité des actes qui ont été posés’’, a tenu à préciser le président de la République.
Relancé sur la question, Macky Sall a mis les points sur les i. ‘’Le débat est mal posé. Ce n’est pas une affaire de pardon. Il faut voir ce qui s’est passé. S’il n’y avait pas eu des contestations sur le processus de l’élection, sur les candidatures, il n’y aurait pas eu tous ces débats par la suite. On ne peut pas avoir un fait, l’ignorer et parler des conséquences’’. Cette précision faite, Macky Sall est entré dans les détails : ‘’Regardez les faits dans leur globalité. Quel est le déclencheur de tout cela ? A partir du moment où vous avez des contestations… Moi j’ai reçu plus de 46 candidats qui sont venus contester et qui ont dit qu’ils n’iront pas aux élections, parce qu’ils ont spoliés. D’autres ont dit qu’ils ont été éliminés de façon anormale. C’est leur point de vue et je ne commente pas ce que le Conseil a fait. Mais, à partir du moment où le Parlement, qui est la deuxième institution du pays et qui est le seul à voter des lois, prend l’initiative de voter une loi, le président qui est le chef de l’Exécutif doit tenir compte de ce fait. Et c’est ce qui a été fait. Donc, il n’y a pas à demander pardon pour cela. Et tout ce qui a été fait l’a été dans le respect strict de la Constitution’’.
D’ailleurs pour montrer qu’il est légaliste, il a sorti un exemplaire de la constitution de sa poche, pour dire qu’il se promène toujours avec.
Par la suite, il a été interrogé sur les déboires judiciaires de ces ‘’challengers’’ (Sonko, Diomaye, Karim Wade et Khalifa Sall). Macky Sall a d’abord réfuté le terme de ‘’challenger’’, en soulignant qu’il n’est pas candidat à cette présidentielle, pour ensuite, dire que ‘’ce n’est pas parce qu’on est politique, politicien, qu’on ne doit pas répondre de ses actes devant la loi’’.
Il s’explique : ‘’J’ai vu des responsables politiques qui ont prôné que le Chef de l’Etat doit être tué, son corps sorti dans la rue comme Samuel Doe. C’est ceux-là qu’on vient d’amnistier, pour faire le pardon, la réconciliation et que le pays retrouve la paix. On ne peut pas me faire ce genre de procès’’.
D’ailleurs, pour montrer sa bonne foi, il a ajouté : ‘’Si on m’avait suivi, il y aurait eu un processus où tous les acteurs seraient candidats. Sonko serait candidat, Karim et tous les autres. Mais, on a dit le processus est engagé, il faut le finir. Si on n’a pas eu le temps qu’il faut pour faire la campagne, ce n’est pas de ma faute. C’est évident’’.
Ainsi, il espère que l’élection va déboucher sur une transition pacifique. ‘’J’espère que le processus va se dérouler dans la paix et la transparence, comme le Sénégal sait le faire. Si un président est élu, dès le 24, nous aurons la chance que je lui passe le témoin. Sinon, moi le 2, je m’en vais. Parce que c’est le terme et je n’entends pas rester un jour de plus à la tête de l’Etat’’.
AMADOU FALL