La CDS dépeint un tableau sombre

La Confédération pour la démocratie et le socialisme – qui regroupe entre autres la LD, l’Ajpads et le PIT – s’est un peu attardée sur la situation actuelle du pays en évoquant diverses thématiques. Le moins que l’on puisse dire, c’est que ces partis de gauche ne mâchent pas leurs mots.
Dérives autoritaires, économie à l’arrêt, diplomatie qui s’étiole sur la scène régionale et internationale : pour faire court, la Confédération pour la démocratie et le socialisme dépeint un tableau peu reluisant de la gouvernance actuelle. Pour cette frange de la gauche, ce sont les signes d’un régime qui « tâtonne sans cap clair ni cohérence dans la conduite des affaires publiques ». Face à cette « inaptocratie » grandissante, Samba Sy et ses camarades ont décidé de monter au créneau. « Il nous revient, en tant que force politique responsable, de sonner l’alarme. En effet, il n’est pas exagéré de dire que notre pays est en danger ! En danger sur le plan de la démocratie et des droits de l’homme ! En danger sur le plan économique ! En danger sur le plan social ! En danger sur le plan diplomatique ! », souligne d’abord le leader de la Ligue Démocratique (LD) Nicolas Ndiaye. Ce dernier fait savoir que face à « une crise aussi vaste que profonde, il serait suicidaire d’opposer le mutisme ou le dédain. La gravité de l’heure commande un sursaut républicain pour une refondation morale et opérationnelle de l’action publique ».
Scrutant à la loupe chaque préoccupation, les gauchistes s’intéressent tout d’abord à cette menace qui pèse sur la liberté d’expression. « Depuis plusieurs mois, nous assistons, consternés, à la multiplication des arrestations arbitraires, devenues la signature infamante d’un pouvoir qui rejette toute forme de contradiction et redoute la moindre voix dissonante. La scène publique se transforme ainsi progressivement en un théâtre de répressions où l’opinion indépendante est perçue comme une menace, et où le débat démocratique se voit remplacé par l’intimidation systématique ».
Lors de ce rendez-vous avec la presse, le chef du gouvernement en a aussi pris pour son grade. Commentant la dernière sortie d’Ousmane Sonko, la CDS dénonce « avec la plus grande fermeté le comportement désinvolte, provocateur et outrageusement méprisant d’un Premier ministre qui, au lieu d’incarner la mesure et la dignité qu’exige sa fonction, se complaît dans les menaces à répétition, les invectives permanentes et l’escalade verbale ». Car Demba Sy et ses camarades de la gauche estiment que « l’injure n’est pas un mode de gouvernance ». Continuant de noter le PM, Nicolas Ndiaye s’est arrêté à ce qu’il considère comme « une frénésie de déplacements en jet privé, effectués dans une opacité totale, sans la moindre explication quant aux modalités de prise en charge financière ». D’après lui, cette attitude bambocharde contraste avec le fameux projet, une « fausse promesse » de « monts et merveilles aux populations, jeunes en particulier ».
Danger sur le plan économique
Concernant la rubrique économique, la CDS ne reste pas plus optimiste non plus. « Notre pays s’enlise dans une crise aussi profonde qu’inédite, dont les manifestations sont visibles à tous les niveaux de la vie nationale. Les chantiers du BTP, autrefois symboles de dynamisme et de modernisation, sont aujourd’hui à l’arrêt », affirme M. Ndiaye. « Ainsi, poursuit-il, sont abandonnés des milliers d’artisans, d’ouvriers et de techniciens à une inactivité forcée, charriant angoisse et inquiétude. Les entreprises de presse, garantes essentielles de la liberté d’informer et de la vitalité démocratique, se débattent dans une précarité sans précédent ».
La CDS nous apprend que ce n’est pas tout, dans la mesure où en milieu rural, « l’inquiétude grandit. En effet, dans de nombreuses contrées du pays, les semences distribuées par l’État se révèlent de qualité médiocre, voire totalement inadaptées. Ce qui compromet, dès le départ, les efforts de milliers de producteurs qui pourtant savent travailler la terre avec abnégation et foi ». Dans le contexte actuel, il n’est pas envisageable de parler économie sans évoquer la dette : « L’endettement du pays se mène à un rythme effréné, sans que l’on puisse en observer les contreparties en termes d’investissements structurants ou de retombées visibles pour les citoyens ».
Danger sur le plan diplomatique
Cette frange de l’opposition n’a pas omis de parler de la santé diplomatique du Sénégal, fragile à son avis. « Sur la scène internationale, un constat tout aussi préoccupant s’impose concernant le déclin du rayonnement diplomatique de notre pays. Le Sénégal, jadis perçu comme un exemple de stabilité, de maturité institutionnelle et de leadership en Afrique, voit aujourd’hui son influence s’éroder à un rythme alarmant », s’inquiète le secrétaire général de la LD. Il renchérit : « Notre pays, qui fut pendant longtemps une vitrine de la démocratie, un champion de la diplomatie constructive et un acteur écouté dans les cercles internationaux, semble désormais relégué à un rôle secondaire, devenant spectateur de grandes décisions lui qui fut naguère une force respectée de proposition ».
Toutefois, même si les « déconvenues diplomatiques » se multiplient, il estime « qu’il devient impératif, dans un contexte international en pleine recomposition, que le Sénégal renoue avec une diplomatie audacieuse, proactive, fondée sur une doctrine claire, une parole crédible et des actions cohérentes ».
Tout n'est pas perdu
Nonobstant ce constat amer, la confédération a voulu conclure par une certaine note d’espoir. Mais pour renverser cette fâcheuse tendance, il va falloir se mobiliser autour de l’essentiel : le Sénégal. « La CDS lance un appel solennel, ferme et retentissant à toutes les consciences éveillées et responsables. Il est temps de repousser la résignation et de réaffirmer, avec force, notre droit collectif à la dignité, à la liberté et à la justice ».
Dans son propos, Nicolas Ndiaye invite l’État à changer drastiquement de cap. « Cet appel est aussi un cri de raison et d’urgence lancé au gouvernement. Il est urgent d’opérer, sans délai, un changement profond d’attitude, de rompre avec l’arrogance, le mépris et l’opacité, afin d’ouvrir le chemin d’un redressement économique véritable et inclusif pour notre pays. Le Sénégal ne saurait s’accommoder plus longtemps de l’immobilisme hautain et de la gestion autoritaire ».
Mamadou Diop