''Il faut appliquer la loi pour plus de dignité dans la politique''
Le Professeur Mbaye Sidy Mbaye jette un regard sur la transhumance politique au Sénégal. Un fait qu'il décortique avec maitrise et lucidité.
Quel regard posez-vous sur la transhumance politique ?
Le terme de transhumance a connu de l’ampleur en l’an 2000. C'est quand Abdou Diouf est parti et qu'il y a eu une vague de socialistes qui, pour des raisons différentes, sont allés vers Abdoulaye Wade. Les uns pour se protéger, les autres parce qu’ils voulaient faire peau neuve et peut être refleurir. C'est à partir de ceux-là qu'on parlait de transhumants. Maintenant, je pense qu'il faut relativiser quand on parle de cette affaire. Quelqu'un peut quitter son parti politique et aller vers un autre, et sans qu'il soit mu par ses propres intérêts. Il peut-être quelqu'un de compétant, de reconnu. Je pense que si tel est le cas, cela peut se comprendre. Il ne faut pas non plus que les gens soient humiliés par un dogme. Quand la Nation a besoin de vous, il faut répondre et rester très digne. Il y en a d'autres qui effectivement, cherchent toujours à aller du côté du pouvoir. Je connais quelqu'un qui a été du PS, du PDS et en ce moment il est de l’APR. Ce genre de mouvement là manque un peu de dignité. Les partis politiques devraient même, pour ceux qui sont dans l'opposition, être plus regardants sur les gens qui les intègrent. Il ne faut pas non plus prendre n'importe qui comme militant. Prenez le cas de la dame qui vient de l'AFP et que Mansour Sy Djamil a inscrite dans sa liste (NDLR : Hélène Tine). C'est une battante ! Je ne la connais pas bien mais je crois qu'on l'a soumise à un mauvais traitement dans son ex-parti. Et c'est bien heureux que Mansour Sy Djamil l'ait récupérée parce que c'est une cadre politique. Est-ce qu'on va la qualifier de transhumant ? Je pense que non.
Le moment n'est-il pas venu d'appliquer la législation en ce sens ?
S'il y a une législation, il faut l'appliquer. C'est dommage que pour des raisons alimentaires, des gens cherchent à quitter leur groupe pour aller vers un autre. Je crois que c'est interdit et la loi doit être appliquée : si quelqu'un le fait, il perd son mandat. Donc je crois que pour cette législature on doit l'appliquer afin que les gens, pour des intérêts, arrêtent de quitter leur groupe pour aller vers la majorité. Il faut plus de dignité dans la politique. Cette loi devrait être appliquée à tous les élus locaux également pour bannir le phénomène.
Quel doit être donc le rôle de la morale dans la politique ?
La morale c'est le comportement. A l'école on vous a appris comment vous devez vous comporter dans votre profession. Il en ait de même pour la politique. On ne va pas en politique comme on va chercher de l'or. Non ! On va en politique parce qu’on a un projet social et un projet politique dont l'organe qui s’appelle peut-être parti politique doit permettre l'aboutissement. Vous vous servez de la politique pour aller vers la réalisation d'un projet. Donc c’est un instrument qui constitue une pratique sociale très claire qu'on doit concerter avec les militants, c'est-à-dire, les gens à qui appartient le parti. Ce dernier n'appartient pas au secrétaire général ni au président, parce que lui-même a adhéré au même titre que les autres dans le parti. A partir de ce moment, ils ont une direction concertée, une ligne d'horizon qu'ils ont tracé ensemble et il faut y aller avec dignité.
AMADOU NDIAYE