Publié le 21 Sep 2015 - 19:48
AFIQUE MONDE

« Ça ne passe pas ! », le message de la rue aux putschistes 

 

Un peu partout à travers le Burkina Faso, des habitants, souvent des jeunes, érigent des barrages routiers paralysant la circulation et le pays pour mettre la pression sur les putschistes.

 

Une épaisse fumée noire s’élève sur le grand axe routier de l’entrée ouest de Ouagadougou à Boulmiougou. Une trentaine de jeunes ont mis le feu à des pneus sur toute la largeur de la route presque neuve qui relie la capitale à la deuxième ville du pays Bobo Dioulasso. Ils ont installé des grosses pierres sur les voies parallèles en terre rouge. Tous les commerces sont fermés et la circulation est presque nulle.

Des mini-bus remplis de passagers et débordant de bagages apparaissent dans les contre-allées, tentant de contourner les barrages à travers les pistes pleines de trous du quartier. Peine perdue. Des jeunes leur intiment l’ordre de rebrousser chemin et montrent leur détermination en brandissant cailloux ou bâtons.

 « Vous n’écoutez pas la radio ? Vous ne savez pas ce qui se passe ? », crie un jeune. « On a fait partir Blaise (Compaoré, l’ancien président resté 27 ans pouvoir). Ce n’est pas pour qu’il revienne ou pour voir revenir son aide de camp un an plus tard. Nous sommes là pour montrer au RSP », le Régiment de la sécurité présidentiel, à l’origine du putsch, « notre mécontentement. Il faut qu’ils partent », affirme André, un étudiant, en attente des résultats de son concours.

Samedi, aucun membre des forces de l’ordre n’était visible alors que jeudi et vendredi des membres du RSP avaient tenté de disperser les manifestants parfois en faisant usage de leurs armes. Dix personnes ont été tuées et 113 blessées, de source hospitalière, tandis que les syndicats parlent eux d’une « vingtaine de morts ».

« C’est ville morte »

« Ses balles sont nos impôts. Il faut paralyser le pays. On a dit que c’est « ville morte ». Donc personne ne passe ici », affirme Souleiman Kabore, un jeune des barricades. « L’économie ne doit pas fonctionner tant que Diendéré est au pouvoir! Ici, il n’y a pas de politique, pas de partis, pas de Mossi (ethnie) ou autres. La patrie ou la mort ! » Les jeunes hurlent leur approbation.

En suivant la route vers le centre, on passe trois barrages similaires. Le dernier est composé d’un bus calciné la veille. « Diendéré doit descendre », estime Drissa un couturier, qui ne travaille plus depuis trois jours. « L’argent commence à manquer ».

À Ouagadougou, la plupart des commerces et administrations sont fermées. « Les gens ont peur de sortir », précise une jeune femme sous couvert de l’anonymat. Dans l’Ouest, la situation est similaire. A Bobo Dioulasso, les barrages empêchent tout véhicule d’entrer ou de sortir de la ville. Seules exceptions : les malades. « Si quelqu’un veut aller à l’hôpital ou à la pharmacie, on le laisse passer », explique un jeune.

Entre les deux grands pôles du pays, à Houndé, petite ville, la route est coupée par pas moins de quatre barrages. « On ne veut pas des bandits du RSP. On fait de la résistance active », explique Diabaté Brahima, vêtu d’une veste militaire « Je suis officier du peuple ! ». Il conteste les négociations avec la junte et notamment la mission du président sénégalais Macky Sall. « Il n’aurait pas dû discuter avec lui à l’aéroport. Il le crédibilise. On ne doit pas négocier ! »

« Monter à Ouagadougou »

À Houndé, les barrages ne sont pas hermétiques : les véhicules passent entre 12h et 13h ainsi qu’entre 16h et 17h. « On ne veut pas pénaliser les gens mais faire passer le message ». Sur le bord de la route, le « Café des amis » tente d’ouvrir. Aussitôt, la foule s’amasse et scande « Ferme ou casse! » Le gérant d’abord récalcitrant et qui exhibait une machette doit entendre raison sous peine de tout perdre.

Ousseni Bounou, éducateur, assure que le RSP va vite partir et espère encore que l’élection du 11 octobre aura lieu. « S’ils ne partent pas, on va prendre les armes et monter à Ouagadougou », promet Ouedraogo Issaka.

Deux pick-up de gendarmes casqués tentent alors de traverser la ville. La foule se regroupe autour des véhicules. Après des tractations, les gendarmes continuent leur route sans heurts. « Ils nous ont demandé la permission de passer. Ils sont avec nous, raconte Issa. S’ils avaient voulu passer en force, ils seraient cadavres! CA-DAVRES! »

JEUNEAFRIQUE.COM 

 

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